THE BEAR
À la suite du suicide de son frère, Carmen Berzatto, un jeune et prodigieux chef du monde de la gastronomie, retourne à Chicago pour prendre la direction de l’établissement familial, un modeste restaurant de sandwichs au bœuf.
Critique de la série (saison 1)
C’est sur l’instrumental de New Noise de Refused que commence The Bear, série qui met les pieds dans le plat dès ses premières secondes. Lâché au cœur du Beef, ce restaurant de sandwichs dans un quartier modeste de Chicago, le spectateur est immédiatement emporté dans cette épopée culinaire renversante. Les personnages se hurlent dessus, s’insultent, pleurent. Les bases sont posées, et quiconque pouvait penser que le rythme effréné de ces quelques minutes se tarirait dans les épisodes suivants sera surpris : la série de Christopher Storer ne nous laisse presque aucun moment de répit. The Bear ne prend pas son temps. Manquer quelques secondes pour regarder son téléphone, c’est manquer le cœur même de l’œuvre, dont la beauté et la dramaturgie résident dans ce tempo étouffant imposé du premier au dernier épisode.
Nominée aux Golden Globes dans la catégorie de meilleure série musicale ou comique, The Bear n’a pas volé sa place. Entre deux combats psychologiques menés par ses protagonistes, la pression imposée par la restauration est admirablement dépeinte. D’un côté, les gestes répétitifs et oppressants des petits établissements qui peinent à tenir le rythme. De l’autre, les traumatismes laissés par des chefs cuisiniers étoilés à l’exigence malsaine. Grâce aux plans rapprochés sur les assiettes et plats préparés par l’équipe du Beef, The Bear éveille les sens et les papilles, presque déçues de ne pas pouvoir goûter l’écran. Ventres vides, s’abstenir. Mais la série disponible sur Disney+ n’est pas qu’un voyage gustatif, elle nous plonge également dans les esprits de personnages complexes et brillamment écrits.
Vite fait, bien fait
La courte durée de The Bear pouvait effrayer. Mais en huit épisodes d’environ trente minutes, Christopher Storer parvient à dévoiler une trame narrative bien plus complexe qu’on ne l’imaginait. The Bear évite le piège dans lequel The Menu (Mark Milord, 2022) a plongé : critiquer le monde de la gastronomie sans jamais développer ses protagonistes. Carmen Berzatto est d’abord profondément détestable, puis attachant, puis de nouveau horripilant. Mais il fait partie d’un tout, d’un quartier mal fréquenté, d’une famille divisée, d’une équipe pétillante à la volonté de fer : malgré son rythme effréné, The Bear nous force à nous attacher à ses personnages et à ce petit restaurant débordant de vie. Et Jeremy Allen White, vainqueur du Golden Globe du meilleur acteur de sa catégorie, n’y est pas pour rien. Grâce à son interprétation digne d’un trois étoiles, chaque scène est une tranche de vie, qui captive l’œil et enivre l’esprit. Les émotions se mêlent dans un chaudron d’incertitude, jusqu’à l’apothéose du dernier épisode et un monologue mémorable. Christopher Storer nous rappelle qu’il est possible de faire court tout en faisant bien, ce que de nombreux showrunners semblent avoir oublié…