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MERCREDI

Suite à un acte criminel, la fille Addams est transférée par ses parents dans un établissement scolaire un peu spécial, la Nevermore Academy. Là-bas, elle n’est pas à l’abri de rencontres perturbantes et de mémoires familiales qui vont ressurgir pour l’embarquer dans une enquête pour le moins mystérieuse.

Critique de la série

Dès son arrivée dans la réalisation, Tim Burton a forgé un univers cyclopéen, et il est émouvant de voir l’inspiration que son œuvre a distillé partout, dans toute forme d’art, par cette célébration symbolique et grandiose du Bizarre. Lorsqu’on évoque Tim Burton, on perçoit un artiste à part entière, amoureux du fait-main, imaginatif critique et génial.

Le style du célèbre dessinateur de presse Charles Addams, créateur des personnages de la famille Addams fin des années 30, s’associe parfaitement avec celui de Burton, car ils ont un point commun qui n’est pas des moindres : l’humour. Mais encore, l’humour dans la noirceur. L’ironie. Le macabre n’a jamais été, ni pour l’un, ni pour l’autre, source d’inquiétude ou de désespoir. Il est vrai que l’œuvre du réalisateur américain baigne dans une brume de mélancolie douce, reliée à une nostalgie de l’enfance et de l’innocence ; le phare dans la pénombre.

En cela, l’esthétique de la série Mercredi rend hommage aux films précédents de Burton, introduisant des décors mystiques ambitieux, allégés de couleurs psychédéliques, vitraux asymétriques, cheminée dont l’âtre prend la forme de la gueule d’une statue mythologique de Méduse, intérieurs d’inspiration victorienne (salle de classe de sciences naturelles inspirée des jardins d’hiver du XIXème siècle). Cependant pour vouloir s’attaquer à une telle franchise déjà exploitée maintes fois sous forme de films et de séries depuis les années soixante jusqu’en 2021 pour le dernier film d’animation, il fallait une raison valable, il fallait quelque chose à dire, à ajouter. Sinon, pourquoi fait-on des remakes et des spin-offs ?

C’est ici que ça se corse. Car avant de nous émerveiller par son univers millimétré, élevé par les échasses d’une technologie ultra présente rendant fainéante l’imagination, la série est avant tout construite pour happer le spectateur adolescent avide d’images rapides comme celles défilant sur son écran tactile. Par son montage à couper au couteau, ses dialogues coup de poing où les acteurs répondent du tac au tac en permanence, sous peine de n’être pas écoutés, la série n’a décidément rien à voir avec la première sitcom diffusée en 1964 à la télévision, qui devait son rythme tranquille aux rires enregistrés.     

Dans un noeud d’intrigues invoquant une part d’Histoire grâce à une brèche temporelle qui permet à l’héroïne de se retrouver face à son alter ego du XVIIème siècle, chahutée par la chasse aux sorcières et le colonialisme, la série se penche sur une double lecture qui n’est pas dénuée d’intérêt, jouant sur cette idée que “ceux qui oublient l’Histoire sont maudits à la reproduire”.

Pour l’amour du proscrit, Burton nous présente une Mercredi Addams plus ostracisée que jamais, complètement asociale, subissant le trauma d’une histoire familiale obscure et incomprise, nécessitant par-là même l’intervention d’une psychologue qui essaie tant bien que mal d’établir une relation de confiance avec la jeune fille et travailler son manque d’empathie, par le biais de séquences un peu poussives en termes de stéréotypes liés à la thérapie. Cette nouvelle dimension psychologique apporte aussi son lot de modernisme, avec les questions de rapports au groupe, à la meute (jeune fille loup-garou qui n’arrive pas à se transformer lors des nuits de pleine lune) et à l’exclusion par la différence. 

Passés les nombreux clins d’oeil savoureux aux personnages et répliques cultes de la série de 1960, disséminés à chaque épisode pour le plus grand plaisir des amateurs de l’univers Addams, Mercredi se veut un véritable “show” grandiloquent, tantôt pris par son propre piège, tantôt agréablement surprenant.

Bande-annonce

23 novembre 2023 (Netflix) – Avec Jenna OrtegaCatherine Zeta-Jones




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