Toute la mémoire du monde 2020

TOUTE LA MEMOIRE DU MONDE 2020 | FESTIVAL

Dans cette période troublée où la réaction d’un vieux monde essoré inquiète et menace plus que jamais, la 8ème édition du festival du film restauré Toute la mémoire du monde semble tombé au bon moment. Quelques choix forts sont à distinguer pour ce rendez-vous des amoureux du cinéma de patrimoine organisé par la Cinémathèque française.

Tout d’abord le choix de la marraine pour 2020, l’immense Isabella Rossellini, à la fois héritière de deux grandes traditions cinématographiques, mais également artiste aux différents profils, pierre angulaire et passeuse de plusieurs époques du 7ème art. Sa présence sur les différents sites de l’événement, et principalement rue de Bercy dans les trois salles du musée inventé par Henri Langlois, va être le moment de (re) découvrir plusieurs temps forts des décennies passées. Par son entremise c’est tout à la fois Ingrid Bergman, Roberto Rossellini, mais aussi David Lynch, Humphrey Bogart, Guy Maddin, ou bien son talent de réalisatrice qui seront mis à l’honneur. Ce choix d’une femme aussi libre et créative qu’Isabella Rossellini est un véritable motif de réjouissance. Dès mercredi 4 mars elle sera présente pour présenter plusieurs films, mais également là pour une masterclass qui promet d’être riche et passionnante.

Mary Pickford dans Rosita d'Ernst Lubitsch
Autre moment important et significatif de ce 8ème festival du film restauré, le cycle consacré à l’actrice et productrice étasunienne Mary Pickford. Immense star du premier cinéma américain, elle a participé à la création de la United Artists, réponse des premiers grands acteurs du cinéma muet à la main mise des studios sur leur art. Cette société avait pour but de créer et de contrôler une partie de la manne financière pour un cinéma plus conforme à leurs attentes. Les quelques films projetés à la fondation Pathé permettent de se confronter à quelques uns de ses plus grands succès, comme La petite Annie de William Beaudine, mais aussi des films moins plébiscités par le public des années 1920, comme le Rosita du grand réalisateur allemand Ernst Lubitsch, qui lui fit jouer un rôle d’adulte, elle qui était confiné jusque là à des prestations d’éternelle adolescente rebelle. Contemporaine de Greta Garbo, Pola Negri ou Gloria Swanson, Pickford avait cette spécificité d’être à la fois une star devant la caméra mais aussi d’avoir très vite acquis ses galons de femme d’affaire, devenant très jeune une précurseur au sein d’une industrie radicalement machiste et masculiniste.

Au delà de ces deux événements majeurs, notons que comme chaque année un grand nombre de très belles restauration de films rares et peu diffusés seront présentés sur les différents sites du festival. On peut en effet citer un cycle de films du trop peu connu Delmer Daves, réalisateur notamment de la première version de 3h10 pour Yuma, ou encore de La maison rouge avec Edward G. Robinson. Autre cycle qui s’annonce passionnant, et qui se prolongera au delà des dates du festival, celui consacré au réalisateur Philip Kaufman, également présent pendant ces quatre jours. Le point culminant de cet hommage est sans aucun doute son plus grand film L’étoffe des héros, épopée narrant la conquête spatiale du coté américain, avec un casting phénoménal d’où émergent les figures de Sam Sheppard, Dennis Quaid et Ed Harris. Film au souffle et à l’ambition incroyable, il s’applique à mettre en valeur les folies d’une époque où chaque instant comptait pour être le premier à conquérir l’espace, au mépris de toute sécurité et de toute raison.

Les profanateurs de sépultures de Don Siegel (1955)
Enfin, une édition de Toute la mémoire du monde ne serait pas complète sans une nuit consacrée à une thématique forte du cinéma de patrimoine. On a pu constater encore l’année passée que l’histoire des Profanateurs de sépultures, plus connu sous son titre original des Body Snatchers, séduisait encore énormément les auteurs contemporains, avec une nouvelle interprétation signée Jessica Hausner et son Little Joe. Pas moins de quatre films sont au programme de cette nuit du samedi 7 mars, de la première et fantastique version de Don Siegel (1955) jusqu’à celle d’Olivier Hirschbiegel en 2015. Les films de Philip Kaufman (1978) et d’Abel Ferrara (1992) complètent un tableau qui s’annonce déjà terrifiant.

La tradition du cinéma-concert final est cette année encore respectée, avec la projection de L’homme à la caméra, dernier film muet du réalisateur soviétique Dziga Vertov, mis en musique par Ben Shemie.


Toute la programmation est à retrouver sur le site de la Cinémathèque française.



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