RUE DU CONSERVATOIRE
» En 1996 j’ai passé le concours du conservatoire. Je l’ai raté. Il y a un an on m’a demandé d’y faire une masterclass sur le jeu d’acteur au cinéma. J’y suis allée. J’ai rencontré une jeunesse vivante, joyeuse et passionnée. Parmi mes élèves il y avait Clémence. L’année d’après, elle m’a demandé de filmer leur dernier spectacle. J’ai ressenti son urgence et la peur qu’elle avait de quitter ce lieu mythique. Alors j’ai accepté. En filmant cette jeunesse, j’ai revisité la mienne. » Valérie Donzelli.
Critique du film
Lors d’une masterclass donnée au Conservatoire d’Art Dramatique, Valérie Donzelli, qui avait échoué au concours d’entrée de cette prestigieuse institution en 1996, a eu un contact privilégié avec des élèves comédiens passionnés, habités au sens fort par une fougue et une envie d’allier tradition et modernité. Parmi les personnes rencontrées, Clémence doit mettre en scène Hamlet, dans une adaptation qui revisite avec beaucoup d’humour et de créativité la pièce incontournable de Williams Shakespeare, en accordant une grande place à la question de la femme. Clémence souhaiterait immortaliser ce travail de troupe grâce à la caméra et au regard de Valérie Donzelli. Ce travail de dramaturgie mené par Clémence vient également clôturer un cycle de formation qui doit ouvrir vers le début de la carrière théâtrale. C’est donc bientôt la fin d’une aventure estudiantine marquée par l’esprit de troupe et peut-être une forme d’insouciance.
Film sur le feu de la jeunesse et l’enthousiasme et témoignage sur la passion du théâtre, Rue Du Conservatoire constitue un documentaire qui relate fidèlement le travail que représente le fait de monter une pièce avec ce que cela implique de foi, d’espoir, mais aussi de fatigue et de découragement, voire d’angoisse. Passé l’enthousiasme des débuts, Clémence peut parfois se sentir piégée par la charge qu’elle a prise sur elle. Non seulement, Clémence a choisi une œuvre du répertoire particulièrement mythique et très souvent montée – donc, en découle l’injonction d’être pour le moins originale, voire novatrice -, mais elle tient également aussi, semble-t-il, à épargner toute pression à ses comédiens et comédiennes. Elle fait preuve d’une bienveillance, d’une empathie et d’une maturité rares.
Au cours de ce film, on fait connaissance avec certains élèves et on constate la diversité des profils présentés. Pas seulement en raison des origines sociales et ethniques, mais aussi au regard des personnalités et des parcours. Peu de temps avant ce cycle de formation, certains des protagonistes ne s’intéressaient ni au théâtre, ni à la littérature. La rencontre avec le texte et les planches a bouleversé leurs trajectoires et changé leurs vies. Certains témoignages s’avèrent particulièrement émouvants.
Valérie Donzelli a choisi de mêler quelques archives personnelles aux images du présent. C’est aussi la rencontre de deux générations qui se côtoient et se respectent et qui, surtout, sont traversées par une passion inébranlable et un esprit de troupe qui permettent de venir à bout d’un travail exigeant et néanmoins ludique. Il est aussi question de transmission, celle du texte et des valeurs du théâtre.