CARTEL
La descente aux enfers d’un avocat pénal, attiré par l’excitation, le danger et l’argent facile du trafic de drogues à la frontière américano-mexicaine. Il découvre qu’une décision prise trop vite peut le faire plonger dans une spirale infernale, aux conséquences fatales.
Critique du film
Cartel – ou The Counselor dans sa version originale – reste l’un des films les plus mésestimés de Ridley Scott. À sa sortie, beaucoup attendaient un thriller classique, calibré pour le succès, fort de son casting de rêve (Michael Fassbender, Javier Bardem, Penélope Cruz, Cameron Diaz, Brad Pitt) et de la première incursion scénaristique de Cormac McCarthy à Hollywood. Ce que le public a découvert fut tout autre : une œuvre hermétique, délibérément aride, où le style prime sur la résolution, et où la noirceur morale efface toute illusion de rédemption.
Le film s’ouvre sur une proposition fatale : un avocat, jamais nommé, choisit d’investir dans un trafic de drogue transfrontalier. Une décision banale, presque anodine, qui devient le point de départ d’une chute sans retour. McCarthy tisse ici un conte moral et nihiliste, où la parole, dense et philosophique, remplace l’action spectaculaire. L’intrigue, volontairement nébuleuse, progresse par ellipses et dialogues existentiels, rappelant le dépouillement tragique de No Country for Old Men. Scott, fidèle à son sens du cadre et du tempo, filme ce destin comme une descente vers l’abîme, chaque plan baigné d’une beauté glaciale et d’un sentiment d’inéluctabilité.
Là où d’autres thrillers s’accrochent à la logique du suspense, Cartel préfère le vertige métaphysique. Les conversations entre le Conseiller et ses partenaires (un Bardem extravagant, un Pitt désabusé, une Diaz vénéneuse) sont autant de fables sur la vanité du libre arbitre. Les protagonistes savent qu’ils jouent une partie perdue d’avance, mais continuent à miser, mus par la cupidité et la croyance absurde en leur propre exception. McCarthy, fidèle à son pessimisme biblique, observe des hommes se débattant dans un monde où la morale est dissoute dans la poussière du désert et le sang des innocents.

Visuellement, Scott signe un film d’une élégance clinique, où les reflets chromés, la blancheur brûlante du Mexique et les intérieurs de luxe composent un décor où la corruption devient un art de vivre. Dans ce théâtre d’ombres, Fassbender incarne un héros tragique – ni criminel, ni innocent – dont la chute, lente et irréversible, s’impose comme une parabole sur la responsabilité et le prix du désir.
Si la construction labyrinthique et le ton désincarné ont pu dérouter, Cartel s’impose aujourd’hui comme une œuvre rare : un polar moral sans morale, à la croisée de la fable antique et du western moderne. En refusant toute complaisance, Scott et McCarthy livrent un film d’une noirceur radicale, d’une beauté vénéneuse – un échec commercial, peut-être, mais un sommet de cinéma désespéré.
Rembobinez, s’il-vous plait







J’y vais mardi prochain, je te dirai dans quel camps de je serai ^^
Premier avis positif que je lis sur ce film !
Ce qui me rassure car si cela fait bien longtemps que j’ai perdu foi en Ridley Scott (je dirais depuis « Hannibal »), je suis un fanatique absolu de Cormac McCarthy. Et puis le casting envoie grave du rêve !
Je peux maintenant l’affirmer… je suis dans l’autre camp.
Portant Ridley Scott fait partie de mes réalisateurs favoris, mais là, je n’y retrouve rien. C’est chiant, mou, ce n’est qu’une succession de dialogues dont le côté sexuel de la chasse n’est que prétexte à en parler ouvertement à chaque scène. L’action est peu présente, et on en vient à n’en avoir rien à faire de ce qui arrive aux personnages au fur et à mesure que le film avance.
Ce n’est pas avec Cartel que je vais me remettre de Prometheus
[…] l’idiotie scénaristique, gâchant à mi-parcours ce qui aurait pu être un grand film. Seul Cartel avait su unir un matériau littéraire brillant à sa patte technique et son courage […]