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FREE GUY

Un employé de banque, découvrant un jour qu’il n’est en fait qu’un personnage d’arrière-plan dans un jeu vidéo en ligne, décide de devenir le héros de sa propre histoire, quitte à la réécrire. Évoluant désormais dans un monde qui ne connaît pas de limites, il va tout mettre en œuvre pour le sauver à sa manière, avant qu’il ne soit trop tard…

Critique du film

Pour sa campagne promotionnelle, Free Guy s’est affiché en se réappropriant plusieurs succès vidéoludiques. On retrouve les protagonistes du film, tels des avatars, dans les univers de jeux tels que Among Us, Animal Crossing ou Super Mario 64. Une campagne inoffensive en apparence pour une opération marketing qui surfe sur le sujet que le film aborde, à savoir le jeu-vidéo. Sauf que cette démarche finale fait preuve de cynisme, par sa volonté de caresser le spectateur dans le sens du poil avec des références qu’il connaît déjà. Une attitude opportuniste, à l’image du film qu’elle sert.

Il faut être honnête une minute : fallait-il réellement s’attendre à de l’originalité en lisant le synopsis de Free Guy ? La quête de Guy (Ryan Reynolds), celle de changer sa routine de PNJ, rappelle le souhait d’un antagoniste vidéoludique dans Les Mondes de Ralph. Le simulacre qui lui sert de monde sans qu’il s’en aperçoive nous ramène aux caméras braquées sur le pauvre Jim Carrey dans The Truman Show. Il faut également repenser au fait que l’Intelligence Artificielle est devenue un sujet usé jusqu’à la moelle dans la science-fiction mainstream, de Ex Machina à Rick and Morty. Mais derrière tous ces ingrédients secoués inlassablement au shaker, il y a un réalisateur qui laisse encore songeur pour une œuvre inspirée : Shawn Levy.

Car avant de retenir le Shawn Levy qui a participé à la nostalgie régressive en produisant Stranger Things, il ne faut pas oublier celui qui transpirait un amour pour la culture Amblin en exprimant une innocence rare dans le cinéma fantastique. L’exemple le plus flagrant étant La Nuit au Musée qui, en trois volets, interrogeait tel un enfant ce qui se passerait si ce qui était exposé au musée prenait vie. Le voir s’attaquer à un monde imaginaire inspiré du jeu-vidéo s’avérait alors prometteur pour la naïveté spectaculaire qu’il pouvait offrir aux spectateurs. La séquence d’ouverture, plan-séquence numérique qui montre l’environnement du jeu (Free City) dans un déluge d’explosions, se révèle particulièrement ludique. Il faut aussi prendre en compte le fait que le film promet une attaque à l’industrie du jeu-vidéo et ses fléaux (harcèlement, vols de projets etc…), le tout incarné par un patron égocentrique campé par un horriblement cabotin Taika Waititi.

Made in Disney

En soi, Free Guy s’avère alors un film dans l’air du temps dans les sujets abordés. Mais c’est en cela sa véritable limite : c’est un film dans l’air du temps. Il va ainsi récupérer les pires défauts du cinéma de divertissement américain moderne : la croyance réelle du cinéaste au monde qu’il filme s’effondre par la part trop importante laissée à la comédie. Et par comédie, il faut traduire par comédie de Ryan Reynolds. Là où un film sorti récemment comme Hitman & Bodyguard 2 savait se débrider en laissant des parts de comédie à l’ensemble de son casting, le moteur comique du film inspire peu à la rigolade quand on se rend compte que l’on va subir le même numéro ahuri d’un Reynolds qui se caricature en permanence.

Quant au message sur l’intégrité créative, ne soyons pas dupes : il s’agit d’un film produit par Disney. Derrière une fiction qui souhaite écorner les entreprises qui engloutissent les labels indépendants (ce que sera l’arc narratif des personnages de Jodie Comer et Joe Keery), Free guy comporte son lot de séquences à la gloire de l’empire Disney, truffées de références et caméos opportunistes. Truffé de ces bugs d’un profond cynisme, Free Guy n’est au final qu’une énième version de ces blockbusters génériques et sans âmes qui se créent actuellement. Ce constat n’aurait pu engendrer qu’une simple indifférence, une ignorance polie. Mais il est difficile de ne pas être agacé de suivre un film qui montre des personnages se révoltant contre un C.E.O pour au final nous conforter dans l’univers d’une hégémonie qui englobe tout dans son passage et qui cause du tort à l’imaginaire et à celles et ceux qui le projettent. Cela s’expose dans un point culminant d’une trentaine de secondes, une durée qui peut sembler courte mais qui fait un tort considérable à la fiction… 

Bande-annonce

11 août 2021De Shawn Levy, avec Ryan ReynoldsJodie Comer




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