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L’EFFRONTÉE

Dans une petite ville de province, à la veille des vacances, Charlotte Castang, 13 ans, s’ennuie de tout malgré l’amour de son grand frère, de son père veuf, de sa nounou Léone, et de Lulu, sa petite voisine pot de colle. Clara Baumann, une pianiste prodige de son âge, arrive en ville pour un concert. Fascinée par ce monde qu’elle découvre, Charlotte se prend à rêver…

Critique du film

Cycle Hello Summer ☀️

Nous sommes à la veille des vacances estivales. C’est la fin d’une année scolaire et la grande période précédant le passage à la classe supérieure va commencer, dans une chaleur étouffante et la torpeur d’une petite ville de province. Charlotte se sent à l’écart, se trouve incomprise et mal aimée et pourtant elle semble bien entourée. Mais ses préoccupations ne sont pas les mêmes que celle de son père, un artisan veuf et très accaparé par son travail, de son grand frère qui prend un malin plaisir à la taquiner et qui a beaucoup plus de liberté que sa sœur, en raison de son âge. Léone, la nounou, masque parfois sa tendresse et son amour derrière des remarques acerbes. Quant à Lulu, sa petite voisine beaucoup plus jeune, elle est souvent confiée la nuit à Charlotte. La mère de Lulu travaille dans le milieu hospitalier et doit assurer régulièrement des gardes. 

Charlotte se débat avec sa colère, rejette parfois sa famille et son milieu qu’elle juge trop étriqués. Elle rêve d’un autre horizon et la rencontre fortuite avec une jeune pianiste prodige qui a treize ans, comme elle, et qu’elle avait vue lors de la retransmission d’un concert, va la conforter dans son mal-être. Au même moment, elle fait la connaissance d’un marin, également ouvrier, qui pourrait avoir une trentaine d’années et avec lequel elle établit une relation trouble. 

Comme tout bon film ayant pour thème les grandes vacances estivales, L’Effrontée nous parle avec sensibilité et intelligence du passage d’un âge à un autre, d’un changement d’étape, de la mort des illusions et de la difficulté, de la douleur qu’il y a parfois à grandir. Le renoncement à des rêves chimériques ne se fait jamais aisément. Charlotte admire Clara, la jeune pianiste, envie également le milieu dans lequel elle évolue, où tout ne semble que luxe, vie facile et dénuée de toute monotonie. Sa révolte passe forcément par des paroles, des actes parfois injustes et aussi cruels que ce destin tout tracé dont elle ne veut pas. 

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L’Effrontée était la deuxième apparition à l’écran de Charlotte Gainsbourg, après Paroles et musiques d’Elie Chouraqui, mais son premier vrai rôle principal. Autant dire que ce fut à l’époque une véritable révélation. Chaque gros plan de la jeune fille, avec sa moue boudeuse et ce regard profond où se lisent aussi bien le rêve que la déconvenue, charrie un torrent d’émotions mêlées : tristesse, attendrissement, amusement aussi, parfois. Impossible de ne pas se reconnaître, ou de revoir ses propres souvenirs de cette période de l’adolescence où l’on finit par croire à ses espoirs les plus fous et où la confrontation à la réalité ou à ses propres limites se fait de façon violente. 

Le jeu de Charlotte Gainsbourg s’avérait d’un naturel confondant. Dans le rôle de son père bourru, dépassé par les événements, mais capable d’une grande tendresse, Raoul Billerey – grand maître d’armes et cascadeur ayant beaucoup œuvré dans les films de cape et d’épées de l’histoire du cinéma français, en même temps qu’acteur – déployait une palette tout en sobriété et en finesse. La distribution comprend également Bernadette Lafont, dans le rôle de la nounou Léone, Simon De La Brosse, en grand frère moqueur mais jamais méchant, mais aussi Jean-Claude Brialy en imprésario de la jeune Clara. Tous sont très justes, tout comme les deux autres jeunes interprètes, Clothilde Baudon en jeune prodige, très à l’aise dans sa vie auréolée de gloire et de faste et la petite Julie Glenn, dans le rôle de Lulu, qui aime tant Charlotte et qui voudrait qu’on s’occupe d’elle. Quant à Jean-Philippe Ecoffey, qui joue cet homme qui cherche à abuser de la jeune Charlotte, il livrait avec sa deuxième apparition à l’écran une composition mature dans un rôle délicat.

Pour sa cinquième réalisation, Claude Miller offrait il y a tout juste 40 ans une œuvre particulièrement touchante et profonde sur des thèmes éternels. L’Effrontée est un film qui reste toujours aussi pertinent et émouvant.


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Réédité en décembre 2024, grâce à l’éditeur RIMINI, L’Effrontée est toujours disponible en DVD ou en Blu-Ray 4K Ultra HD, accompagné d’un Blu-Ray. 

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