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GHOST ELEPHANTS

Depuis une décennie, le Dr Steve Boyes est à la recherche d’un mystérieux et insaisissable troupeau d’éléphants fantômes dans les hautes terres d’Angola, un plateau boisé pratiquement inhabité, mais d’une superficie aussi grande que l’Angleterre. Il part avec des experts pisteurs de Namibie, les meilleurs au monde, mais une question fondamentale se pose : ne vaudrait-il pas mieux garder ces éléphants gigantesques comme un rêve, comme des fantômes, comme la baleine blanche, plutôt que de les trouver dans la réalité ?

Critique du film

Fidèle à son tempérament de cinéaste-explorateur, Werner Herzog a trouvé en Angola le sujet parfait pour un nouveau documentaire. Le voici à la poursuite d’un objectif confinant à une quête des plus ardues : trouver la trace du descendant du plus grand éléphant jamais découvert sur notre planète.

Nommé « éléphant Fénykövi » du nom de son braconnier, le plus grand mammifère terrestre a été abattu en Angola en 1955. Il est aujourd’hui conservé au musée Smithsonian de New York et c’est par la vision de son gigantisme que le film s’ouvre. Pour comprendre son échelle, à ses pieds se trouve Steve Boyes, scientifique sud-africain et défenseur de l’environnement. Totalement habité par l’idée de rencontrer un tel animal aujourd’hui, il recherche depuis presque dix ans ce qu’il nomme son « éléphant fantôme », de la directe lignée de l’éléphant Fénykövi. Est-il au moins sûr de son existence ? La caméra de Werner Herzog va le suivre à travers un périple en Namibie puis en Angola, parcourant des terres belles comme des paradis perdus que l’on croit foulées pour la première fois.

Les moments les plus forts du documentaire sont dûs au groupe d’Angolais qui les accompagne, rares personnes capables de se repérer dans cette région et d’en comprendre encore l’âme, l’un n’allant pas sans l’autre. On comprend à leurs côtés que l’on assiste à quelque chose de précieux qui n’existera peut-être plus un jour. Par exemple, cette façon de deviner le passage d’un éléphant en percevant sur un tronc d’arbre la preuve que l’un d’entre eux y a frotté son épaule, ce qui permet alors d’en déduire la taille et la trajectoire. Avec un respect fasciné pour ce qu’il filme, Werner Herzog prône un lien indéfectible entre la possibilité d’approcher ce sanctuaire et la nécessité de faire corps avec les traditions mystiques locales, toujours positionné à la bonne distance.

Regardant sans cesse là où il pourrait repousser les limites du visible au cœur de paysages uniques, il ne pouvait que se passionner pour cette histoire. Mais on devine aussi peu à peu ce qui l’a motivé par-dessus tout, car sa démarche rejoint celle du scientifique obstiné : attraper l’image impossible. C’est pour elle que tous les deux semblent exister chacun dans leur domaine. L’homme de science et l’homme de cinéma ne font alors plus qu’un et s’accordent pour penser que cette image, qu’elle soit possible ou non à capturer, doit rester un objectif pour continuer à rêver et à se lever le matin.


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