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PRIS AU PIÈGE

Hank Thompson a été un joueur de baseball prodige au lycée, mais désormais il ne peut plus jouer. À part ça, tout va bien. Il sort avec une fille géniale, il est barman la nuit dans un bar miteux à New York, et son équipe préférée, donnée perdante, est en train de réaliser une improbable remontée vers le titre. Quand Russ, son voisin punk lui demande de s’occuper de son chat pendant quelques jours, Hank ignore qu’il va se retrouver pris au milieu d’une bande hétéroclite de redoutables gangsters. Les voilà tous après Hank, et lui ne sait même pas pourquoi. En tentant d’échapper à leurs griffes, Hank doit mobiliser toute son énergie et rester en vie assez longtemps pour comprendre.

Critique du film

On a souvent reproché à Darren Aronofsky son incapacité à se contenir, à canaliser son cinéma. Presque en réponse à ces critiques, son avant-dernier film, The Whale, mettait en scène un homme atteint d’obésité morbide dont la caméra peinait à saisir le corps de plain-pied. Rien de tel dans Pris au piège (Caught Stealing) : un divertissement qui ne réinvente pas le genre, mais qui ne l’entrave pas non plus. Le réalisateur y délaisse les références bibliques ou littéraires appuyées et s’écarte de sa tendance à suivre des personnages obsédés ou dépendants. À tel point qu’au moment où le générique révèle le nom de « Darren Aronofsky », on en reste légèrement étonné.

Austin Butler et le cuir

Depuis son irruption au panthéon des stars actuelles de Hollywood avec son incarnation dans le biopic sur Elvis Presley de Baz Luhrmann, l’acteur entretient un lien indéfectible avec cette matière. Veste du King, blouson de motard dans The Bikeriders de Jeff Nichols ou ici la veste très punk qu’il emprunte à son ami Russ, ces habits façonnent l’image de sa personnalité et de ses rôles. Visage lisse et plaisant à l’œil, le Californien a souvent incarné des personnages rugueux et durs. Son rôle d’Hank Thompson dans Pris au piège ne partage pas la même intensité que d’autres premiers rôles qui composent la filmographie de Darren Aronofsky, mais il reste le poumon du film. 

Caught stealing

Barman à Manhattan, espoir du baseball avant qu’un accident ne vienne briser sa carrière, fan inconditionnel des Giants et alcoolique, Hank rejoint sa petite-copine Yvonne (Zoë Kravitz) à la fin de son travail. Les deux vont se retrouver dans une sombre histoire de drogue, d’argent et de chats lorsque Russ, le voisin de Hank, doit partir à Londres pour retourner au chevet de son paternel gravement malade. Tous les deux sont réunis par la force des choses dans une intrigue au carrefour entre Blood Simple des frères Coen, After Hours de Martin Scorsese et Snatch de Guy Ritchie. 

Labourer le sillon de la comédie noire et du thriller à haute intensité permet à Aronofsky de torturer d’une autre manière son personnage que dans ses précédents films. La sentence qui faisait trembler de peur le plus dévot des prêtres n’a pas le temps de tomber puisque chaque incident est aussitôt suivi d’une nouvelle situation de crise ou de détresse. Ici, le cinéaste semble moins s’investir dans le récit et explorer la psyché de ses personnages avec ses allégories (ou visions altérant leurs états de conscience) pour scruter davantage les visages, en particulier celui d’Austin Butler, presque de tous les plans. Il prend un malin plaisir à l’isoler sous son objectif, à déceler si le cuir de son visage va se craqueler, si la figure du voisin sympa du quartier va imploser et laisser apparaître un monstre de violence. 

Pris au piège

En définitive, cette atmosphère plus légère, davantage tournée vers la comédie noire que vers le drame, tranche avec le reste de la filmographie d’Aronofsky tout en lui offrant une nouvelle façon d’exprimer ses névroses. La véritable tragédie, cependant, réside dans l’impossibilité de prendre le temps de pleurer ses morts. Hank reste constamment sur le qui-vive, hanté par les fantômes d’un passé qu’il voudrait effacer et harcelé par des ennemis implacables. Moins emphatique qu’un Requiem for a Dream ou qu’un Black Swan, Pris au piège assume avec énergie ses facilités scénaristiques et revendique sans détour son statut de divertissement plutôt que de manifeste prétentieux. En revenant symboliquement à 1998, l’année de son premier long-métrage Pi, Aronofsky s’offre une cure de jouvence et révèle un goût du fun qu’on ne lui connaissait pas.

Bande-annonce

27 août 2025 – De Darren Aronofsky