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GATSBY, LE MAGNIFIQUE

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Bancal mais fascinant

Printemps 1922. L’époque est propice au relâchement des mœurs, à l’essor du jazz et à l’enrichissement des contrebandiers d’alcool… Apprenti écrivain, Nick Carraway quitte la région du Middle-West pour s’installer à New York. Voulant sa part du rêve américain, il vit désormais entouré d’un mystérieux millionnaire, Jay Gatsby, qui s’étourdit en fêtes mondaines, et de sa cousine Daisy et de son mari volage, Tom Buchanan, issu de sang noble. C’est ainsi que Nick se retrouve au cœur du monde fascinant des milliardaires, de leurs illusions, de leurs amours et de leurs mensonges. Témoin privilégié de son temps, il se met à écrire une histoire où se mêlent des amours impossibles, des rêves d’absolu et des tragédies ravageuses et, chemin faisant, nous tend un miroir où se reflètent notre époque moderne et ses combats.

Baz Luhrmann aime revisiter les grands classiques de la littétature anglophone. Après avoir proposé une relecture très contemporaine du célèbre Romeo et Juliette, celui-ci s’attaque à la célèbre oeuvre de Francis Scott Fitzgerald, Gatsby le magnifique. Après une première demie-heure d’exposition qui ressemble à s’y méprendre à une transposition méthodique du premier segment de Moulin Rouge ! (ça saute aux yeux, franchement), les enjeux commencent à apparaître et la coquille du mystérieux Gatsby commence à s’effriter devant la belle Daisy, à laquelle il porte un amour démesuré et fantasmé, qu’il retrouve cinq ans plus tard. Le cinéma baroque de Luhrmann pourrait se rapprocher de l’opéra avec ses outrances, ses sentiments décuplés, sa dramaturgie exacerbée, ses costumes élaborés et sa mise en scène grandiloquente. Le cinéaste australien ne perd rien de sa démesure et de ses habitudes anachroniques puisqu’il utilise les mêmes ingrédients qui ont fait sa renommée pour ce Gatsby, qui manque malheureusement d’une certaine folie, comme si celui-ci avait pris des gants pour satisfaire tout le monde comme il l’avait fait avec Australia, que l’on peut considérer dans la même lignée. Au final, ce qui faisait la force de Moulin Rouge (son parti pris, son romantisme absolu et ses excès assumés à 200%) devient dans Gatsby assez maladroit et parfois désagréablement maniéré. C’est d’ailleurs lorsque Luhrmann utilise ses vrais atouts (le sens du burlesque et du sentimental) qu’il réussit le plus ses scènes, à l’image du segment autour des retrouvailles entre Gatsby et Daisy, débutant de façon comique chez Nick Carraway pour se terminer autour de l’escalier de Gatsby, avec une scène particulièrement belle et émouvante.

Que penser donc de cette nouvelle adaptation de Gatsby le magnifique ? L’essence du roman semble préservée et demeure l’élément le plus abouti autour du personnage principal, Gatsby, imposteur gentleman sublime et romantique. Le reste du métrage est plutôt inégal et certaines scènes misant trop sur le spectaculaire tombent à plat. Il faut dire qu’il n’est pas toujours aidé par son casting, Tobey Maguire massacrant la majorité des scènes dans lesquelles il figure. Outre cette grossière erreur de casting, le tandem DiCaprio-Mulligan fonctionne lui plutôt bien. Au final, le nouveau projet de Baz Luhrmann – qui a fait l’ouverture à Cannes mercredi – s’avère être un film fascinant et bancal, essentiellement réussi mais globalement raté, porté par un duo impeccable et quelques instants musicaux enchanteurs à l’image du morceau leitmotiv Young and Beautiful qui vient nous hanter de façon subliminale comme pour traduire l’état émotionnel du personnage tourmenté de Gatsby qui aura passer des années à poursuivre le passé et la vision fantasmée qu’il avait de lui et de la vie qu’il se souhaitait. Will you still love me, when I’ve got nothing but my aching soul ? 

BAZ LUHRMANN | DRAME, ROMANCE | USA/AUS | 142 MIN | 15 MAI 2013 | LEO. DICAPRIO, CAREY MULLIGAN



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Wolvy128
10 années il y a

Plutôt d’accord avec toi si ce n’est que je suis moins sévère concernant Tobey Maguire dont le rôle est tout de même assez ingrat. En tout cas, j’aime bien ta formule « fascinant et bancal, essentiellement réussi mais globalement raté » qui résume assez bien ce que je pense du film.

selenie
10 années il y a

Je ne suis pas si dur. Pour ma part c’est un très beau film… 3/4

Marcozeblog
10 années il y a

Ah ouais, McGuire erreur de casting ? Moi, je les trouvé bien en homme droit et pas trop à sa place. Je suis partagé sur le film mais globalement j’ai aimé… @+

Thom Left
Thom Left
10 années il y a

Je suis d’accord avec toi dans l’ensemble. J’ai trouvé la première partie du film très mal fichue, avec des gros plans en abondance et des enchaînements de scènes à outrance. Du coup, j’étais plus agacé que transcendé par les sentiments que le film voulait dégagé (au contraire de toute la seconde partie qui est véritablement réussie). C’est dommage, car ce début de roman est vraiment sublime.
Par contre, j’ai trouvé tout le casting très bon, et Tobey était juste dans le rôle.

ChonchonAelezig
10 années il y a

C’est exactement ce que je craignais… J’aime la folie baroque de Baz Luhrman et j’avais adoré Roméo + Juliette et Moulin Rouge. Ensuite, il est tombé, à mon sens, dans un classicisme que je regrette (pour une fois qu’on avait quelqu’un de franchement original) avec Australia. J’avais hâte de lire les premières critiques sur Gatsby. Vu la magnificence des bandes annonces et extraits, plus le fait que Jay Z ait fait les musiques… je me suis dit : youpi, il est revenu au baroque ! Mais apparemment le mix prend mal… Cependant, j’ai hâte de le voir, bien sûr !

neil
10 années il y a

Moi j’ai passé un très bon moment, et je trouve le film de qualité. Mise en scène maîtrisée et interprétation de haut niveau, je n’ai pas beaucoup de reproches à faire.

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