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LA SYNDICALISTE

Un matin, Maureen Kearney est violemment agressée chez Elle. Elle travaillait sur un dossier sensible dans le secteur nucléaire français et subissait de violentes pressions politiques. Les enquêteurs ne retrouvent aucune trace des agresseurs… est-elle victime ou coupable de dénonciation mensongère ?

Critique du film

Captivé par le livre de la journaliste Caroline Michel-Aguirre, La syndicaliste, Jean-Paul Salomé a poursuivi son envie de raconter le destin d’une lanceuse d’alerte, comme l’avait très habilement fait Emmanuelle Bercot avec La fille de Brest, porté par la talentueuse Sidse Babett Knudsen. Comme Irène Frachon et le scandale sanitaire du Mediator, la déléguée syndicale d’Areva Maureen Kearney a subi d’énormes pressions et menaces jusqu’à une innommable agression visant à la réduire au silence.

Dans un monde machiste où les femmes au pouvoir sont rares et les postures (ainsi que les répliques) patriarcales demeurent répandues, Maureen Kearney comptait sur une alliée de poids avec la présidente du groupe AREVA – incarnée à l’écran par Marina Foïs – mais son départ précipité par Nicolas Sarkozy va redistribuer les cartes. Tandis que la pérennité du groupe français est menacée par un projet d’alliance avec la Chine, mettant en péril aussi bien le savoir-faire hexagonal que l’avenir des salariés du groupe, la syndicaliste est déterminée à empêcher ce qu’elle considère comme une braderie de l’industrie nucléaire français cautionnée par les pouvoirs en place. Une trahison dont on mesure les conséquences aujourd’hui avec le démantèlement du groupe et la perte de notre indépendance énergétique.

Victime et coupable idéale

D’abord intimidée et ramenée à sa condition de « femme » et de « prof d’anglais » par son nouveau patron agressif et sexiste, la syndicaliste ne baisse pas les bras. Au coeur de ces lieux de pouvoir et de décision que filme Salomé en décors réels, La Syndicaliste suit cette outsider dans sa croisade et ses affrontements avec les gros bras de l’industrie et de la politique qui voient d’un mauvais oeil son engagement à faire éclater au grand jour les vérités autour de cet accord imminent avec la Chine. Au point d’employer les grands moyens ? Lorsque survient son effroyable agression à son domicile, le récit change de registre pour raconter le travail de discréditation et les manquements juridiques (volontaires ?) d’une affaire dont elle ressort victime et accusée.

Trois ans après l’embarrassant La Daronne, Jean-Paul Salomé retrouve Isabelle Huppert. Si La Syndicaliste se montre intéressant dans ce qu’il illustre des manœuvres politiques et industrielles, du sexisme dans les plus hauts lieux de pouvoir et de la prise en charge et de la considération des victimes de violences sexuelles, on regrette de retrouver dans cette nouvelle collaboration certains maux déjà présents dans la précédente. Avec ses dialogues artificiels et autres punchlines impromptues dont la recherche du bon mot dénote avec le reste du propos, La syndicaliste se tire une balle dans le pied en voulant trop souvent désamorcer l’ambiance pesante de ce qui aurait pu et du n’être qu’un thriller paranoïaque décortiquant les rouages des magouilles industrielles et dénonçant la culture du viol. Maladroit, le film oublie de laisser la place nécessaire à l’épreuve psychologique de Kearney. Enfin, on regrette que le long métrage se retrouve vampirisé par sa comédienne principale qui occupe tout l’espace dans son désormais traditionnel surjeu permanent qui ne rend pas honneur à la détermination et à la résilience de son héroïne bafouée, dont on attend toujours que l’honneur soit définitivement lavé. Et que justice soit faite.

Bande-annonce

1er mars 2023 – De Jean-Paul Salomé, avec Isabelle HuppertYvan AttalMarina Foïs




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