DITES-LUI QUE JE L’AIME
Romane décide d’adapter pour le cinéma le livre de Clémentine Autain consacré à sa mère. Ce projet va l’obliger à se confronter à son passé et à sa propre mère qui l’a abandonnée quand elle avait neuf mois.
Critique du film
Après l’Amour-flou, long-métrage au carrefour entre l’auto-fiction et la comédie romantique, la cinéaste quitte l’observation de la vie de couple pour s’attaquer aux fragments mémoriels d’une mère absente et démissionnaire. À la source de ce grand remue-ménage cinématographique jonglant avec les formes d’images et les émotions, il y a le livre éponyme écrit par Clémentine Autain. Publié aux éditions Grasset en 2019, la députée y revenait sur sa figure maternelle : l’actrice française Dominique Laffin, trop en proie à l’alcool, sa carrière et ses conquêtes amoureuses pour s’occuper d’elle.
D’emblée, la scène d’ouverture atteste de la nature d’adaptation du film puisque Romane Bohringer se met en scène découvrant l’existence du livre lors d’une interview promotionnelle à la télévision. Cette forme particulière rappelle le dispositif déployé par Diane Kurys dans Moi qui t’aimais, sorti en octobre. La séquence de pseudo making-of où les visages de Céline Sallette, Julie Depardieu et Elsa Zylberstein, toutes coiffées d’une perruque blonde, auditionnent face-caméra pour incarner la femme politique fait écho à la scène où Marina Foïs et Roschdy Zem se maquillent pour incarner Simone Signoret et Yves Montand.

Surtout, en brisant le quatrième mur, Dites-lui que je l’aime semble chercher à mimer la même mise à nu que ses personnages bien réels, confiant au public leurs secrets de famille, leur intimité. Paradoxalement, ce geste artistique, radical dans son intention, laisse davantage apparaître une œuvre trébuchante et hésitante. Le film semble inachevé, pas encore arrivé à maturité, reposant un peu trop sur son scénario pour excuser ses balbutiements. Par moments, on en vient à soupçonner que le projet entier n’est qu’un prétexte cathartique pour se libérer des démons de son passé et faire un grand « trauma dumping » aux spectateurs.
Ce constat n’est pas aidé par l’approche protéiforme de la réalisatrice, qui jongle en permanence entre les images stylisées de la fiction, des séquences plus abstraites issues de ses souvenirs d’enfance, une veine documentariste (les images d’archives de sa mère ou les prises de vue de Clémentine Autain lisant son livre) et des scènes plus fantaisistes évoquant la créativité DIY d’un Michel Gondry.
Non seulement ce bric-à-brac demeure frustrant, car certaines séquences du film s’avèrent être supérieures à d’autres, mais surtout cette confusion rend maladroite la démarche de Bohringer. Au lieu d’émouvoir, on se retrouve parfois gêné devant un déballage émotionnel aussi impudique.
Bande-annonce
3 décembre 2025 – De Romane Bohringer






