FESTIVAL LUMIÈRE 2025 | Le Prix Lumière remis à Michael Mann
Alors que le Festival Lumière se tenait à Lyon depuis une semaine, il était grand temps de remettre son prix à Michael Mann. C’est devant presque trois mille personnes qu’il a été honoré ce vendredi 17 octobre 2025. Après l’arrivée du réalisateur sous une pluie d’applaudissements, la cérémonie emmenée par Thierry Frémaux, le directeur du festival et de l’Institut Lumière, a débuté par les habituels (et parfois un peu trop envahissants…) clips vidéos du Festival Lumière dont on retiendra surtout celui qui retraçait 130 ans de cinéma (que l’on fête cette année) permettant notamment de rendre hommage aux récents disparus comme Robert Redford et Diane Keaton.
Au cours de la soirée, Thierry Frémaux est revenu sur ce qui a motivé le festival à choisir Michael Mann comme Prix Lumière. Bien qu’il ait commencé dans les années 60 comme reporter, « c’est un cinéaste du contemporain » a souligné le directeur du festival. Rarement récompensé, il est pourtant, « l’un des plus grands créateurs de forme du cinéma contemporain ». Thierry Frémaux a également cité Jacques Audiard qui a dit apprendre de chaque film de Michael Mann, qui l’inspire et l’oblige à être meilleur technicien. Thierry Frémaux a par ailleurs rappelé son engagement pour le cinéma, pour la défense de l’exception culturelle, notamment au travers de son implication lorsqu’il était président de la Directors Guild of America. « A sa façon, Michael Mann est aussi un grand cinéaste politique » a conclu le directeur du festival.
La soirée a ensuite été ponctuée par deux instants suspendus offerts par Camélia Jordana venue reprendre Parce que de Charles Aznavour puis We Shall Overcome qu’elle a dédiée à tous les peuples opprimés dans le monde. Comme traditionnellement, plusieurs films tirés des archives Lumière ont également été projetés, dont les trois versions de La Sortie de l’usine Lumière à Lyon, et quelques-uns tournés à Chicago d’où est originaire Michael Mann. Le nouveau Prix Lumière a également eu l’honneur de recevoir un petit message de Quentin Tarantino (qui a reçu le prix en 2013) lui souhaitant la bienvenue dans le « club Lumière ».

Irène Jacob, la présidente de l’Institut Lumière, a comme habituellement rendu un vibrant hommage au récipiendaire du Prix Lumière. « Prononcer le nom de Michael Mann c’est déjà parler de cinéma. Le goût du cinéma, du cinéma grand écran. » « Nous plongeons dans vos films où tout est infiniment musical, extrême, subjectif, où tout contribue à nous maintenir en haleine. (…) Si votre cinéma est celui de l’adrénaline, de l’urgence et de la déchirure, c’est aussi un cinéma du lyrisme et de la liberté. » a-t-elle poursuivi, avant de clore avec une phrase prononcée par Al Pacino dans Révélations : « « Dis-moi exactement ce que tu ressens », c’est là question que vous nous posez dans vos films. Ce que nous ressentons nous pouvons vous l’exprimer ce soir et nous nous en réjouissons. »
Enfin, Isabelle Huppert, couronnée l’an dernier, est venue remettre le prix à Michael Mann en louant également le cinéaste et en le remerciant pour son œuvre : « C’est ici, à Lyon, dans cette ville qui respire le cinéma, que nous honorons un homme dont le regard continue à réinventer la lumière. Un cinéaste dont l’œuvre à la fois rigoureuse et passionnée semble toujours chercher les tensions invisibles, les silences qui parlent. » « Votre cinéma a cette intensité rare, celle d’un œil qui ne se contente jamais. Vous observez la ville comme un organisme vivant, la nuit comme une respiration, les visage comme des territoires. » « Ce prix lumière est plus qu’une distinction, c’est un geste de reconnaissance pour un parcours d’audace, pour une constance dans la recherche, pour une influence puissante sur les cinéastes, les spectateurs, les amoureux du cinéma. Et recevoir le prix Lumière ici à Lyon n’est pas seulement une récompense, c’est un retour aux sources, à cette lumière originelle dont vous êtes devenu à votre manière un des grands héritiers. » « Merci Michael Mann de continuer à nous surprendre, à nous déranger, à nous faire partager vos obsessions, à faire du cinéma le lieu d’une exploration inlassable. Merci pour votre œuvre exigeante, lyrique, sensuelle et pour cette fidélité que vous portez à la lumière. »
Michael Mann est alors monté sur scène pour recevoir son prix, en déclarant : « Maintenant je comprends pourquoi tant de cinéastes sont sans voix en venant ici ». « Ce festival est unique car il réunit des cinéastes avec une communauté d’individus qui œuvrent à célébrer l’art du cinéma ». Il est revenu aux origines de son désir de cinéma : « L’idée de faire du cinéma m’est venue quand j’avais 19-20 ans, c’était une nuit d’hiver dans le Wisconsin, je venais de voir un film muet, je descendais une colline, et c’est comme si le ciel s’ouvrait et qu’un doigt sortait et qu’on me disait très clairement « toi, tu dois devenir réalisateur » ». « Je me sens profondément chanceux d’avoir trouvé un travail artistique que je ressens comme une nécessité intérieure. » « En quatre ou cinq décennies, rien n’a changé dans mon impulsion à faire du cinéma. » « Je cherche sans cesse de nouvelles façons de pousser plus loin l’expressivité de mes histoires, de nouvelles façons de construire l’architecture souterraine de ma narration. Et surtout j’essaie de rester sur une frontière entre ce qui est et ce qui peut être, là où il y a de l’anxiété, de l’échec, parfois du succès, parce que c’est le meilleur endroit où être. » Il a enfin conclu en déclarant : « Ce soir restera gravé dans ma mémoire. Je suis profondément reconnaissant de cet honneur. Merci beaucoup. »
La soirée s’est achevée dans le vrombissement des moteurs avec la diffusion, pour la première fois en France sur grand écran, du Ferrari de Michael Mann.


