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LA FILLE AU BRACELET

Lise a 18 ans, elle vit dans un quartier résidentiel sans histoire et vient d’avoir son bac. Mais depuis deux ans, Lise porte un bracelet électronique car elle est accusée d’avoir assassiné sa meilleure amie.

Critique du film

Qui détient la vérité ? Est-ce Lise Bataille, 18 ans, accusée d’avoir tué sa meilleure amie Flora, et vivant depuis deux ans avec un bracelet électronique ? Est-ce l’avocate générale, persuadée de voir derrière la froideur monolithique de Lise la parfaite assassine ? Ou est-ce Bruno et Céline, les parents Bataille, qui semblent être troublés par le récit et la vie confuse de leur fille ? Impossible de répondre sans donner les clés de La fille au bracelet.

C’est la recherche de la vérité qui importe plus que la vérité elle-même. En se concentrant davantage sur le suspens et un montage « suspendu », La fille au bracelet témoigne d’une maîtrise de ce qui fait le sel des films de procès.

Procès de la jeune fille en feu

Le suspens est habilement entretenu par la multiplicité des points de vue, voire l’absence volontaire de certains points de vue. Durant le procès comme à l’extérieur, La fille au bracelet accorde une importance particulière à celui des parents. Celui de son père, ultra-présent au procès, dont le doute sur les accusations qui pèsent sur sa fille semble minime. Que de l’apparence, car c’est aussi le portrait d’un père en distance croissante avec sa fille. Une distance évidente du fait de la situation douloureuse à laquelle la famille Bataille est confrontée. Mais également un père qui ne comprend pas la vie que menait sa fille adolescente. Ses histoires avec ses copines et ses amours lui paraissent peut-être bien loin du souvenir de petite fille qu’il a de Lise. On a l’occasion de voir le point de vue de la mère de Lise. Une mère qui a décidé d’abandonner le suivi de la procédure judiciaire, trop lourde professionnellement et émotionnellement, avant une ultime envolée.

L’essentiel du film se déroulant pendant le procès de Lise Bataille, les dialogues sont principalement des plaidoiries ou de longs témoignages. Afin d’accentuer le suspens inhérent à l’attente du verdict du procès, le réalisateur Stéphane Demoustier utilise de longs plans-séquences en gros plan sur les envolées verbales. Des séquences longues, où le montage ne vient pas extirper le spectateur. Celui-ci le contraint à faire face au doute des personnages ou à leur implacable logique pour accuser Lise Bataille.

Anais Demoustier

Durant ces moments de flottements, où le temps semble suspendu, les personnages hésitent, se taisent avant de reprendre. Ils reprennent le fil de leurs réflexions alors que chaque mot compte, chaque terme mal interprété peut clore le cas de Lise, tandis que les personnages bataillent pour trouver les bons mots pour la sauver. Des instants d’autant plus douloureux que le montage ne leur vient pas en aide en passant à un autre plan, ils sont aussi prisonniers et contraint par le plan-séquence d’affronter cette situation. Un procédé intelligent qui s’ajoute au suspens primaire : qui a tué Flora ? Lise est-elle innocente ou coupable ?

Un processus houleux, marqué par l’incompréhension d’un monde d’adultes, jugeant les actes d’une adolescente et jeune femme au moment du procès. Le film parvient avec justesse à ne pas être moralisateur, en exposant les modes de vie d’adolescents pour ce qu’ils sont : des modes de vie d’une jeunesse, qui choisit de vivre avec ses outils, sa pensée propre. Il se joue un double procès. Celui d’une jeune fille accusée d’avoir assassiné sa meilleure amie d’abord. Puis, le procès mené par les juges, jurés, avocats et adultes présent dans l’assistance d’une jeune femme dont ils ne comprennent pas les mœurs et les condamnent, par réflexe. Un double procès qui à sa manière, rend le suspens de La Fille au bracelet encore plus pesant. Pour quel fait Lise Bataille sera réellement jugée ?

À terme, le verdict sera rendu, implacable. Ultime malice, alors que le film comme le procès parait fini, La Fille au bracelet sème le trouble une dernière fois, au cours d’une énigmatique toute dernière scène.

Bande-annonce

12 février 2020 – De Stéphane Demoustier, avec Melissa Guers, Roschdy Zem, Anaïs Demoustier




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