high fidelity 2

HIGH FIDELITY

Rob Gordon tient à Chicago une boutique de disques fréquentée par des amateurs de vinyles, d’albums rares et ésotériques des années soixante et soixante-dix. Sa vie entière est placée sous le signe de la pop. C’est en elle qu’il puise le courage d’affronter le quotidien, c’est elle qui l’accompagne depuis toujours dans ses tribulations sentimentales et donne un sens à son existence. Après avoir enduré moult ruptures, Rob est une fois de plus plaqué. Il s’efforce de comprendre les raisons de ce nouvel échec. Il décide de relancer ses ex pour trouver la clé de l’énigme.

Critique du film

La filmographie de John Cusack révèle toute sa passion pour la musique, que ce soit en incarnant le génie Brian Wilson dans Love & Mercy, les bras chargé d’un énorme boombox dans Un monde pour nous (1989), ou dans le désormais culte High Fidelity de Stephen Frears (2000). Les liens entre son personnage de Lloyd Dobler dans le film de Cameron Crowe, et le Rob Gordon adapté du roman de Nick Hornby, sont assez évidents. Cusack fut une des figures des teen movies des années 1980, dans des personnages introvertis, ni cool ni vraiment geek. Le point commun majeur entre ces deux moments de la carrière de l’acteur est le coté très masculin qui s’échappe de ces comédies générationnelles. Les questionnements amoureux et l’insatisfaction du narrateur sont ainsi des éléments charnières de ces récits où il habite chaque scène, colonne vertébrale sympathique mais également problématique à bien des égards.

Cusack & friends

De la masculinité toxique dans les films générationnels

Rob est dans la petite trentaine, patron d’une boutique de disques « à l’ancienne », avant que l’attrait pour les vinyles ne reviennent relancer ce marché mourant. Il occupe cette niche que beaucoup de collectionneurs connaissent bien, quelque soit le support adoré. Ces univers obsessionnels sont majoritairement masculins, et décris par le biais de ce regard très particulier. L’inventaire dans lequel Rob se lance, après s’être fait quitté par sa petite amie Laura, et en cela révélatrice de l’absence de remise en question du personnage principal. Il va rechercher ses exs les plus « mémorables », celles appartenant à l’un de ses fameux top 5, en quête de réponses sur les raisons de ses rejets successifs avec les femmes de sa vie. Après plusieurs rendez-vous vient la révélation : il est la cause principale de ce qu’il lui arrive. C’est là où se situe le paradoxe du film et du genre qu’il sous-tend : si on assiste à une forme de critique de la masculinité toxique, notamment lors de cette très belle scène où Rob avoue s’être très mal comporté avec Laura en plusieurs occasions, il reste d’une certaine manière plus valorisé et « héroïsé » que sa partenaire féminine. Cet aspect est accentué par la relation même qu’il noue avec le spectateur. Lui parlant dans les yeux face caméra, il en fait un confident, un proche, ainsi qu’un témoin de ses déboires à répétition.

Une comédie réussie avant tout

S’il demeure une comédie, High Fidelity brille notamment par son analyse du caractère néfaste de la jalousie comme point central du couple traditionnel. La névrose de Rob semble concentrée autour des relations sexuelles supposées entre Laura et son nouvel amant Ian, désopilant Tim Robbins. D’une certaine manière, la bouffonnerie des scènes représentant les crises de Rob permettent de relativiser le traitement du personnage. Il admet de lui même sa médiocrité et ses faiblesses, et de fait sa fragilité. Laura est l’autre point essentiel pour ne pas totalement rejeter le film vingt ans après sa sortie. Loin de ces histoires de coucheries qui obsèdent son fiancé, elle rappelle que c’est avant tout le fait de ne pas réussir à grandir et évoluer qui font stagner Rob et l’empêche d’être aimé. Les trouvailles de mise en scène de Frears, avec notamment les deux passages où apparaissent Bruce Springsteen, mais aussi un casting où l’on découvrait Jack Black, plus truculent et fou que jamais, participent à faire traverser les années à High Fidelity. Ces éléments lui permette de ne pas sombrer devant tout ce qui pose problème dans le film.

Vingt ans après

Zoé Kravitz

Après avoir regardé le film pendant des années on vient presque à se demander quel film aurait pu réaliser Stephen Frears s’il avait choisi comme personnage principal Laura, ou pour rester sur un angle plus musical et artistique, celui de Lisa Bonnet. Chanteuse et songwriter, Marie de Salle ne reste qu’un objet de fantasme et de vengeance personnelle pour Rob. Dans la dimension des films rêvés qui ne seront pas, une Haute fidélité autour de Marie a de quoi interpeller. Et si au lieu d’être l’objet de ces messieurs elle avait pu nous raconter ses histoires et aventures, notamment celle de ce vendeur de disques et de sa fragilité au pays des garçons rois. Il est amusant de constater que ce vœu a depuis été exaucé, la fille de Lisa Bonnet, Zoë Kravitz, devenant le nouveau visage de cette histoire dans une série distribuée par Hulu.


Disponible sur CanalVOD


Chaque jour, dans les Séances Buissonnières, un membre de l’équipe vous recommande un film disponible actuellement en VOD / SVOD




%d blogueurs aiment cette page :