UNE ANNÉE ITALIENNE
Septembre 2007, Trieste. Fred, jeune Suédoise de dix-sept ans, arrive en ville et s’inscrit en terminale au lycée technique. Seule fille dans une classe entièrement masculine, elle se retrouve au centre de l’attention d’un trio inséparable.
Critique du film
La Mostra de Venise aime mettre en lumière des cinéastes italien·ne·s qui interrogent leur société à travers des récits intimes, capables d’affiner le regard que l’on porte sur le monde. Une année italienne (Un anno di scuola) fait partie de ces œuvres qui explore cette période délicate qu’est la fin de l’adolescence, muée en quête d’identité.
Présenté en première mondiale dans la section Orizzonti à la 82ᵉ Mostra de Venise, ce second long métrage de Laura Samani se déroule à Trieste, en septembre 2007 : Fred, jeune Suédoise exubérante et courageuse, vient d’emménager avec son père, nouvellement muté dans la région. Elle entre en dernière année d’un lycée professionnel, et se retrouve rapidement la seule fille d’une classe entièrement masculine. Par son seul regard, le film capte l’énergie fragile d’une période charnière — entre désir d’intégration, expression de soi et revendication d’un espace propre.
Les enjeux sont à la fois personnels et structurels : Fred finit par se lier d’amitié avec trois garçons — Antero le réservé, Pasini le séducteur, Mitis le protecteur — et chacun l’admire en silence. Pour être acceptée, elle doit petit à petit sacrifier une part d’elle-même, cherchant une validation dans cet univers très masculin où elle subit dès les premiers jours des humiliations que l’équipe éducative minimise. Samani raconte son affirmation sans l’instrumentaliser : caméra à l’épaule, cadrages proches, temporalité respectueuse, elle choisit la suggestion plutôt que la démonstration.

Si le film épouse le point de vue de Fred avec tact — on comprend son désir, ses doutes, ses compromis —, il effleure plus qu’il ne questionne des thématiques aussi brûlantes que le consentement, le harcèlement ou le sexisme. Le spectateur voit mais le film s’arrête parfois à la lisière du propos critique. Sans tomber dans une lecture binaire, on peut regretter que Une année italienne ne dénonce pas plus frontalement la masculinité toxique, qui fait souffrir la jeune lycéenne et enferme les garçons dans des injonctions sociales. Là où des œuvres comme Les filles désir (sorti cet été après son passage cannois) faisaient de ces mécanismes un objet d’analyse explicite, Samani préfère rester dans le murmure. L’émancipation de Fred, esquissée dans les dernières scènes, paraît ainsi survolée. Ce qui commence comme une quête profonde se conclut sur une note peut-être un peu trop flottante et un épilogue simpliste.
Pourtant, la réalisatrice esquisse quelques belles scènes de rapprochement intime ou de confessions amicales et le film ne manque pas d’atouts, notamment par son naturel et son écriture visuelle qui donnent à sentir plus qu’à dire. On sort du film avec le sentiment d’avoir partagé un fragment de vie, d’avoir été invité·e à contempler, plutôt qu’à approuver ou condamner — un parti pris émouvant, mais qui laisse le spectateur sur sa faim quant à la force politique que Fred aurait pu incarner.
Mostra de Venise 2025 – La Roche-sur-Yon 2025
Dernière mise à jour 16 octobre 2025 par Sam Nøllithørpe ⚲ TP






