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QUEER

Dans le Mexico des années 50, Lee, un américain, mène une vie désabusée au sein d’une communauté d’expatriés. L’arrivée du jeune Allerton va bouleverser l’existence de Lee, et faire renaitre en lui des sentiments oubliés.

Critique du film

Après le très dispensable Bones and All et le tapageur Challengers, l’incroyablement prolifique Luca Guadagnino adapte le roman de William S. Burroughs, déjà porté à l’écran en 1991 par David Cronenberg avec Le festin nu. On rencontre le personnage de Lee, un quinquagénaire américain expatrié à Mexico dans l’espoir de profiter d’une vie d’excès. Mais le film, chapitré en trois parties, se révèle très inégal.

Dans le premier chapitre, sans conteste le plus intéressant, Queer déploie, dès sa toute première scène une esthétique léchée qui offrira de belles séquences, comme celle qui voit Lee arpenter les rues sur le Come as You are de Nirvana, faisant la tournée des bars locaux et enchaînant les breuvages alcoolisés et quelques fringants repas. Lee se noie dans ces plaisirs jusqu’à s’oublier, y compris dans les bras d’un amant éphémère dans un love hotel. Dès les premiers instants, cet homme profondément seul suscite déjà un peu la pitié, frôlant le ridicule et souvent dans un état d’ébriété avancé, partageant cette errance avec quelques connaissances vivant différemment ou non leur orientation sexuelle. Il porte sa tristesse tel un fardeau, contrastant avec la palette de couleurs à l’écran, jusqu’à ce qu’apparaisse Eugene, un bel étudiant qui l’hypnotise au premier regard.

Queer

C’est ce rapprochement, filmé avec un sens de l’esthétisme indéniable, qui est au coeur du premier chapitre fait de sensualité, d’hésitation et de maladresse. Mais le garçon est fuyant, comme une proie qui prendrait plaisir à provoquer son prédateur sans assumer réellement son attirance charnelle. L’est-il vraiment ou joue-t-il (in)consciemment avec l’intérêt de cet homme seul, qui semble prêt à beaucoup pour partager sa compagnie et son lit ?

Dans un rôle qu’il serait aisé de qualifier d’à contre-emploi, on découvre un Daniel Craig émancipé de sa virilité bondienne, fragile et rempli d’insécurité face à ce jeune éphèbe qui le fascine. Mais l’addiction de Lee, comme un moyen de s’anesthésier pour mieux vivre son homosexualité, interdite à l’époque aux Etats-Unis, va rompre le charme dès le deuxième chapitre qui le voit sombrer progressivement. Le troisième, lui, s’égare définitivement et le spectateur avec, dans une quête incompréhensible pour rencontrer une sorte de Shaman qui maitriserait l’art de la télépathie.

De l’aventure humaine en cadre urbain à l’exploration spirituelle en terre hostile, Queer perd définitivement tout équilibre et gâche son potentiel d’attraction initial, rappelant la fâcheuse tendance du cinéaste italien à laisser son formalisme prendre le pas sur le narratif.

Bande-annonce

26 février 2025 – De Luca Guadagnino

Avec Daniel CraigDrew StarkeyLesley Manville