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THE LAST HILLBILLY

Dans les monts des Appalaches, Kentucky de l’Est, les gens se sentent moins Américains qu’Appalachiens. Ces habitants de l’Amérique blanche rurale ont vécu le déclin économique de leur région. Aux États-Unis, on les appelle les «hillbillies» : bouseux, péquenauds des collines. The Last Hillbilly est le portrait d’une famille à travers les mots de l’un d’entre eux, témoin surprenant d’un monde en train de disparaître et dont il se fait le poète.

Critique du film

A l’origine, il y a la mort. Dès son ouverture, l’image se déploie comme une fenêtre sur un monde que l’on suppose connaître par coeur, mais dont on ne sait finalement peu. Les Etats-Unis à des années lumières des fantasmes que l’on y projette : porté par l’accent si particulier de Brian, The Last Hillbilly raconte une Amérique née dans le sang, bâtie sur des massacres et qui porte encore en elle les fantômes de son passé. 

Diane-Sara Bouzgarrou & Thomas Jenkoe apportent une nouvelle dimension au hillbilly, ces “bouseux” qui peuplent les Appalaches, au cœur du Kentucky. Le film pose un regard nouveau qui délivre ce “personnage”, transformé en véritable monstre par le cinéma américain, et lui rend toute son humanité. En se réappropriant l’insulte, Brian conte avec mélancolie le récit de ses ancêtres et de ses successeurs, et raconte les Etats-Unis du point de vue des oublié.e.s.

This is America

The Last Hillbilly refuse de capturer le grandiose des paysages des Appalaches, et opte pour un format carré plus intimiste. La caméra frôle les corps, et emprisonne ses personnages dans l’immensité de la nature, mais aussi de l’existence. Le récit de Brian, porté par des images quasi-apocalyptiques hantées par la mort et l’ennui, prend une dimension cosmique. Lorsque la famille crie aux coyotes dans les montagnes, l’écho qui s’en suit renvoie directement à leur existence, plus vaste, au cœur des Etats-Unis. 

Ce cri dans le vide, c’est aussi celui d’une population abandonnée par son propre pays qui se contemple au crépuscule de son existence. Méprisés à cause de nombreux stéréotypes – que le film conforte tout de même sans aucune forme d’irrespect -, les hillbillies subissent de plein fouet une crise économique, liée à la fermeture des usines de charbon, malgré les promesses de leur président. L’Amérique de Trump que l’on aime tant fantasmer se révèle ici sous son vrai jour, morcelée et malade, loin de la flamboyance qu’elle espérait tant faire renaître. Au contraire, elle symbolise l’extinction de tout un passé, à l’image des drapeaux confédérés qui surplombent un cimetière, associé à jamais à l’idée de mort. 

Diane-Sara Bouzgarrou & Thomas Jenkoe livrent dans The Last Hillbilly un documentaire d’une rare sensibilité, donnant corps et voix à une population oubliée. Le film s’immisce au coeur de l’intime avec une poésie mélancolique, et capture le témoignage désespéré d’une Amérique au bord du gouffre. 


Présenté en hors compétition au Festival du cinéma américain de Deauville 2020 


Bande-annonce




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