still_Coda

CODA

Dans une ville de pêcheurs du Massachusetts. Ruby, dix-sept ans, est l’unique membre de sa famille à ne pas être atteint de surdité – également désignée comme CODA, acronyme de l’anglais pour « child of deaf adults ». Sa vie se résume à servir d’interprète pour ses parents et, chaque jour, à aider son père et son frère sur le bateau de pêche familial avant de se rendre à l’école. Lorsque Ruby s’inscrit à la chorale du lycée, elle se découvre un don pour le chant et s’éprend de son partenaire Miles. Encouragée par son professeur aussi enthousiaste qu’exigeant à postuler dans une prestigieuse école de musique, Ruby se retrouve vite écartelée entre les obligations qu’elle croit devoir à sa famille et la poursuite de ses rêves.

Critique du film

Lors du Festival de Sundance 2021, CODA a décroché quatre prix majeurs, dont le grand prix du jury et le prix du public, mais aussi ceux honorant l’ensemble du casting et la meilleure mise en scène. Il n’en fallut pas plus pour attirer l’attention d’Apple qui en acquit les droits pour une somme record afin de le mettre à disposition sur sa plateforme – encore assez confidentielle dans l’hexagone. Et si ce coûteux pari se révélait finalement gagnant avec un sacre aux Oscars 2022 ? Récompensé par la suite dans de nombreuses cérémonies, le remake américain du plutôt médiocre La famille Bélier semble tenir la corde, au point de laisser penser à un couronnement lors de la célèbre cérémonie académique à Hollywood face aux brillants Drive my car et West Side Story ou au mastodonte Dune.

Confiée à Siân Heder, jusqu’alors connue pour la réalisation de quelques épisodes de séries TV et le long-métrage Talulah pour la plateforme Netflix, l’adaptation américaine du grand succès populaire français pourrait être qualifiée de bonne surprise inespérée. En transposant son récit dans un petit bled du Massachusetts, en troquant le cadre agricole pour celui de la pêche et les tubes de Michel Sardou pour l’œuvre de Joni Mitchell, Coda réussit à sonner bien plus authentique que le film dont il est pourtant adapté. Tirant son titre de l’acronyme qualifiant les enfants d’adultes sourds, CODA suit la jeune Ruby, 17 ans, tiraillée entre une famille pas forcément facile à vivre mais pleine de vie, pour qui elle est l’indispensable intermédiaire avec le monde des « parlants », et son envie de voler de ses propres ailes et d’explorer sa nouvelle passion pour le chant. C’est à travers ce nouvel espace que Ruby pourrait bien trouver ce moyen d’émancipation auquel elle aspire, ainsi que dans le lien qu’elle tisse avec son professeur de chant, d’une part, puis avec son camarade incarné par Ferdia Walsh-Peelo (découvert dans le très plaisant Sing street, où il tenait déjà plutôt bien la note) d’autre part.

En lieu et place de l’irritante Louane Emera, on retrouve l’actrice révélée par la série Locke & Key, Emilia Jones. La comédienne fait preuve de bien plus d’aptitude et de subtilité dans la comédie qu’elle met au service de ce récit d’apprentissage d’une jeune femme qui se sera jusqu’alors toujours sacrifiée au profit de sa famille. Dans le rôle de ses parents, les comédiens Marlee Matlin et Troy Kotsur – tous deux sourds à la ville – apportent ce supplément d’authenticité évoqué plus haut, là où Karin Viard et François Damiens singeaient lourdement la surdité. Ce choix donne une portée nettement plus sincère à cette version américaine et de sens aux moments de silences, qui résonnent parfois comme des coups dans l’abdomen pour le spectateur comme pour Ruby, décidément bien isolée dans son propre foyer. Les plus beaux moments du film se jouent souvent dans ces silences, que la cinéaste réussit à rendre justes et émouvants.

Après plusieurs prix outre-Atlantique et outre-Manche (Troy Kotsur semble faire l’unanimité), Coda peut-il créer la surprise en devenant le successeur de Parasite et Nomadland ? Sans faire offense à ce film attachant porté par une comédienne lumineuse, West Side Story comporte dix fois plus de cinéma à la minute que cette charmante mais pas inoubliable adaptation.

Mise à jour : le film a reçu le prix du meilleur film de l’année aux Oscars.

Bande-annonce


Disponible sur Apple TV en France




%d blogueurs aiment cette page :