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SNOWDEN

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À bidouiller

Réformé à cause d’une fragilité physique, Edward Snowden grimpe petit à petit les échelons de la CIA. Au fur et à mesure de son ascension, il découvre les méthodes d’espionnage à très grande échelle du gouvernement américain via la NSA, et décide d’en exposer l’illégalité dans la sphère publique.

American Hacking Story.

De la partie immergée de l’iceberg des hackers, le grand public connaît deux noms. Il y a eu Julian Assange et son WikiLeaks. En juin 2013, un nouveau luron geek embrase la toile et les médias. Il s’appelle Ed Snowden, a travaillé à divers postes de l’intelligence américaine et chez diverses enseignes (FBI, CIA, NSA). Son nom parcourt à peine les feeds du monde entier, et le voilà déjà terré on ne sait où, pourchassé par on ne sait quelle division de contrôle et par on ne sait quel article de protection des secrets d’État américains. À peine 3 ans après sa révélation sur les écoutes illégales et internationales de la NSA, la National Security Agency des USA, voilà donc qu’Oliver Stone nous sort une énième carte biopic. Son heure de gloire est semble-t-il passée. Même les adorateurs du cinéaste ont fini par lâcher du leste. L’occasion pour le réalisateur de JFK, W. : L’Improbable Président et World Trade Center de calquer la rébellion de Snowden sur celle à l’encontre des accusations du récent conservatisme de sa filmographie. 

À l’ouverture du film, le spectateur frémit. Non d’un quelconque effet de script, mais à propos du pari d’exposition de Snowden. Plan d’hélicoptère sur Hong-Kong, musique d’action minimaliste. Trois journalistes, Laura Poitras (l’auteure de l’excellent documentaire CitizenFour, sur le même sujet que Snowden), Glenn Greenwald et Ewen MacAskill attendent vous-savez-qui. Première fausse piste, deuxième fausse piste, puis apparition de Joseph Gordon-Levitt dans la peau de son personnage. Petites lunettes, air sage, sac à dos geek et focus sur sa main, jouant nerveusement avec un Rubik’s Cube. “Nerd 101”. Est-ce donc cela à quoi nous sommes condamnés ? Une autre de ces visions à deux, voire trois générations de retard de cette folie furieuse abstraite nommée numérique ? Les yeux roulent. Ils se refixent rapidement sur l’écran. Après quelques signes muets et une poignée de plans de transition sans grande inventivité, Snowden se pose enfin dans une chambre anonyme et entame son récit.

Murmures & gesticulations

Enfin, le hacker cesse d’être une icône hâtive et explore la narration de son histoire. Cette narration, elle va être véhiculée par une interprétation impeccable de Gordon-Levitt, soulignée par un travail de titan sur sa (non) présence et sur une voix feutrée, directe et impénétrable. À l’inverse des présidents dont Oliver Stone a tiré le portrait, Ed Snowden est un homme simple. Un homme de devoir, dont les talents ne sont pas mis en avant par la volonté mais par une poisse d’instant. Abordant enfin son sujet par un biais humain et non idolâtre, on retrouve la force discrète qui faisait la force de CitizenFour dans Snowden. Stone ne force pas ses plans, joue simple, fait jouer simple. Il se concentre sur les relations essentielles pour dérouler un lent changement d’esprit. Les milliards de milliards d’octets secrets de l’intelligence US qui se dévoilent peu à peu y contribuent, mais pas autant que certaines rencontres. À l’image de sa copine libérale, Lindsay Mills (Shailene Woodley), dont la pudeur du traitement est appréciable, ou d’une figure tutélaire quasi-paternelle dans un de ses premiers instructeurs à la CIA, Corbin O’Brian (Rhys Ifans).

Mieux, pour éviter que le biopic ne se traîne en longueur, Snowden entame en toute fluidité un virage depuis le drame vers le thriller. On retrouve ici, non dans l’action mais dans le respect de la complexité des réseaux et la transposition internationale des codes du genre, un parallèle avec le mésestimé Hacker de Michael Mann. Propos, présence, harmonie de réalisation et de script : on se surprend à prendre son pied devant ce Snowden là. Et puis, terrible désillusion. Visiblement paniqué à l’idée qu’un de ses biopics ne puisse se terminer sans vérité générale et musique martiale, Oliver Stone multiplie les lourdeurs en fin de film, explicite vulgairement ce que près de deux heures avaient patiemment murmuré à l’oreille de ses spectateurs. À l’inverse des prémices de la séance, on prie pour que les voix s’arrêtent, pour que le silence revienne. On sort forcément frustrés de voir cette délicate symphonie se terminer en leçon de morale débordante de pathos, comme si plusieurs élégantes lignes de code se terminaient par un coup de coude sur le clavier. Pas de quoi dénigrer les aspects positifs de Snowden, mais assez en nourrir d’amers regrets.

La fiche

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SNOWDEN
Réalisé par Olivier Stone
Avec Joseph Gordon-Levitt, Shailene Woodley, Melissa Leo… 
Etats-Unis – Thriller, Biopic

Sortie en salle : 2 Novembre 2016
Durée : 135 min




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Laura
7 années il y a

Je n’entend malheureusement pas enormement de bien de ce film.
Ta chronique est surement la plus positive jusqu’a presente cependant je pense quand m’arreter quelques instants pour le voir.
Merci pour ton avis !! Bonne journée !!

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