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BONNE MÈRE

Nora, la cinquantaine, femme de ménage de son état, veille sur sa petite famille dans une cité des quartiers nord de Marseille. Après une longue période de chômage, un soir de mauvaise inspiration, son fils aîné Ellyes s’est fourvoyé dans le braquage d’une station-service. Incarcéré depuis plusieurs mois, il attend son procès avec un mélange d’espoir et d’inquiétude. Nora fait tout pour lui rendre cette attente la moins insupportable possible…

Critique du film

Avec Bonne mère (2021), Hafsia Herzi signait un film d’une délicatesse bouleversante, révélant la force invisible de celles qui portent le monde sur leurs épaules. Sélectionné à Un Certain Regard à Cannes en 2021, ce second long-métrage, qui aurait dû inaugurer sa carrière de réalisatrice, lui permettait enfin de déployer pleinement sa sensibilité et son regard sur les familles éclatées et la maternité, après le prometteur Tu mérites un amour et avant d’éblouir le monde cinéphile avec La petite dernière, récompensé de la Queer Palm en mai dernier à Cannes et bientôt à l’honneur à Montélimar, où elle recevra le Prix De l’écrit à l’écran lors de la 14e édition du rendez-vous drômois.

Dans cette seconde fiction, cette cinéaste se concentre sur Nora (Halima Benhamed), matriarche marseillaise incarnée avec justesse et sobriété, dont l’amour et la constance sont les piliers d’une famille en ruine : un fils en prison, un autre absorbé par son ego, et une fille déjà mère à peine sortie de l’adolescence. À travers chaque geste quotidien et chaque démarche, le film révèle la puissance des sacrifices quotidiens. La caméra épouse le rythme de cette mère vaillante et résiliante. Tout se lit dans son regard et sa manière de donner sans rien attendre en retour. Même les absents – le père jamais nommé, le fils aîné derrière les barreaux – servent à souligner l’indispensable rôle de Nora et la fragilité du monde qu’elle maintient à flot, coûte que coûte.

Hafsia Herzi sur le tournage de Bonne mère

Les dialogues, riches d’accent marseillais et de mots crus, traduisent pourtant des émotions profondes et complexes. Les échanges avec Ilyess, fils prisonnier, sont d’une intensité bouleversante, mêlant incompréhension, tendresse et culpabilité. Déjà plus affirmée dans son regard de cinéaste, Hafsia Herzi capte la beauté des moments anodins, où le quotidien se charge de poésie et d’humanité, révélant la force silencieuse de Nora. Elle incarne une héroïne moderne, dont la droiture et l’amour transcendent le sang et s’étendent aux collègues et aux clients, transformant chaque interaction en éclat d’humanité.

Bonne mère touche par sa finesse et son regard sincère sur la famille, révélant la force et la vulnérabilité qui l’habitent. Hafsia Herzi, déjà l’une des actrices les plus talentueuses de sa génération, s’affirme également comme réalisatrice d’un univers profondément humain. Elle prolongera ce geste avec La petite dernière, élargissant cette exploration des figures féminines insuffisamment représentées au cinéma, en intégrant à son cinéma les tensions entre orientation sexuelle et religion, tout en conservant sa poésie singulière et sa sensibilité à la complexité des liens familiaux.

Bande-annonce

Réalisé par Hafsia Herzi


Rembobinez, s’il-vous plait


Hafsia Herzi – Prix De l’écrit à l’écran 2025