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MY LOVE AFFAIR WITH MARIAGE

Dès son plus jeune âge, Zelma a été persuadée par les chansons et les contes de fées que l’Amour résoudrait tous ses problèmes, pour peu que sa conduite soit conforme à ce que la société attend d’une jeune fille. Mais à mesure qu’elle grandit, plus elle essaie de rentrer dans le moule, plus son corps entre en résistance…

CRITIQUE DU FILM


A l’instar du célèbre réalisateur Bill Plympton pour lequel elle a officié quelques années, l’animatrice d’origine lettone Signe Baumane s’est spécialisée dans les dessins animés en 2D, dessinés à même le papier. En partie financé par une campagne participative Kickstarter, son nouveau projet My Love Affair with Marriage ne déroge pas à cette règle, à ceci près qu’il emprunte minute après minute plusieurs techniques d’imagerie classique ou numérique pour sursignifier le désordre psychologique et social de son personnage principal, Velma.

Cette dernière, originaire du bloc soviétique des années 1970, complexe à l’idée de trouver l’amour parfait dans l’espoir de pouvoir enfin combler son existence qu’elle juge un peu trop vaine. Ses rencontres amicales et amoureuses auront au fur et à mesure des conséquences autant narratives que cérébrales. En effet, les pérégrinations de la protagoniste sont entrecoupées de monologues médicaux dessinés entièrement via Photoshop sur le fonctionnement neurologique du corps humain lorsque Velma se retrouve face à un autre personnage.

Cette dichotomie entre travail manuel et animation assistée par ordinateur donne alors au film un sentiment de chaos structuré, où l’anarchie de trouvailles graphiques formidables s’entremêle à une étrange sensation de programme déroulé durant une centaine de minutes. Sous l’égide d’un conte de fées subversif, My Love Affair With Marriage est tout autant un « musical » qu’un documentaire animé sur les merveilles bio-mécaniques ; ou parfois un essai fantasmagorique sur la mutation psychologique des individus lors du passage à l’âge adulte. Il y a donc énormément de matière et d’idées, mais Signe Baumane et son acolyte Sturgis Warner semblent immédiatement ranger par strates de récit, qui ont le plus grand mal à rentrer en collision et donner un cocktail graphique séduisant d’explosivité.

My love affair with marriage

En outre, l’imposante voix-off, soulignant les sentiments de Velma face à ce qu’elle voit ou imagine, semble parfois étouffer la possibilité d’amplifier la possible difformité de certains espaces ou corps. Cela a évidemment pour but d’appuyer l’importance de la soumission de cette jeune femme à des diktats que la société n’a eu de cesse de lui imposer durant des années, provoquant une charge mentale trop lourde à porter pour ses frêles épaules. Toutefois le systématisme perpétuel donne aussi au récit une atmosphère trop cadrée, nimbée par des impératifs narratifs explicites que certaines rimes animées auraient justement pu outrepasser petit à petit et rendre encore plus grotesques ou caricaturaux.

En somme, My Love Affair With Marriage n’a rien de déshonorant, n’est pas dénué d’humour – l’hymne soviétique est un running gag qui gagne en charme au fur et à mesure de ses apparitions – et rappelle parfois les tableaux surréalistes du peintre Marc Chagall (toute la séquence avec la transformation en morse mérite le coup d’œil), mais sa rigide stratification narrative l’empêche de faire éclater le trop-plein d’idées qui fourmille à divers endroits du long-métrage.

Bande-annonce

7 juin 2023 – De Signe Baumane, avec les voix de Dagmara Dominczyk, Matthew Modine et Michele Pawk.




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