Alleluia

ALLELUIA

8
Dérangé

Lorsque Gloria accepte de rencontrer Michel, contacté par petite annonce, rien ne laisse présager la passion destructrice et meurtrière qui naîtra de leur amour fou…

Amour sauvage.

Après les égarements de Vinyan et surtout de Colt 45, sorti dans l’indifférence totale l’été dernier, Fabrice du Welz retourne à ce qu’il sait faire de mieux : un cinéma sale et dérangeant, jouissif à souhait. L’histoire est librement inspirée d’un fait divers qui a marqué les Etats-Unis dans les années 50. A l’issue de la projection, les comparaisons avec d’autres réalisations peuvent être nombreuses : Bonnie and Clyde, La Balade Sauvage et Les Tueurs de la Lune de Miel (explorant précisément le fait divers en question). Mais c’est avant tout une singularité et une folie assumée qui donne toute l’épaisseur d’Alleluia.

Le scénario malmène sans cesse le spectateur en brouillant les pistes et ne laissant aucune seconde de répit. Gloria, veuve et mère célibataire s’éprend de Michel, un homme qui épouse des veuves fortunées pour mieux les ruiner. Il est dès le départ étonnant de suivre le parcours atypique d’une mante religieuse au masculin qui, malgré son amour pour Gloria, ne peut aller contre sa nature profonde. La soumise Gloria va se muer rapidement en manipulatrice psychotique dotée d’une jalousie meurtrière au gré des nouvelles rencontres de son amant.

Le film est construit sous forme de chapitres permettant de s’enfoncer progressivement dans l’horreur et l’immoralité des personnages. D’un côté un narcissique, de l’autre une mère de famille banale qui se découvre une passion pour le sang. La mise en scène est remarquable. Le tournage en pellicule et le travail avec le chef opérateur Manuel Dacosse donnent un grain poussiéreux à l’image, traduisant parfaitement la radicalité du duo et une Belgique inquiétante. Ce même pays, déjà totalement désincarné dans son premier long-métrage Calvaire. L’asphyxie de certains plans, où les gris et les noirs sont totalement saturés, laisse place à des moments de grâce (une danse dans les flammes, une scène chantée totalement barrée, un épilogue mystérieux). C’est finalement ce qui traduit le mieux ce film de genre : un aller-retour permanent entre l’inquiétant, le gore et le second degré.

Lola Duenas est incroyable dans ce rôle obsessionnel tandis que Laurent Lucas est d’une justesse absolue, en passif agressif. C’est à se demander pourquoi le cinéma français ne fait pas plus souvent appel à ces talents. Du côté des seconds rôles, la vraie bonne surprise vient d’Helena Noguerra à qui l’on s’attache très vite grâce à sa personnalité résolument normale au milieu de ce chaos.

Les parti-pris affirmés et assumés de Fabrice Du Welz sont une vraie leçon d’un cinéma libre et ne laisseront pas indifférent : les uns crieront au génie, les autres s’étrangleront d’un scénario trop irrévérencieux et immoral. Rangeons-nous définitivement dans la première catégorie.

La fiche

thb_Alleluia

ALLELUIA
Réalisé par Fabrice Du Welz
Avec Laurent Lucas, Lola Dueñas, Stéphane Bissot…
France, Belgique – Drame
Sortie en salles : 26 Novembre 2014
Durée : 90 min 




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