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S’EN FOUT LA MORT

Dah est du Bénin, Jocelyn des Antilles. Ils sont noirs et forment une belle équipe qui participe aux combats de coqs clandestins. Alors qu’ils sont sur un gros coup, la mort va s’en mêler.

Critique du film

Tourné tout de suite après Chocolat, son premier film, S’en fout la mort de Claire Denis suit les péripéties de deux hommes noirs, l’un africain – Isaach de Bankolé – et l’autre antillais – Alex Descas qui sont engagés par un homme blanc plus âgé – Jean-Claude Brialy qui souhaite organiser des combats de coqs clandestins dans un lieu désaffecté de la zone de Rungis.  

Dah et Jocelyn sont tous les deux noirs, et leur couleur de peau comme leur rapport avec les blancs sont aussi au cœur du film. Jocelyn, martiniquais et donc français, a peut-être l’illusion d’être moins marginal, moins perdu en métropole que son ami béninois. Mais l’homme blanc dominateur et manipulateur que joue Jean-Claude Brialy ne se contente pas de le duper, de l’exploiter. Il le maltraite ouvertement et se montre odieux avec lui, insultant sa mère et sa mémoire. 

Les comédiens sont tous impeccables : Isaach de Bankolé, tout en puissance, Alex Descas, plus fragile mais tout aussi touchant en homme lié à son coq de façon fusionnelle, Jean-Claude Brialy en homme d’affaire véreux. Autour d’eux, Solveig Dommartin – la trapéziste des Ailes du désir – et Christopher Buchholz complètent la distribution de ce film original qui nous montre un milieu, des pratiques et des personnages rarement mis en avant. Malgré la rudesse de l’activité que pratiquent ces hommes, malgré cette cruauté, on suit les personnages de Dah et de Jocelyn avec intérêt, avec attachement. 

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La photographie du film confère à cette histoire une ambiance cafardeuse, cotonneuse et crépusculaire. Le musicien de jazz sud-africain Abdullah Ibrahim, alias Dollar Brand, a composé pour S’en fout la mort une musique entêtante. Formellement, esthétiquement, ce deuxième long-métrage de Claire Denis était aussi réussi qu’il était riche thématiquement.

Pour ce film, croisement entre polar, réflexion socio-ethnique et fable poétique, Alex Descas a suivi un entraînement aux Antilles pour être un coqueleux crédible, ce qu’il est indubitablement à l’écran et pas seulement devant la caméra d’après l’homme qui l’a formé. Soulignons, et ça a bien sûr son importance, qu’aucun animal n’a été tué ou maltraité durant le tournage. L’équipe de tournage bénéficiait d’un groupe d’une cinquantaine de coqs, plusieurs pour chaque couleur. Aucun coq ne tournait plus de quelques minutes, avant d’être remplacé par un autre animal de même apparence. 


Disponible depuis le 28 juin en combo Blu-Ray + DVD édité par Pathé, dans une version superbement restaurée avec deux suppléments : la présentation du film à la Cinémathèque et un entretien entre Claire Denis, Alex Descas et Agnès Godard. 




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