Wizard-movie-Review-1

VIDEOKID, THE WIZARD

Corey et Jimmy sont séparés depuis le divorce de leurs parents. Jimmy est mentalement instable depuis la mort de sa soeur quand il était petit. Un jour Corey découvre que son frère a un don pour les jeux vidéo…

Critique du film

La fin de l’année 1989 est aux États-Unis l’aboutissement d’une décennie marquée de l’empreinte de Ronald Reagan et d’un retour à un impérialisme triomphant qui se retrouve transposé dans toute l’industrie de l’ « entertainment » américain. C’est également un moment charnière pour l’industrie du jeu vidéo, qui aura connu à la fois sa plus grande crise, mais également une renaissance spectaculaire. En 1983, c’est toute cette économie du jeu qui s’est effondrée en quelques semaines, n’étant devenu qu’un produit d’appel pour les autres arts, le cinéma en tête, comme en atteste la sortie d’un jeu E.T. en catastrophe, pour coller avec la sortie du film de Steven Spielberg, sans se préoccuper de la qualité du travail. Pendant l’été de cette année, des millions d’américains abandonnent cet amour né avec Atari, Colecovision et quelques autres, pour se tourner comme le reste de l’Occident vers la micro-informatique de meilleure qualité pour les loisirs.

La sortie de la NES de Nintendo en 1985 sur le territoire étasunien change tout : c’est un succès immédiat grâce à la qualité de son catalogue de jeux et des franchises qui n’auront de cesse de s’enraciner dans l’inconscient collectif et dans la pop-culture internationale. Mario, Zelda ou encore Metroid arrivent dans les foyers assurant la pérennité de ce nouveau modèle de loisir pour les décennies suivantes. Le cinéma, jusque là moteur de la création de jeux, devient client de ces nouvelles technologies, et leur rend grâce par des fictions s’adressant à un public jeune, cette cible des 8-14 ans qui avait été délaissée au profit des adolescents plus âgés. The Wizard, Vidéokid en France, est un des plus beaux exemples de cette exploitation de la nouvelle passion d’une génération qui n’a jamais cessé de jouer. Il sortit en décembre 1989, positionné dans la case si importante du film de fin d’année, locomotive pour de nombreux studios de cinéma.

The Wizard
Produit par la société Carolco, fondée par Mario Kassar et Andrew Vajna, à qui l’on doit Rambo (1982) et Terminator 2 (1991), et distribuée par Universal, The Wizard devient rapidement l’émissaire de cette renaissance du jeu vidéo à l’échelle des Etats-Unis. L’histoire est simple, un enfant de 9 ans est obsédé par la Californie, au point de quitter ses parents dès qu’il le peut pour tenter de rejoindre cette Terre promise. Mutique et réservé, il est placé dans une institution, jusqu’à ce que son demi-frère, joué par l’enfant star Fred Savage, ne l’aide à s’échapper pour marcher vers cet Ouest rêvé. C’est cette fuite que filme le réalisateur Todd Holland, connu pour être un réalisateur de séries et de show télévisés. On lui doit notamment de nombreux épisodes de la série Malcolm (2000-2004), mais aussi la réalisation du Larry Sanders’ show, extrêmement célèbre dans son pays.

Le casting est particulièrement soigné avec le choix de Beau Bridges (Susie et les Baker boys) pour interpréter le père des garçons, tandis que la star montante Christian Slater est choisi pour jouer le frère aîné de cette fratrie atypique. Fred Savage était quant à lui déjà célèbre pour son rôle dans Princess Bride (1985) de Rob Reiner, ou pour une multitude de rôle distribués entre séries et film télé américains. Ce parcours initiatique qui doit mener les deux frères, ainsi qu’une jeune fille trouvée sur leur chemin, de l’Utah jusqu’à Los Angeles, est dévoué au culte des jeux vidéos. A l’instar de Rain man de Barry Levinson sorti l’année précédente, le petit Jimmy se révèle un surdoué dans un domaine alors qu’il est incapable d’interagir avec son entourage. Dès qu’il se retrouve devant une borne d’arcade ou un jeu de salon il devient un virtuose, un magicien de l’électronique.

Ce n’est pas un hasard si ce sont des jeux et consoles NES qui apparaissent presque exclusivement à l’écran dans The Wizard. Nintendo est la marque qui s’est emparée de tout ce marché économique au niveau mondial, déferlant sur tous les continents, y compris sur l’archipel japonais dont il est originaire. The Wizard chante cet amour nouveau pour la firme nippone, allant jusqu’à utiliser le fameux Power Glove, accessoire mythique qui fut le jouet star de l’année 1989 avant de disparaître aussi vite qu’il était apparu. Tout comme Starfighter (1984) de Nick Castle, le film joue sur une partie fondamentale de la culture étasunienne, celui des grands espaces et de la frontière vers l’Ouest, avec la Californie comme point d’arrivée, l’El Dorado tant recherché. Ce sont ces mêmes espaces vides et semi désertiques que traversent la petite troupe, avec une escale à Reno, « la plus grande des petites villes au monde ».

Le final du film est un véritable cadeau aux joueurs de cette époque, un accord avait été trouvé par Universal avec Nintendo pour montrer en avant-première le jeu Super Mario 3, qui ne sortira aux Etats-Unis que l’année suivante. L’émotion de cette dernière partie qui consacre le bonheur du jeu au détriment de la performance n’est pas sans rappeler le Ready Player One de Steven Spielberg, qui se nourrit de cet amour qui a contaminé plusieurs générations de joueurs. The Wizard pourrait passer dès lors pour un produit promotionnel, accord entre Nintendo et Universal, s’il n’était pas plus que ça, dans sa capacité à dimensionner le phénomène de société qui se met en place en 1989. Il se nourrit également d’une histoire rythmée et bien menée, grâce à des ressors scénaristiques simples mais qui ont fait leurs preuves : ceux du road movie pour adolescents. De John Hughes aux Goonies, ce style de films qui permet aux enfants d’exister en laissant leur famille dans le hors-champ, a fait toute la magie des comédies pour « teenagers » des années 1980.

The Wizard est donc un film qui célèbre l’amour du jeu sous toutes ses formes, que ce soit dans un bar un « quarter » devant une borne, ou bien dans un garage avec une console emportée dans son sac, ou chez soi pendant des heures magiques qui peuplent l’imaginaire de chacun et de chacune. Mais c’est aussi un divertissement qui puise ses forces dans la capacité d’émerveillement de ces films hollywoodiens qui, dans le drame ou la comédie, de Fast times at Ridgemont High (1982) jusqu’à Stand by me (1986) ou War Games (1983), représentent une jeunesse qui vit ses aventures librement, se rêvant au-delà des carcans familiaux et scolaires.


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