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L’ORNITHOLOGUE

7
Bon

Fernando est ornithologue. Il étudie les cigognes dans l’arrière-pays portugais. Seul, armé d’un kayak et d’une paire de jumelles, il sillonne fleuves et forêts. À la suite d’un accident, il se réveille nu et sans affaires…

Intérieur, extérieur.

Il existe dans la filmographie du Portugais Joao Pedro Rodrigues une dualité intense entre le beau et le terrifiant, entre la contemplation béate, généralement extérieure, et celle en proie aux doutes et aux tiraillements, intérieure cette fois-ci. L’Ornithologue ne déroge pas à la règle, se plie volontiers à sa bipolarité sans en sacrifier sa patience habituelle et un fil rouge en forme de métamorphose. Paul Hamy (Suzanne, de Katell Quillévéré) interprète Fernando, un ornithologue dont le destin est directement inspiré de celui de Saint Antoine. Saint-Patron au coeur de la culture et des mythes portugais, partageant son prénom originel avec celui du protagoniste du film, lui aussi s’en va dans un périple solitaire. Lui aussi est séduit par la beauté lente de la nature. La vision de Fernando se referme peu à peu sur le seul prisme de sa fascination. Les plans se resserrent peu à peu. À tel point qu’il en oublie les dangers inhérents de son errance. Ici finit son voyage physique. Nu, blessé, errant, ici commence son périple psychique. Une (re)naissance. 

Exercice de foi

Si la religion est bien représentée au fil des rencontres de Fernando, par les soeurs chinoises chrétiennes, par une secte païenne et par Jesus, un inconnu du lac, L’Ornithologue ne sombre jamais dans l’exercice de foi primaire et se permet une distance prodigieuse entre le mythe qu’il explore, la temporalité contemporaine de son action et une photographie magnifique, cohérente, outil premier de la fusion entre les deux éléments cités précédemment. Joao Pedro Rodrigues transforme les multiples péripéties de son récit de foi en un grand mélange de genres. Foncièrement bucolique au démarrage, le film met un pied dans le drame, trempe un orteil dans quelques sueurs froides stylisées, effleure parfois du bout de la sandale la comédie, et marche de plein pied dans les codes d’un fantastique léché. Tour à tour fasciné, meurtri, convaincu, amoureux et distant, Fernando devient progressivement Antonio au cours de son voyage initiatique – une transformation mentale mais également physique, interprétée par le réalisateur lui-même.

Jamais complaisant, toujours prudent sur l’autel de ses références et proposant constamment une interprétation à la fois profondément personnelle et cinématographiquement cohérente de son propos, L’Ornithologue pêche toutefois sur un plan. Rodrigues peine à équilibrer l’exposition de ses enjeux, soit profondément enfouis sous plusieurs couches de métaphores visuelles, soit au contraire explicités un peu trop directement par des dialogues sans fards. Rien qui ne justifie une ire quelconque, mais face à l’ensemble des références artistiques, religieuses et culturelles du scénario et de son montage, le spectateur averti devra faire preuve de curiosité. Cette curiosité, pas négative en soi si elle eut été diégétique, aurait peut-être permis à L’Ornithologue de se sublimer totalement. 

La fiche

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L’ORNITHOLOGUE
Réalisé par João Pedro Rodrigues
Avec Paul Hamy, João Pedro Rodrigues, Han Wen… 
France, Portugal – Drame

Sortie en salle : 30 novembre 2016
Durée : 117 min 




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