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CANNES 2024 | Bilan et palmarès espérés

Si l’on doit prendre un peu de hauteur sur la compétition officielle de la 77ème édition du festival de Cannes, on remarque que si les auteurs étaient au rendez-vous, peu de grands films et de grandes émotions demeurent palpables au moment de la cérémonie de clôture. La preuve la plus patente à ce constat est la présence, le dernier jour, d’un grand film, Les graines du figuier sauvage de Mohammad Rasoulof, et l’impression de vide qui se dégage autour de lui. L’étalonnage immédiat qui s’opère est celui de propositions intéressantes, celles d’auteurs aimés et toujours aussi vifs, mais très peu de coups de cœur, et beaucoup de déceptions.

Cette édition aura été, une fois de plus pourrait on dire, celle des monstres et des fantômes, et au milieu de cette troupe hétéroclite, chacun fera ses choix. Le nôtre est plus celui du retour flamboyant d’un des grands auteurs du siècle précédent, Francis Ford Coppola, prônant à 86 ans un cinéma de recherche, toujours sur la brèche, tentant tout et plus encore dans une prise de risque tout simplement phénoménale. Pur geste de mise en scène, outrancier en diable, Megalopolis ne convaincra pas tout le monde, mais est-il conçu pour cela ? Les projections du film furent des événements, vrombissants, rieurs, vivants, démontrant tout ce que ce merveilleux auteur a encore à apporter au cinéma contemporain. 

Dans le même ordre d’idée, l’autre monstre fut The Substance de Coralie Fargeat, qui, à l’instar de Julia Ducournau avec Titane, a réussi son pari de remuer un public de festival trop habitué à un cinéma d’auteur policé. Avec son deuxième film, elle a dynamisé une compétition qui s’endormait et peinait à créer de l’émotion. Si nous n’avons pas été conquis par le geste de la cinéaste, recyclant des références trop appuyées, il faut lui reconnaître ses réussites et son audace.

Rasoulof Cannes

De belles propositions

D’autres belles propositions restent également à l’esprit, comme celles de Jia Zhang-ke revisitant sa filmographie avec Caught by the tides, le biopic iconoclaste et punk de Kirill Serebrennikov, Limonov la ballade, ainsi que les magnifiques films de Sean Baker, Anora, et All we imagine as light, de Payal Kapadia. Ces deux derniers films sont de très belles surprises pour des raisons différentes. Le premier est la confirmation du talent de Sean Baker, déjà entrevu dans son très beau Florida project, mais qui nous avait profondément déçu avec Red rocket et son regard douteux et rance sur une star du porno. Avec ce nouveau film, il délivre un récit sensible sur la fragilité d’une danseuse exotique, avec humour et délicatesse, craquelant un masque de force où transparaît la fragilité dans un final exceptionnel. Payal Kapadia était une promesse dont nous attendions avec impatience la confirmation après son premier long-métrage Toute une nuit sans savoir. Avec beaucoup de pudeur et de sensibilité son All we image as light démontre la vitalité du cinéma indépendant indien, dans une forme épurée qui aura conquis et convaincu autour d’une amitié sororale de toute beauté.

La belle histoire pour Rasoulof ?

Enfin il y eut Mohammad Rasoulof. L’histoire était déjà belle avant même que le film soit projeté. Le réalisateur d’Un homme intègre était attendu après sa fuite d’Iran, clandestine, pour échapper à la prison et à un système despotique qui assassine et ligote les voix du peuple iranien. Mais au-delà de cela, c’est un grand film qui nous a été présenté le dernier jour de la compétition officielle. Une œuvre forte qui fait date et prouve s’il était nécessaire que le cinéma pouvait être un outil, un témoin de la lutte contre la tyrannie. En 2h48, Rasoulof réussit tout : sa mise en scène, son histoire, sa direction d’acteurs. Il ménage de la surprise, du souffle, se permet de déconstruire son scénario, prenant un contre-pied inattendu dans son dernier tiers, mutant son film en thriller, pour finir sur une note de rage au symbole tout simplement sublime. C’est le souffle coupé et les joues pleines de larmes que nous finissons ce festival de Cannes, et c’est à cet exceptionnel réalisateur iranien que nous le devons. 

Florent Boutet



Pour finir, comme chaque année, nous vous livrons nos palmarès personnels, qui sont davantage l’expression de nos coups de coeur que des pronostics réalistes, les jurys prenant parfois le contre-pied de la critique.

Florent Boutet

Palme d’Or : LES GRAINS DU FIGUIER SAUVAGE

Grand Prix : ANORA

Prix du Jury : CAUGHT BY THE TIDES

Interprétation masculine : Ben Whishaw (Limonov)

Interprétation féminine : K. Kusruti et D. Prabha (All we imagine as light)

Mise en scène : MEGALOPOLIS

Scénario : TROIS KILOMÈTRES JUSQU’À LA FIN DU MONDE

Caméra d’Or : EEPHUS

Antoine Rousseau

Palme d’Or : x

Grand Prix : EMILIA PEREZ

Prix du Jury : BIRD

Interprétation masculine : Richard Gere (Oh, Canada)

Interprétation féminine : Demi Moore (The substance)

Mise en scène : LA JEUNE FEMME À L’AIGUILLE

Scénario : TROIS KILOMÈTRES JUSQU’À LA FIN DU MONDE

Caméra d’Or : ARMAND

Thomas Périllon

Palme d’Or : ANORA

Grand Prix : LA JEUNE FEMME À L’AIGUILLE

Prix du Jury : BIRD

Interprétation masculine : Franz Rogowski (Oh, Canada)

Interprétation féminine : Karla Sofia Gascon (Emilia Perez)

Mise en scène : EMILIA PEREZ

Scénario : TROIS KILOMÈTRES JUSQU’À LA FIN DU MONDE

Caméra d’Or : ARMAND

les graines du figuier sauvage

Marie Sérale

Palme d’Or : LES GRAINS DU FIGUIER SAUVAGE

Grand Prix : BIRD

Prix du Jury : EVERYTHING WE IMAGINE AS LIGHT

Interprétation masculine : Ben Whishaw (Limonov)

Interprétation féminine : Karla Sofia Gascon (Emilia Perez)

Mise en scène : THE SUBSTANCE

Scénario : ANORA

Caméra d’Or : SEPTEMBER SAYS

 




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