L’Atalante photo 1 © Gaumont Malavida

JEAN VIGO : L’ÉTOILE FILANTE

Jean Vigo a connu une carrière très brève, étant mort à 29 ans. Sa filmographie se résume à quatre métrages : deux courts – A Propos de Nice et Taris ou la natation – un moyen – Zéro de conduite – et un long, L’Atalante. Moins de trois heures au total ce qui semble peu mais qui constitue une œuvre fulgurante à la richesse et à l’influence considérables. 

Fils d’un anarchiste mort en prison, très probablement assassiné par l’extrême droite, Jean Vigo a connu une enfance durant laquelle il fut ostracisé, tenu à l’écart et balloté de lycée en lycée. De cette enfance malheureuse et marquée par une grande violence et de cet héritage paternel, Vigo gardera un esprit libre, frondeur, attaché à un esprit de fraternité, de camaraderie. On trouve également dans son œuvre humour, poésie et prouesses techniques. 

A propos de Nice

Documentaire muet sur la ville de Nice, comme tous les bons documentaires, À propos de Nice porte la marque d’un auteur qui pose son regard et exprime sa vision des choses à travers un montage, ici humoristique mais aussi corrosif et parfois assez osé pour l’époque. Il alterne images d’opulence et de misère – on voit même un enfant défiguré par une maladie qui ressemble à la lèpre. Sans aucun commentaire ou intertitre, toute la force de l’œuvre vient ainsi du découpage, des scènes choisies. On aperçoit ainsi un ecclésiastique apparaître entre deux scènes de femmes en train de danser de façon lascive, provocante ou le visage d’une figure de carnaval grotesque faire écho à celui d’une vieille femme qui semble en pleine extase, alors qu’apparaissent également des cheminées d’usines à l’allure phallique. 

Taris ou la natation

Consacré au champion de France, Taris ou la natation débute ironiquement par la chanson « Maman, les p’tits bateaux… ». Il s’agit d’un court-métrage à priori très explicatif sur les techniques de nages, le crawl, la brasse, mais aussi d’une œuvre assez moqueuse, certaines postures du nageur paraissant ridicules ou outrées. Le thème de l’eau qu’on trouvait dans A Propos de Nice et qu’on reverra dans L’Atalante est ici bien sûr très présent et les scènes au fond de la piscine prouvent la maîtrise technique de Jean Vigo et les innovations qu’il a apportées au cinéma à cette époque.

Zéro de conduite

Moyen-métrage devenu culte, mais longtemps censuré puisque visible dans sa version maintenant connue que depuis 1946. Film sur l’enfance et l’oppression dont elle est parfois l’objet de la part des adultes ou de l’institution, Zéro de conduite est un pamphlet libertaire, une ode à la révolte où l’on parle de solidarité et où l’on se moque des instances républicaines et du drapeau français, remplacé par le drapeau noir de l’anarchie. Dans ce film, où l’on dit « Merde » à son professeur ou au principal, on notera également des allusions assez frontales à la sexualité. Zéro de conduite, très autobiographique offre des scènes de toute beauté visuellement et des personnages inoubliables comme le surveillant Huguet, homme lunaire et attachant, que l’on voit imiter le personnage de Charlot et qui semble le seul adulte à respecter et aimer les enfants, pion interprété par Jean Dasté qu’on retrouvera dans l’Atalante


L’atalante

L’Atalante ressort également dans le cadre de la rétrospective intégrale orchestrée par Malavida. 

Lire notre chronique de ce chef d’œuvre de poésie, offrant une vision très charnelle et crue de l’homme et de ses instincts. 

Jean Vigo l'étoile filante

Cette intégrale, restaurée en 4K par Gaumont – le noir et blanc de toute beauté rend parfaitement hommage à l’esthétique de ces films – et distribuée au cinéma par Malavida, sortira dans les salles le 29 septembre et permettra on l’espère de découvrir ou de revoir des films emplis de fulgurances, de poésie et d’audace tant formelle que thématique. 

 




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