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GERARDMER 2021 | Palmarès et bilan

Festival International du Film Fantastique de Gérardmer : 28ème édition


Du mercredi 27 janvier au dimanche 31 janvier se tenait la 28ème édition du Festival de Gérardmer. Dans un contexte particulier, bien sûr, en raison de la pandémie : celle-ci se déroulait ainsi en ligne avec tout ce que cela peut comporter de frustrations évidentes. Mais avec aussi l’avantage de programmer sa séance personnelle à n’importe quelle heure et d’avoir accès, dès le début à quasiment toute la programmation. en dehors des 3 films de la Nuit Décalée et de la séance Cinexpérience Sens Critique

Le Palmarès a été annoncé ce dimanche aux alentours de 18 heures et couronne plusieurs films dont on espérait qu’ils obtiennent une récompense. Précisons également que dans l’ensemble, même si certains films ne tenaient pas toutes leurs promesses – un des écueils plusieurs fois rencontré était une réussite formelle qui prenait le pas aux dépens de l’écriture – il s’agissait d’un bon cru avec de  belles découvertes, tant dans la sélection des films en compétition – courts-métrages compris – que dans celles des films hors compétition, de la nuit décalée ou de la Rétromania.

Rappelons que le Jury pour la sélection longs-métrages était présidé par Bertrand Bonello et que le Jury courts-métrages avait à sa tête le comédien Pio Marmaï.


 Compétition et palmarès


Longs-métrages

Le film de Brandon Cronenberg, Possessor, remporte donc deux récompenses : le Grand Prix et le Prix de la musique originale pour le compositeur Jim Williams. Avec ce second film, Brandon Cronenberg, après un Antiviral en 2012, excitant et original sur le papier, mais qui dans son développement pouvait décevoir. Avec Possessor, Brandon Cronenberg livre un ouvrage plus maîtrisé, relativement éprouvant par sa violence graphique et son caractère oppressant. Ce film bénéficie d’une partition musicale au service d’une mise en scène virtuose et qui ajoute de l’ampleur aux images sans redondances.

Le Prix du Jury est attribué ex æquo à Teddy des frères Ludovic et Zoran Boukherma et à Sleep, film allemand de Michael Venus. Concernant Teddy, Amandine Dall’Omo avait eu l’occasion d‘écrire tout le bien qu’elle pensait de ce film français singulier et drôle, qui mêle plusieurs genres – une caractéristique partagée par plusieurs œuvres  de ce cru 2021. Sleep, quant à lui, raconte l’histoire d’une jeune femme qui pour aider sa mère, en proie à de terribles cauchemars, va affronter des forces occultes liées au passé nazi d’un village. Passé peut-être pas révolu. Par sa sobriété, la force de son propos alliée à une apparente modestie, Sleep frappe les esprits et délivre un message sur des dangers toujours actuels.

Les Prix de la Critique et Prix du Public attribués à La Nuée de Just Philippot viennent couronner une œuvre forte, déjà chroniquée ici. La Nuée, portée par une très belle et intense interprétation, avec à sa tête l’incandescente Suliane Brahim, évoque un drame intimiste en flirtant avec le film de genre et en tournant délibérément le dos aux clichés sur le monde agricole.

Le Prix du Jury Jeunes vient également récompenser Teddy.


Bilan de cette 28e édition


La sélection des longs-métrages en compétition comptait douze films. Outre les quatre fictions récompensées, on pouvait voir Anything for Jackson, film canadien de Justin Dyck, histoire terrifiante mais non dénuée d’humour (déjà chroniqué ici,) et Host de Rob Savage, plaisant mais dont la modernité apparente dissimulait mal un air de déjà-vu.

Boys fom County Hell de Chris Baugh nous emmène à la chasse aux vampires dans une bourgade irlandaise qui suinte l’ennui et où le pub reste le lieu de prédilection des habitants : on ne s’ennuie pas et l’humour est présent mais rien d’inoubliable.

Mosquito State, coproduction USA-Pologne de Filip Jan Rymsza, intrigue avec son trader maladroit, en dehors des standards et dont l’immense appartement est envahi par les moustiques. Mais le film patine un peu et les intentions du réalisateur ne sont pas toujours très claires.

L’australien Sweet River de Justin McMillan et son héroïne à la recherche de l’assassin de son enfant comporte une bonne part d’émotion avec ses thèmes de la perte, du deuil et de la force du souvenir. On reste néanmoins un peu déçu par le développement de l’intrigue.

On a déjà évoqué The Other Side en début de festival. Quant à The Cursed lesson, film sud-coréen de Kim Ji-han et Juhn Jai-hong, qui voit une jeune femme intégrer un étrange cours de yoga et The Stylist de Jill Gevargizian, on a affaire à deux films mêlant horreur et thriller de bonne facture. 

Courts-métrages

T’es morte Hélène de Michel Blanchart reçoit le Grand Prix du court-métrage, amplement mérité tant le film est drôle, très bien mené sans temps mort, avec des acteurs qui prennent un plaisir communicatif à jouet leur partition. Cette fiction d’une trentaine de minute raconte le harcèlement dont est victime un jeune homme de la part du fantôme de sa défunte petite amie. Déjanté sans jamais sombrer dans la facilité ou la vulgarité, T’es morte Hélène est un modèle de maîtrise et d’inventivité.

Les quatre autres courts-métrages de la compétition, Aquariens d’Alice Barsby, Canines d’Abel Danan, La nuit m’appelle d’Olivier Strauss et Sous la mousse d’Ollivier Briand faisaient preuve également de belles qualités narratives et de poésie. 


Les films hors compétition


Dans les rubriques hors compétition, on comptait pas moins de onze films, auxquels s’ajoutaient les trois longs-métrages de la Nuit Décalée, les quatre reprises de Rétromania et la séance spéciale de l’animation Aya et la sorcière, ainsi que la séance Cinexpérience Sens Critique (le public avait le choix entre plusieurs propositions et devait voter : c’est Grave de Julia Ducournau qui a finalement fait l’objet d’une séance spéciale).

Pour les films hors compétition, en dehors de Beauty Water, déjà chroniqué ici, on notera la découverte d’un très beau film indonésien, Impetigore, histoire de malédiction et de vengeance superbement photographiée et réalisée par Joko Anwar, Sputnik, film russe d’Egor Abramenko déjà remarquée par Grégory Pérez lors de la dernière édition de l’Etrange Festival. Un film de science fiction bien mené sur un cosmonaute qui revient d’un voyage spatial, habité par un parasite peut-être symbiotique, peut-être dangereux. L’intrigue fantastique de double d’une critique de l’URSS et de sa bureaucratie politique et militaire au moment de la guerre froide.

Citons encore le canadien Butchers d’Adrian Langley qui flirte avec des réminiscences variées – de Massacre à la tronçonneuse à Vendredi 13, en passant par Pulp Fiction – l’anglais Ghosts of War d’Eric Bress, qui comme son titre l’indique convoque esprits et film de guerre et l’américain The Mortuary Collection de Ryan Spindell, succession d’histoires horrifiques plus trash et sexuellement allusives les unes que les autres. Ces trois films constituent d’efficaces films de genre très bien réalisés et qui ont toute leur place dans un Festival de cette trempe.


La Nuit Décalée


Disponibles dès 22 heures, le samedi, trois œuvres déjantées. Outre Psycho goreman de Steven Kostanski, on pouvait voir Cyst de Tyler Russel, film assez peu ragoûtant mais ô combien réjouissant – il est question de kystes sébacés géants – complètement déjanté et au rythme trépidant. Il s’agit d’un hommage aux films d’horreur de série B des années 50 et 60, du type The Blob danger planétaire. Et le troisième film, Slaxx d’Elza Kephart, raconte l’improbable histoire de paires de jeans hantés suite à une malédiction. Une œuvre là aussi complètement loufoque qui tire à boulets rouges sur bien des tares de notre société (le consumérisme, l’exploitation des pays où sont situées les usines textiles, la culture d’entreprise poussée à l’extrême). 


Rétromania


Quatre grands classiques étaient proposés : Le Loup Garou de Londres de John Landis, Chromosome 3 De David Cronenberg, The addiction d’Abel Ferrara et XTRO de Harry Bromley Davenport. Certains de ces films paraissant prochainement en vidéo, nous devrions revenir plus en détail sur ces films devenus cultes.


BILAN


En résumé, cette 28ème édition du Festival de Gérardmer, malgré le fait qu’elle ait lieu en ligne constitue une belle réussite supplémentaire. On attend réellement avec impatience la 29ème édition, en espérant qu’elle aura lieu sur place avec des salles obscures pour frissonner d’avantage et partager avec d’autres spectateurs le plaisir d’avoir peur. Souhaitons aussi que les salles de cinéma françaises rouvrent prochainement pour permettre à tous ces films d’exister et de trouver leur public.

 

 

 

 




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