LA SYMPHONIE DES ARBRES
Critique du film
Quel sujet magnifique que celui de la quête de perfection d’un luthier allemand installé dans la ville natale d’Antonio Stradivari. L’alliance du végétal et de la main de l’homme, pour créer un chef d’œuvre et tutoyer la légende. Hans Lukas Hansen, hélas, à force de surdramatiser chaque situation, dénature son beau sujet et finit par fausser toute émotion.
Parmi les objets les plus chers au monde figurent les violons de maîtres. Il y a la façon mais aussi l’essence. Le mystère des Stradivarius et des Guarneri est loin d’être percé à jour, mais Gaspar Borchardt est convaincu qu’il existe quelque part un érable ondé (ou moiré) qui lui donnera la matière première de son chef d’œuvre. D’un récit de chasse au trésor dans les forêts de Bosnie, le film bascule vers le film d’aventure en confrontant le rêve de Gaspar à de multiples dangers.
Aucune scène ne sonnant vraie, on en vient à se demander combien l’écriture du film a pu déformer le récit initial. En exagérant à peine, le luthier semble plonger en Bosnie dans une émission de téléréalité qui se situerait entre Rendez-vous en terre inconnue et Vis ma vie de négociant en bois. La découverte d’un premier érable susceptible de répondre aux attentes de Gaspar constitue un premier pic dramatique mais l’arbre se révèle trop jeune. Après moult péripéties, un second érable redonne de l’adrénaline à une dramaturgie décidément exigeante. Gaspar examine l’arbre, sincèrement ému. La tension est à son comble, que va t-il décider ? Las, il n’a pas le cœur de sacrifier un arbre si majestueux. La fin ne justifie pas les moyens et le beau rêve s’évanouit.
Gaspar annonce la nouvelle à Janine Jansen, parmi les meilleurs solistes au monde, entre les mains de laquelle il fantasmait son prodige. Le temps de digérer la déception et de laisser passer une ultime ellipse, le déminage de la forêt Bosniaque ouvre une nouvelle fenêtre d’espoir. Gaspar tient son graal, une souche abandonnée dont il va pouvoir tirer la quintessence pour remettre à Janine Jansen le bijou qu’elle n’attend plus.
Obsédé par sa dramaturgie, La Symphonie des arbres, par son emphase, annihile le potentiel d’imaginaire que contenait cette histoire au croisement de l’artisanat, de l’art et de l’utopie. De chaque image transpire un sentiment d’insincérité, en absolu contresens avec son sujet. Hansen transforme le miel en sucre, comme si Borchardt avait tiré de son noble érable, un vulgaire crin-crin.
Bande-annonce
15 décembre 2021 – De Hans Lukas Hansen
