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LA GRAZIA

À six mois de la fin de son mandat, le Président de la République italienne est confronté à sa fin de règne inéluctable et n’a plus beaucoup de temps pour décider s’il signera ou non la loi concernant la fin de vie.

Critique du film

La Grazia, « La Grâce », pourrait être le titre de plusieurs films de Paolo Sorrentino. Son précédent, par exemple, Parthenope, pour définir la façon que son héroïne aurait de traverser le monde, ou La Grande Bellezza, pour décrire l’objet de la recherche du protagoniste. Pourtant, ici, le mot ne s’entend pas seulement en ce sens, il revêt une dimension plus politique. La grâce présidentielle est aussi celle que peut accorder le chef d’État fictif Mariano De Santis (Toni Servillo), confronté du haut de son pouvoir extrême à différents cas de personnes accusées de meurtres avec préméditation, qu’il aura la possibilité ou non de sauver.

Tout en retrouvant son acteur fétiche en premier rôle, Paolo Sorrentino renoue avec l’aspect politique de son cinéma – dans Il Divo (2008), Toni Servillo incarnait l’homme d’État italien Giulio Andreotti, et dans Silvio et les autres (2018), il était Berlusconi. La politique est abordée sous un angle essentiellement moral, le film faisant corps avec l’actualité à travers différents portraits d’accusés lors de scènes qui se déroulent en prison et s’inspirent de véritables faits divers. Ces passages s’intriguent intelligemment avec une autre question brûlante autour de la liberté individuelle, celle de l’euthanasie, le président se demandant s’il doit ou non signer une loi pour l’autoriser.

La grazia

Par toutes ces préoccupations, Paolo Sorrentino ancre son personnage dans le monde à un moment où celui-ci va s’en éloigner. Chef de la République à six mois du terme de son mandat, Mariano De Santis est absorbé par un double sentiment crépusculaire, sa retraite politique à venir et l’âge avançant. Isolé par sa position institutionnelle, dans sa grande demeure étrangement vide ou sur un toit qui surplombe Rome, le regard de Toni Servillo a rarement été aussi profondément plongé dans la mélancolie et la solitude. Mais il propage un spleen qui n’est jamais passéiste, au contraire : Paolo Sorrentino filme le déclin et le doute pour mieux les dépasser. 

Autour de cet homme qui a toujours vécu dans un costume de juriste et se considère lui-même comme un être gris, passif, un dialogue fructueux s’établit avec d’autres générations, dont celle de sa fille qui travaille à ses côtés et se plaint de ne pas assez connaitre son père. Il suffit d’une phrase juste pour éclairer tout à coup la grisaille (notamment à travers le chef de la sécurité du président, un joli personnage secondaire) et déclencher une clé pour appréhender l’avenir. Il y a quelque chose de moins resplendissant que d’habitude dans les images poétiques choisies par Paolo Sorrentino, de plus posé, presque austère, qui procure à l’arrivée un beau sentiment de sérénité.



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