BRøDRE : MARKUS ET LUKAS
Deux frères, Markus et Lukas, vivent dans une ancienne maison au cœur d’Oslo. La rivière coule près de leur foyer. Un véritable paradis en pleine ville. Nous les voyons grandir, tandis que leurs rêves et leurs espérances prennent forme. Parfois, ce qu’ils désirent et ce dont ils ont besoin est à l’opposé de ce qu’on attend d’un fils ou d’un frère parfaits.
Comme ils grandissent.
« On m’a dit que seul Terrence Malick savait comment filmer des roseaux, mais moi, je les ai filmés bien avant lui », plaisantait mercredi Aslaug Holm lors d’une session de questions-réponses avec le public à l’Espace Saint Germain. La Norvégienne n’a en effet pas attendu que le réalisateur américain glane la Palme d’or en 2011 avec Tree of Life pour immortaliser avec sa caméra les soubresauts de la nature puisqu’elle a entamé le tournage de Brødre : Markus et Lukas en 2007. Et elle n’a pas davantage eu besoin de voir sur grand écran les questionnements métaphysiques de l’auteur de Knight of Cups pour se plonger dans une multitude de réflexions : qu’est-ce que grandir ? qu’est-ce qu’un souvenir ? qu’héritons-nous des générations passées ?
Autant d’interrogations qui traversent son documentaire, pour lequel elle a filmé pendant plus de huit ans ses deux fils au quotidien, et dont les réponses varieront en fonction de la perception de chaque spectateur. Aslaug Holm ne livre pas de vérité toute faite, mais des instants de vie, des bouts d’intimités, qui peuvent potentiellement trouver un écho dans le regard et le vécu du public. Jamais la caméra n’est impudique ou intrusive – ce qu’elle capte, ce sont ces petits et grands moments qui composent une vie, le stress de la rentrée du petit Lukas, 5 ans, la joie que l’aîné Markus tente de contenir après s’être fait percer l’oreille, les instants de complicité et les coups bas entre frères…
« Pourquoi penses-tu que je vous filme ? » demande Aslaug à Lukas qui lui répond « Pour qu’on se souvienne de toi quand tu seras morte. » La phrase cogne à l’oreille. « J’ai eu l’impression de m’entendre. Je crois qu’il a répété quelque chose qu’il m’avait entendue dire, expliquait la maman et réalisatrice lors du même débat à l’Espace Saint-Michel le jour de la sortie du film en France. De quoi se demander si nos souvenirs ne sont pas aussi fabriqués par les gens qui nous entourent. » Brødre peut ainsi se voir comme un album vidéo de famille dont la petite musique revêt une résonance universelle, comme un film sur l’enfance et l’immersion dans l’adolescence de deux garçons norvégiens, mais aussi comme le récit d’une artiste et mère de famille, qui regarde ses fistons grandir tout en conjurant sa peur du temps qui passe. Là encore, tout est question de point(s) de vue et de regard(s).
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