LE ROI SOLEIL
Un homme est mort au Roi Soleil, un bar-pmu à Versailles. Il laisse un ticket de loto gagnant de plusieurs millions d’euros. En s’arrangeant un peu avec la réalité et leur conscience, les témoins du drame pourraient repartir avec l’argent… Et si la vérité n’était qu’un scénario bien ficelé ?
Critique du film
Avec Le Roi Soleil, Vincent Maël Cardona poursuit son exploration des tensions sociales et des récits collectifs, amorcée avec Les Magnétiques, son premier long-métrage couronné du César du meilleur premier film en 2022. Présenté en Séance de Minuit au Festival de Cannes 2025, ce nouveau film s’inscrit dans cette lignée tout en proposant quelque chose de tout à fait différent, de l’ordre de l’exercice de style.
Si le prologue se déroule dans le Château de Versailles, Le Roi Soleil n’a rien d’un film historique. Au contraire, très contemporain, son récit se tiendra presque intégralement dans un bar-PMU de Versailles. Alors qu’un habitué meurt soudainement, laissant derrière lui un ticket de loto gagnant de plusieurs centaines de millions d’euros, les autres clients et le personnel, témoins de la scène, confronté·e·s à cette opportunité inattendue, envisagent de s’approprier le ticket en élaborant une version alternative des événements. Le film devient alors un huis clos où la frontière entre réalité et fiction se brouille, chaque personnage proposant sa propre hypothèse pour justifier la possession du ticket.
Reprenant le modèle narratif de Rashōmon, Vincent Maël Cardona utilise une mise en scène inventive pour impliquer le spectateur dans ce jeu de pistes. Les dialogues, souvent caustiques, révèlent les tensions entre les personnages et soulignent les différences culturelles et sociales qui les opposent. La caméra explore la géographie du lieu, ses moindres recoins, jusqu’aux cuisines, aux sous-sols, à l’arrière-cour en passant par la salle de karaoké. Jouant sur la tension de ses personnages et les conflits, il maintient une atmosphère de suspicion et de convoitise qui est pour beaucoup dans la tenue du film – même si on pourra ça et là émettre quelques réserves.
Outre sa mise en scène fluide, les performances des acteurs contribuent grandement à l’efficacité du film. Pio Marmaï incarne Livio, un flic vulnérable, tiraillé entre moralité et désir. Lucie Zhang, la révélation des Olympiades d’Audiard, apporte une intensité discrète à son personnage qui semble la seule à réellement maitriser ses émotions et conserver un peu de lucidité, tandis que Sofiane Zermani, Xianzeng Pan et Panayotis Pascot complètent efficacement cette belle distribution éclectique.
Plus divertissement que véritable réflexion philosophique pointue, Le Roi Soleil questionne la nature humaine face à la tentation et aux choix moraux en ménageant relativement bien son suspense, son équilibre entre humour noir et critique sociale.
Bande-annonce
