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Georges Pierre – 100 ans, 100 films : profession photographe de plateau

Cet ouvrage de Laurence Pierre de Geyer, Laurent Benyayer et Philippe Sichler – les deux derniers nous avaient livré il y a quelques mois un très beau livre chroniqué ici : Philippe de Broca, un monsieur de comédie – revient sur le travail de Georges Pierre, grand photographe de plateau qui a commencé à immortaliser certaines des plus grandes pages du cinéma français depuis L’Année dernière à Marienbad d’Alain Resnais jusqu’à La Note bleue d’Andrzej Zulawki. 



Né en 1921 et décédé en 2003, Georges Pierre, qui aurait donc eu 100 ans cette année, était diplômé de l’Ecole Centrale. Il a commencé à travailler comme ingénieur, puis pour la Commission Supérieure Technique du Cinéma et à l’ORTF. Tenté par le théâtre, il devient comédien. Lors d’une tournée en Afrique, il réalise ses premiers clichés. Après avoir été pigiste, puis rédacteur, il devient photographe indépendant et commencera une carrière de photographe de plateau qui le verra travailler avec les plus grands réalisateurs : Jean-Luc Godard – les débuts de Georges Pierre coïncident avec ceux de la Nouvelle Vague -, Alain Resnais, Claude Sautet, Robert Enrico, Yves Robert, Orson Welles, Philippe de Broca, Jean-Paul Rappeneau, Bertrand Tavernier, Just Jaeckin ou Yves Boisset pour n’en citer qu’une partie. Quant aux actrices et acteurs que Georges Pierre a immortalisé avec énormément de respect et d’acuité, une liste non exhaustive permet d’imaginer le parcours hors normes de ce photographe aimé et reconnu par les artistes qui l’ont côtoyé : Marlène Jobert, Romy Schneider, Isabelle Adjani, Jane Birkin, Sophie Marceau et Nathalie Baye. Mais aussi Lino Ventura, Alain Delon, Gérard Depardieu, Michel Piccoli, Philippe Noiret…

L’ouvrage débute par une préface de Marlène Jobert et un avant-propos de Costa Gavras qui rendent parfaitement hommage à l’amour que Georges Pierre portait au cinéma et aux artistes mais aussi à son grand talent et à ses qualités humaines. Georges Pierre savait se montrer discret, respectueux et extrêmement patient pour obtenir des photos qui devaient restituer l’esprit du film qui se tournait. Les clichés qui étaient pris lors des tournages marquaient la rencontre entre l’univers d’un film et le regard d’un photographe qui cherchait le naturel, l’originalité du cadre et effectuait un véritable travail personnel d’interprétation et d’implication. 

Par respect pour les artistes et les techniciens qu’il ne voulait pas déranger et pour mieux capter les ambiances, l’esprit d’une scène ou d’un film, Georges Pierre avait mis au point le Blimp, une sorte de boîtier qui contenait l’appareil photo et étouffait le bruit de celui-ci lors de la prise de photos. Cette innovation permettait notamment de prendre des photos directement pendant le tournage de scènes, donc de restituer l’intensité des situations. Mais aussi de ne pas troubler les personnes photographiées et qui étaient alors immortalisées avec un naturel, une spontanéité rares.

Les clichés que nous présente ce très bel ouvrage ont une valeur artistique par eux-mêmes. Ils sont accompagnés de très beaux textes de Nathalie Baye, Pierre Richard, Bertrand Tavernier – un des derniers qu’il ait écrit – Just Jaeckin ou Jane Birkin, qui a ces mots qui résument l’essentiel : « C’était les plus belles images de notre jeunesse. Merci de nous avoir préservés du temps ».

Toutes les photos contenues dans cet ouvrage captivent et peuvent émouvoir. Impossible de toutes les citer bien sûr, mais parmi ces clichés précieux, on peut notamment apercevoir un Claude Chabrol rigolard et facétieux, des instantanés extraordinaires de Romy Schneider et de Bertrand Tavernier sur le tournage de La Mort en direct, Jean Ferrat rendant visite sur le tournage du film Le Secret de Robert Enrico, des images de tournages de film d’Andrzej Zulawski qui restituent bien l’intensité de son cinéma. Mais aussi la merveilleuse complicité d’Isabelle Adjani et de Jacques Dutronc sur Violette et François de Jacques Rouffio ou celle de Catherine Deneuve et de Philippe Noiret, empreinte de tendresse sur L’Africain de Philippe de Broca. 

Lors du Festival de Cannes de 1986, Georges Pierre obtint le Rollei d’Or, premier grand prix remis à un  photographe de plateau, pour son travail sur le film Harem d’Arthur Joffé. Georges Pierre avait fait don  de ses archives à la Bibliothèque du Film. Les photographies qui illustrent ce bel ouvrage sont pour la plupart inédites. 

Georges Pierre a contribué à la mémoire des films et a immortalisé la jeunesse et la beauté des artistes, mais également la passion des cinéastes. L’ouvrage que Laurence Pierre de Geyer, Laurent Benyayer et Philippe Sichler lui consacrent est disponible dès le 24 juin, édité par Néva Editions. 

Geoges Pierre




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