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L’ÉPOUVANTAIL

Deux hommes se lient d’amitié en partageant le feu d’une dernière allumette sur le bord d’une autoroute. Lion compte regagner son foyer, abandonné depuis quelques années. Max, tout juste sorti de prison, rentre au pays pour y monter une station-service.

Cycle Palmes d’Or

Le réalisateur Jerry Schatzberg a débuté comme photographe, notamment de mode, et avait réalisé deux films avant de tourner L’Épouvantail en 1973 : Portrait d’une enfant déchue, superbe portrait de femme à la vie superficielle et chaotique avec une Faye Dunaway bouleversante, et Panique à Needle Park, déjà avec Al Pacino, dont c’était le véritable premier grand rôle et qui offrait une description sans concessions des ravages de la drogue à New York. Les personnages auxquels s’intéresse ce grand metteur-en-scène ne sont pas des héros, mais des êtres blessés, des perdants, mais parfois des perdants magnifiques comme c’est le cas ici.

Lion (Al Pacino) souhaite rejoindre la femme dont il s’est séparé il y a plusieurs années et avec laquelle il a eu un garçon. Max (Gene Hackman) a effectué quelques années de prison et voudrait ouvrir son entreprise de lavage de voiture. Lion est chétif, il esquive les bagarres et répond à la violence par l’humour. Max est un homme costaud et prompt au coup de poing. Les deux hommes que tout semble opposer font connaissance au bord d’une route sur laquelle ils cherchent individuellement à se faire prendre en auto-stop. Une dernière allumette à laquelle on renonce pour offrir à celui qu’on ne connaît pas encore la possibilité d’allumer sa cigarette va commencer à sceller entre les deux hommes une amitié faite de solidarité, d’entraide et de partage, de bons moments et de galères.

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Le courage, l’amitié

À travers le périple de Lion et de Max, on découvre des États-Unis bien éloignés du fameux rêve américain : paupérisation, violence psychologique et physique, mais aussi sociale, car les exclus, une fois tombés dans la marginalité, le seront peut-être toute leur vie. Une fois tombé, il n’est pas sûr qu’on puisse se relever. La relation qui se noue entre Lion et Max constitue l’un des plus beaux atouts de ce film magnifique, dans lequel le talent de ces deux grands acteurs s’avère évident à chaque scène, qu’il s’agisse de moments humoristiques ou de passages dramatiques.

Comédie dramatique au sens noble du terme, à l’instar des grandes comédies italiennes des années 1960, L’Épouvantail fait très certainement partie des plus belles réussites du cinéma américain des années 1970. On s’attache très vite à ces deux hommes, malgré leurs faiblesses et leurs défauts. Leur courage à continuer à batailler malgré les obstacles et l’amitié qui se noue entre eux sont traités avec beaucoup de sensibilité.

Avec sa superbe photographie signée Vilmos Zsigmond, les interprétations fortes et nuancées de Gene Hackman et d’Al Pacino et son histoire belle et déchirante, L’Épouvantail a amplement mérité la Palme d’or au Festival de Cannes 1973 qui lui a été décernée – ex aequo avec La Méprise d’Alan Bridges – et remporta aussi le Prix OCIC (Office Catholique International du Cinéma). Il s’agit d’un grand film humaniste où seules comptent les valeurs que l’on porte et ce que l’on donne à l’autre, qu’il s’agisse de sa dernière allumette, de sa protection ou de sa philosophie de vie, aussi dérisoire soit-elle.


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Rétrospective spéciale Palmes d’Or