plumes

PLUMES

Une mère passive, dévouée corps et âme à son mari et ses enfants. Un simple tour de magie tourne mal pendant l’anniversaire de son fils de quatre ans, et c’est une avalanche de catastrophes absurdes et improbables qui s’abat sur la famille. Le magicien transforme son mari, un père autoritaire, en poule. La mère n’a d’autre choix que de sortir de sa réserve et assumer le rôle de cheffe de famille.

Critique du film

Auréolé du Grand Prix Nespresso à la Semaine de la critique à Cannes en 2021, Plumes donne à voir un film dans lequel fantastique et vie de foyer se font maîtres. À l’occasion d’une fête d’anniversaire, une mère de famille voit son quotidien basculer lorsque son mari se transforme en poulet à la suite d’un tour de magie qui tourne au désastre.

Un pitch et un message qui s’estompent

Si le pitch peut sembler alléchant et même vraiment séduisant, force est de constater que le long métrage, lui, tourne un tant soit peu au vinaigre. On reconnaît évidemment la prise de risque du réalisateur égyptien de 34 ans de vouloir rendre compte d’une fable, d’un récit d’où se dégage une vérité morale. Plumes s’empare d’une profonde volonté qui est celle de raconter, de laisser libre court aux plans rapprochés qui plongeraient entièrement le spectateur dans ce conte fantastique.

Plumes
Malheureusement, Omar El Zohairy fait se côtoyer les personnages de son film avec une certaine passivité propre à une mise en scène qui vient alors les y noyer. Le film prend de la distance, ce qui peut parfois s’avérer nécéssaire au propos délivré par certains longs-métrages, mais dans le cas de Plumes, le message se tarit et on regrette même que le film ne s’immerge pas dans une modernité qui l’ancrerait dans son époque. Bien que l’on reconnaisse une universalité dans lequel le film se raconte, on aurait toutefois souhaité que derrière celui-ci se trouve un message féministe bien plus fort et imposant sur la recherche de l’émancipation féminine et sur le rôle de la mère seule en Égypte dans l’obligation de remuer ciel et terre pour les bienfaits de sa famille.

Plumes s’ancre dans une captation pure et dure de ses personnages et des situations qu’ils encourent. Le film semble avoir mis de côté une force narrative et un scénario suffisamment consistants qui auraient pu nous tenir en haleine tout au long de ses deux heures au profit d’un patchwork de gros plans sur les corps.

Des personnages qui semblent s’oublier

Bien que très présente à l’écran, l’actrice Demyana Nassar semble s’effacer. Il est regrettable que le personnage qu’elle incarne ne recherche pas une manière plus vivace d’affirmer sa personnalité et ses choix. Cette proposition entreprise avec clairvoyance par le cinéaste n’atteint pas le public et semble s’arrêter à la toile cinématographique sans parvenir à la traverser. Volonté d’immerger le réel dans la fiction, Omar El Zohairy est tout de même parvenu à s’entourer d’une myriade d’acteurs qui semblent pour la plus grande majorité tenter et essayer de donner vie (en vain) à leur personnage.

La plume du scénario propre au réalisateur (alors en collaboration avec Ahmed Amer) semble leur avoir faussé compagnie lors de la période d’écriture tant sa platitude et sa lenteur empêche l’élévation et un démarrage solide de la narration. Le réalisateur regarde, scrute ses protagonistes, tente de les sonder sans même donner une consistance palpable à leur existence. Le film nous donne donc à observer un univers particulièrement creux où résonne l’écho du vide.

Petit bout par petit bout

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La contemplation mise en oeuvre par le regard d’Omar El Zohairy est excessive et revient à une intellectualisation des fragments des corps découpés par la caméra, des morceaux d’animaux dévoilés ça et là dans les plans. Ceux-ci rendent le propos étalé de manière peu raffinée tout au long du film. Le premier long-métrage du réalisateur égyptien joue sur l’ambivalence des détails, le dévoilement de ceux-ci se fait étape par étape voire même petit bout par petit bout, à tel point que le sens primaire et premier de cette volonté perd en intelligibilité.

On reconnaît le travail extrêmement léché et maîtrisé du cinéaste dans sa mise en scène, mais cependant, ce contrôle excessif et surexploité du moindre détail qu’il semble mettre en place, perd en force de part cette volonté de ne jamais laisser la place à l’inattendu. La frustration peut même nous étreindre par instants car les quelques moments où des flottements de vitalité se font ressentir, le réalisateur les gomme pour n’en dévoiler que de rares aperçus. Le long-métrage nous laisse une pluie de regrets et semble avoir laissé, malheureusement, quelques plumes derrière lui.

Bande-annonce

23 mars 2022 – D’Omar El Zohairy, avec Demyana Nassar, Samy Bassouny et Fady Mina Fawzy.




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