Ollie – Still 06

OLLIE

À 13 ans, Pierre revient vivre à la ferme de son père après le décès brutal de sa mère. Harcelé à l’école, il se réfugie dans sa passion : le skate. Il rencontre Bertrand, un marginal qui cache un passé d’ancien skateur, et qui le prend sous son aile. Ensemble, ils vont tenter de se reconstruire.

Critique du film

Pendant que les secours s’occupent du corps récemment décédé de sa mère, Pierre reste en dehors de la scène. En faisant du skate dehors sur la terrasse alors que l’intérieur de la maison est occupé, traversé par le drame, celui-ci se place à la marge de l’action. La marge est parfaitement ce qui définit Ollie, à la fois un film sur la ruralité, un film de fantôme et un film de skateurs, une communauté souvent marginalisée. 

Après le départ brutal de sa mère, Pierre doit retourner vivre auprès de son père, un agriculteur percuté de plein fouet par la crise économique qui frappe sa profession. Cet ancrage géographique  fait écho aux sorties de ces derniers mois comme Miséricorde d’Alain Guiraudie, Vingt Dieux de Louise Courvoisier ou La Pampa d’Antoine Chevriller, qui témoignaient déjà d’une ambition nouvelle du cinéma français de quitter Paris et décentrer son regard. 

Alors que le raz-de-marée Tony Hawke est survenu il y a une vingtaine d’années, il a fallu attendre plus de 20 ans pour assister à la réalisation du premier film français sur le skate. Ollie est d’autant plus inédit car il est également le premier sur la pratique du skate à la campagne. Dans l’imaginaire collectif, le skate est vraiment rattaché à un univers urbain, gris et bétonné. Sous la réalisation d’Antoine Besse, la crise économique du secteur agricole est moins un sujet tangible que le témoignage de ce monde vacillant et incertain. Ainsi, les scènes où Pierre fait des figures entourées des vaches parquées dans leurs enclos apportent une perspective neuve, bienvenue.  

Ollie

Mais passé ce premier regard assez frais, Ollie reste d’un classicisme dommageable dans sa construction narrative. Pour retrouver sa place dans le monde, Pierre va compter sur le soutien de Bertrand, une ancienne gloire du skate qui est tombé dans tous les abus après la perte douloureuse d’un proche. Passant de la timidité, voire une forme de méfiance, à une vraie complicité, ces deux êtres meurtris et traversés par le deuil vont tenter de (re)forger leur identité respective à l’aide de leur passion commune pour le skateboard. Antoine Besse arrive à insuffler de l’émotion à ce binôme, même si la relation qu’il dépeint dans ses cadres ne défriche jamais rien de nouveau et reproduit mécaniquement certains poncifs du genre. 

Dans une œuvre donnant aux outsiders et aux oubliés la lumière, des partis-pris plus audacieux auraient permis au film de sortir de la mêlée et affirmer ses bonnes idées avec plus de caractère. Surtout, comment ne pas déplorer l’absence totale de personnages féminins pratiquant le skate dans le film ? En se concentrant exclusivement sur ces hommes marginalisés ; le père est un agriculteur négligé, le fils est harcelé à l’école et Bertrand souffre de problèmes d’alcoolémie qui l’excluent du monde du travail – Ollie crée en son sein une autre frontière : celle qui sépare les hommes des femmes. L’amie de collège de Pierre, Jeanne, a pour elle de ne pas être totalement efféminée et d’être passionnée de moto-cross, mais elle n’existe dans le film uniquement comme une amourette d’été. Entre audace et maladresse, Ollie est marqué par tous les symptômes du premier essai et aurait sûrement mérité mieux. 

Bande-annonce

21 mai 2025 – D’Antoine Besse