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THE INSIDER

L’histoire d’un couple d’agents secrets, George Woodhouse et sa femme Kathryn. Lorsque Kathryn est soupçonnée de trahison envers la nation, George doit faire face à un dilemme déchirant : protéger son mariage ou défendre son pays.

Critique du film

Londres. Un rendez-vous mystérieux. Des agents secrets qui discutent en langage codé. Un homme séduisant à la mise impeccable avec une femme belle et énigmatique. Vous y êtes ? Alors sachez que vous avez été piégé par une fausse piste ! Bien qu’au premier coup d’œil ça en ait la couleur, l’odeur et même l’ex-agent Pierce Brosnan en directeur des services secrets, nous ne sommes pas devant le nouveau James Bond. Car en effet, sans aucun combat à mains nues, à peine quelques coups de feu et zéro gadget, on se demande même si The Insider ne se positionne pas volontairement en anti-007. 

Loin d’être péjoratif, ce postulat d’une approche exclusivement psychologique du genre au détriment de toute manifestation virile et sexiste est rafraîchissante et bienvenue. Elle permet aussi à Soderbergh de s’amuser avec sa mise en scène, plaçant par exemple sa caméra comme une espionne, à la surface de l’eau pour observer deux hommes sur une barque, ou encore en hauteur, dans l’angle d’une pièce, comme s’il s’agissait d’images de vidéo-surveillance. En s’éloignant des codes attendus par ce format, le Soderbergh nouveau délaisse également la patte qui l’a rendu célèbre (montage morcelé et scénario à tiroirs) au profit d’une écriture visuelle très précise et d’une narration conventionnelle.  

The insider

Après des décennies à se familiariser avec différents genres, passant de grosses productions calibrées pour le box-office (la saga des Ocean’s 11) aux petits films indés sortis directement sur plateformes (Kimi), le stakhanoviste Soderbergh tourne toujours, et toujours aussi vite. Avec deux films sortis à quelques mois d’intervalle (voir Presence), la courte retraite du second Steven S. de Hollywood (ou du troisième, si on compte Steven Seagal) est déjà un lointain souvenir. Non content d’ajouter les fonctions de directeur de la photo et de monteur à celle de réalisateur sur chacun de ses projets, Soderbergh continue de prendre l’industrie de court avec un rythme de production effréné. Car si on récapitule, The Insider a été annoncé en janvier 2024, tourné en mai et projeté sur les écrans seulement neuf mois après les dernières prises de vues, tour de force démontrant l’expérience et l’aisance d’un Soderbergh qui tourne plus vite que son ombre.

Le résultat, tiré de sa troisième collaboration avec le scénariste David Koepp (après Kimi et Présence) est un thriller incisif et ouaté, mais qui, malgré ses qualités, ne constitue pas encore le « grand film » qui manque à la carrière de son réalisateur. La facture a beau être classieuse (long plan-séquence en ouverture, direction artistique feutrée et chatoyante, environnement étonnamment calme pour un film d’espionnage), elle n’en est pas moins classique. Mais après tout, peut-être que son ordre de mission ne tolérait aucun écart ni aucune exubérance. Dans ce cas, mission accomplie.

Bande-annonce

12 mars 2025De Steven Soderbergh