WE NEED TO TALK ABOUT KEVIN
Eva a mis sa vie professionnelle et ses ambitions personnelles entre parenthèses pour donner naissance à Kevin. La communication entre mère et fils s’avère d’emblée très compliquée. A l’aube de ses 16 ans, il commet l’irréparable. Eva s’interroge alors sur sa responsabilité. En se remémorant les étapes de sa vie avant et avec Kevin, elle tente de comprendre ce qu’elle aurait pu ou peut-être dû faire.
Critique du film
Au centre, Tilda Swinton impressionne. Son visage tendu, presque pétrifié, condense toute la tragédie d’une femme qui n’a jamais réussi à aimer son fils, et qui, après le massacre, est condamnée à porter ce poids comme une croix. Swinton incarne à elle seule la force et la fragilité du film : un mélange d’endurance, de sidération et de désespoir muet qui imprime durablement la rétine. Elle est le cœur battant d’un récit qui ne cherche jamais à lui offrir de répit, et dont la violence semble se retourner autant contre elle que contre Kevin.
Mais cette intensité est aussi ce qui alimente les reproches adressés au film. Ramsay, dans son désir de tout traduire par l’image, surcharge parfois son récit de symboles (le rouge omniprésent, les aliments écrasés, les murs tachés) au point d’en affaiblir la subtilité. Surtout, en décrivant Kevin comme une figure démoniaque dès son plus jeune âge — bébé hurlant sans cesse, enfant manipulateur, adolescent sadique — le film laisse peu de place à la complexité psychologique. Kevin devient une incarnation du mal pur, et le spectateur est sommé d’y croire sans chercher plus loin. Cette réduction manichéenne interroge : que reste-t-il alors de la réflexion sur la maternité, la construction d’un individu, ou même sur le contexte social d’un tel drame ?
Car c’est une autre limite du film : en se concentrant exclusivement sur le face-à-face mère/fils, Ramsay évacue toute lecture politique ou sociologique d’un massacre scolaire dans l’Amérique contemporaine. La question des armes à feu, des pressions sociales, des failles institutionnelles n’existe pas ici. L’horreur est ramenée à une tragédie intime, quasi métaphysique, où une mère est condamnée pour n’avoir pas su aimer son enfant. Ce choix radical donne au film une puissance dramatique indéniable, mais peut aussi être lu comme une vision culpabilisante, voire misogyne, de la maternité.
We Need to Talk About Kevin est donc un film profondément ambivalent : fascinant par la maîtrise formelle de Lynne Ramsay et par la performance hallucinée de Tilda Swinton, mais limité par ses outrances symboliques et son approche manichéenne. Il reste comme une œuvre radicale et inconfortable, dont l’impact sensoriel interroge autant par son intensité que par ses angles morts — un film qui nous saisit autant qu’il nous laisse troublés, voire sceptiques, face à son regard glaçant sur la maternité et la figure du mal.
| LYNNE RAMSAY | UK/USA | 110 MIN | 28 SEPTEMBRE 2011 | TILDA SWINTON, JOHN C. REILLY |
Dernière mise à jour 7 septembre 2025 par Sam Nøllithørpe ⚲ TP







On peut dire que le film divise ! Soit c’est grosses louanges, soit c’est dégommage en règle ! Bref pas du tout d’accord avec toi (voir ma critique). Très loin d’être « simpliste » et surtout pas « inutilement alambiqué » ! La (fausse) déstructuration du film a un réel sens, on est dans la tête de cette femme perdue, désarmée et qui cherche des réponses dans ses souvenirs, dont on ne sait pas vraiment s’il sont réels ou transformés. On est au moins d’accord sur Tilda, même si c’est encore un RDV manqué pour toi avec elle !
On dirait une critique de Drive (mouhahaha). Effectivement, on est tous deux respectivement passés à côté des deux films.
Bonjour, comme squizz, j’ai aimé ce film (sauf la séquence d’ouverture en rouge, je me suis dit « aïe, aïe, aïe »). Le film vaut pour Tilda Swinton dans l’un de ses meilleurs rôles. Mais il est certain que ce film peut perturber. L’attitude de la mère envers ce garçon est souvent incompréhensible. Pourquoi, ne l’emmène-t-elle pas voir un psy, là est la question. La détresse de cette femme est bouleversante. Bonne après-midi.
Grrr… Mais Squizzz a raison, on aime ou on aime pas ce film, et je ne crois pas avoir vu de critiques mitigées. C’est tout l’un ou tout l’autre. Ce qui est positif quand même, c’est que tu as réussi à apprécier Tilda Swinton malgré le film, et ça c’est énorme !
Moi j’ai eu une impression mitigée. Très bien réalisé, je l’ai trouvé dur. La méchanceté de Kevin est presque surréaliste. Bien à toi. Marcozeblog.
Tout à fait d’accord avec toi : un film froid, sans intérêt et prétentieux. Dommage pour cette immense actrice qu’est Tilda Swinton.
Je vais passer mon tour car là encore je préfère lire le roman d’abord, et du coup je suis contente de voir que ce n’est pas si bien qu’annoncé… Ce qui est bien avec ton blog, c’est qu’au moins tu ne mâches pas tes mots! ;o)