LA TAVERNE DE L’IRLANDAIS
Guns et Boats, deux anciens combattants du Pacifique se sont installés en Polynésie. La fille d’un troisième camarade, élevée dans la société puritaine de Boston, vient à la recherche de son père. Alors qu’ils se retrouvent, comme chaque année, dans l’île de Haleakaloa, où habite Guns, pour une rituelle bagarre, cet ancien marin irlandais va donner à la jeune héritière prude et pleine de préjugés une leçon de charité et de joie de vivre.
Critique du film
Dernière collaboration entre John Ford et John Wayne, La Taverne de l’irlandais a été réalisée en 1963 à Hawaï, même si le récit est censé se dérouler en Polynésie française. Considéré par certains comme un film mineur de John Ford, cet ultime opus réunissant deux des noms les plus emblématiques de l’âge d’or d’Hollywood n’en demeure pas moins une œuvre particulièrement attachante, riche par les thèmes qu’elle aborde. La Taverne de l’irlandais est parfois même perçue comme une forme de film testamentaire de la part de Ford — bien qu’il réalisera encore deux films importants, Les Cheyennes et Frontière chinoise —, reprenant nombre de motifs déjà présents dans sa filmographie : le racisme, l’amitié, le sacrifice.
Si le résultat peut aujourd’hui paraître daté, notamment en raison du machisme du personnage principal incarné par John Wayne, ou souffrir d’un scénario parfois ténu, le film reste un divertissement très agréable, traversé par de nombreux traits d’humour et porté par une galerie de personnages hauts en couleur. Il constitue, à ce titre, un film de Noël tout à fait honorable au regard de ceux qui appartiennent à cette catégorie.
Marqué par une grande joie de vivre, qui n’exclut ni la gravité ni la mélancolie, La Taverne de l’irlandais raconte l’histoire d’une jeune femme issue de la très corsetée et puritaine haute société de Boston qui débarque sur une île de Polynésie afin d’y retrouver son père. Sa venue n’est cependant pas motivée par des sentiments purement familiaux : Amelia Dedham — jouée par Elizabeth Allen, actrice principalement issue du théâtre et de la télévision, dont la filmographie reste relativement restreinte — cherche à prouver que son père ne mène pas une vie conforme aux bonnes mœurs, afin de le spolier de certains droits liés à une succession.

Resté sur l’île après la guerre, cet homme — interprété par Jack Warden — exerce la médecine et dirige un dispensaire auquel il consacre toute son énergie. Père de trois enfants métis nés de son union avec une native de l’île, décédée lors du dernier accouchement, il ne correspond évidemment pas aux attentes de sa fille et de son milieu affairiste. Pour le tirer d’affaires, et alors qu’il s’est absenté pour une tournée auprès de ses patients, son ami Donovan (John Wayne), avec lequel il a fait la guerre, fait passer les trois enfants pour les siens. Cet homme rude, bourru mais généreux et bienveillant voit également arriver Thomas Aloysius Gilhooley (Lee Marvin), né le même jour que lui. Les deux hommes ont pour tradition de se livrer, chaque année à leur anniversaire, à une bagarre homérique. Et cette date coïncide précisément avec l’approche de Noël.
Bénéficiant d’une distribution d’une grande homogénéité — aux artistes déjà cités s’ajoutent Marcel Dalio, César Romero, Dorothy Lamour et Mike Mazurki, sans oublier les trois enfants, d’un naturel et d’un charme confondants —, de somptueux décors naturels et de scènes mémorables (les affrontements dans la taverne, le ski nautique, la magnifique messe de Noël), le film émeut à plus d’un moment et se révèle plus profond qu’il n’y paraît.






