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COMME DES FRÈRES

 

Depuis que Charlie n’est plus là, la vie de Boris, Elie et Maxime a volé en éclats. Ces trois hommes que tout sépare avaient pour Charlie un amour singulier. Elle était leur sœur, la femme de leur vie ou leur pote, c’était selon. Sauf que Charlie est morte et que ça, ni Boris, homme d’affaires accompli, ni Elie, scénariste noctambule et ni Maxime, 20 ans toujours dans les jupes de maman, ne savent comment y faire face. Mais parce qu’elle le leur avait demandé, ils décident sur un coup de tête de faire ce voyage ensemble, direction la Corse et cette maison que Charlie aimait tant. Seulement voilà, 900 kilomètres coincés dans une voiture quand on a pour seul point commun un attachement pour la même femme, c’est long… Boris, Elie et Maxime, trois hommes, trois générations, zéro affinité sur le papier, mais à l’arrivée, la certitude que Charlie a changé leur vie pour toujours.

Voilà le film dont tout le monde vante les mérites. Voilà le film qui semble mettre tout le monde d’accord, presse, public et blogosphère. Voilà la comédie qui charme les petits intellos franciliens. Voilà surtout le bon navet bleu-blanc-rouge carrément surestimé !

Du bon gros cliché parisien, en veux-tu, en voilà… L’histoire d’amitié débutant par le biais d’un drame tragique, le buddy-movie / road-trip initiatique qui va faire grandir les trois personnages, la rencontre avec les autochtones de province nourrissant d’encore plus gros préjugés… tout est réuni pour offrir un capital sympathie indéniable pour la populasse de la capitale. Car j’ai du mal à croire qu’on aimera le film en dehors de la région parisienne. Tout ce que le film dépeint de la France de « province » est plutôt consternant et j’ai du mal à croire que les habitants des régions visités par nos protagonistes se reconnaîtront… Mais là n’est pas le plus déplorable.

Qu’on veuille faire un film de potes qui ne lésine pas sur les clichés, ça n’a rien de bien original ces temps-ci (le grand Dany ne s’en est pas privé, pourquoi pas d’autres ?). Qu’on veuille ajouter une touche dramatique pour se donner l’impression que notre comédie est plus sensible, plus intellectuelle, et faire chialer le public pour se la jouer Guillaume Canet avec ses petits mouchoirs, là je dis non. Non, tout d’abord parce que ces foutus petits mouchoirs n’ont rien qui ne soit suffisamment bon pour qu’on s’en inspire. Si dans son film, Canet faisait trépasser Dujardin à coup de poids lourd versus scooter, Hugo Gélin opte pour le bon vieux cancer pour faire caner le personnage « ciment » du groupe. Pour l’incarner, il a choisi Mélanie Thierry qui campe Charlie, aka la meuf bien relou que tout le monde adore alors qu’elle crie ou chiale partout et tout l’temps. Là où le troisième long-métrage de Monsieur Cotillard fonctionnait presque deux heures avant de nous offrir un interminable épilogue pathétique (dans tous les sens du terme) tellement lacrymal que c’en devenait ridicule, le film de Gélin, lui, ne fonctionne jamais.

Cette histoire de trois hommes immatures (malgré leurs âges différents) réunis par le décès de l’enquiquineuse précédemment citée ne tient pas la route. La mayonnaise ne prend pas car ce road-trip soudainement improvisé n’a rien de touchant ou de drôle. Il se rate tant dans le versant dramatique que dans le versant comique. On n’y croit jamais : dès cette scène d’introduction factice à en mourir – sans jeu de mots – on sent que les vannes forcées vont polluer le film et que les faciès faussement graves vont sérieusement parasité l’émotion. Je le répète, on n’y croit pas. Les gags sont éculés et répétitifs (sérieux, le gars qui parle dans son sommeil, what’s new with that ?), la recherche du bon mot se fait lourdement sentir dès qu’un personnage se lance dans une longue tirade sur le sens de la vie, de la famille ou de l’amour (sérieux, tu balances comme ça un « je suis adopté » comme un cheveu sur la soupe ?).

Si l’histoire de Comme des frères ne fonctionne pas, c’est aussi la faute de ses personnages, tous plus agaçants les uns que les autres – je ne veux pas être affreusement cynique mais la Charlie est mieux morte que vivante, ça nous fait du repos. Si Comme des frères ne fonctionne pas, c’est également à cause de ses comédiens, tous plus mauvais les uns que les autres – le seul à s’en sortir convenablement est cet insupportable péteux qu’est Nicolas Duvauchelle, c’est dire. Si l’histoire de Comme des frères ne fonctionne vraiment pas, c’est enfin parce que son scénario est cousu de fil blanc – oh, ils vont éparpiller ses cendres en Corse, près de sa maison, que c’est inattendu – et que les dialogues ainsi que le montage en spirale n’amusent, ne surprennent ou n’intéressent pratiquement jamais.

Vous l’aurez compris, et me traiterez à nouveau d’éternel rabat-joie qui n’aime rien (spéciale casse-dédi à mon cher Fred), je ne vous recommande absolument pas Comme des frères – qui porte d’ailleurs bien mal son nom. Réalisé Comme un manche, écrit et joué Comme des pieds et sans subtilité, suivant l’histoire de personnage agissant Comme des niais, le premier film devrait plutôt s’intituler (si l’on se place du point de vue du spectateur dupé par la critique positive ou de l’amateurisme ambiant de cette première réalisation) : Comme des bleus

HUGO GELIN | FRANCE | 104 MIN | 21 NOVEMBRE 2012 | FRANÇOIS XAVIER DEMAISON, NICOLAS DUVAUCHELLE



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FabR
FabR
11 années il y a

« J’ai du mal à croire que les habitants des régions visités par nos protagonistes se reconnaîtront…  »
Eh bien, figure toi, que je suis originaire d’Auvergne et que je n’ai vu aucun mépris dans les scènes se déroulant dans l’Allier (le pique-nique dans le pré), à Vichy notamment.
Je ne connaissais rien de l’histoire avant de voir le film. Et je pensais donc au départ que Charlie était un mec. Oui, j’avais même oublié la présence de Mélanie Thierry sur l’affiche… Cette petite « surprise » m’a fait entrer dans l’histoire.
J’ai trouvé que l’alchimie entre les trois garçons fonctionnaient bien (et pourtant, je suis loin d’être fan de Demaison). Que ce ne soit pas archi-réaliste, je le concède, mais j’ai aimé ce qui se dégageait du film. Quant aux fait de balancer des trucs archi-perso comme un cheveu sur la soupe, je t’assure, cela m’est arrivé. De les prononcer ou de les écouter.
Bref, j’ai aimé cette vision de l’amitié, cette réunion de trois mecs de générations et d’horizons différents, qui s’avèrent complémentaires.

mymp
11 années il y a

C’est vrai que t’aimes rien ! Ah si pardon, les films élus meilleurs films de l’année par les lectrices de Elle !

Flow
11 années il y a

Et bien t’es énervé. Je voulais vraiment le voir celui-là. Pas pour les critiques positives mais car la BA m’avait bien emballé et les acteurs vendaient bien leur truc.

Mais je l’ai raté. Dommage, venant du Sud de la France, j’aurais pu parler en provincial^^

Sinon, tout à fait d’accord au sujet de Canet et ses petits mouchoirs…

Squizzz
11 années il y a

Je découvre tardivement ta critique, et si t’as lu la mienne, tu sais déjà que je ne suis absolument pas d’accord avec toi. Ca sera pas la première fois, mais là je trouve que t’y vas sacrément fort !
D’accord aucune originalité en soit dans ce premier film. Mais perso, comme FabR j’ai aimé l’atmosphère qui se dégage du film et c’est ce qui est je pense important dans ce type de film. Du coup on adhère ou pas.
Manque de subtilité ? Bon là je suis pas du tout d’accord, c’est je trouve la principal qualité du film, mais bon là encore question de sensibilité personnelle.
Par contre film parisien qui se fout des provinciaux, là je dis non ! J’ai tjs habité en province et j’ai ressenti aucun mépris de la part d’Hugo Gélin. Je ne vois même pas où tu vois des clichés déplaisants dans le film.
Et enfin concernant les interprètes, même des critiques clairement négatives, ont salué le trio d’acteurs.
Bon allez, sans rancune 😉

Ashtray Girl (@Ashtray_Girl7)
11 années il y a

Ah ouais, quand même… Pas certaine qu’on ait vu (perçu) le même film, pour le coup!

trackback
11 années il y a

[…] sont. Moi qui pensais pouvoir paresseusement somnoler devant ce métrage digne du navrant Comme des frères – également avec Pierre Niney – je n’en ai pas eu pour mon argent (enfin, pour […]

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