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UNE SÉPARATION

Lorsque sa femme le quitte, Nader engage une aide-soignante pour s’occuper de son père malade. Il ignore alors que la jeune femme est enceinte et a accepté ce travail sans l’accord de son mari, un homme psychologiquement instable…

Ruptures

C’est avec Une Séparation, cinquième film d’Asghar Farhadi que j’ai découvert le cinéma de ce réalisateur iranien en 2011. Ce film me fit l’effet d’un électro-choc par son acuité psychologique, l’intensité de son interprétation, sa richesse thématique et aussi car il s’agit selon moi d’un cinéma du questionnement plutôt que de la certitude, quitte à installer un climat d’inconfort pour le spectateur. Très rapidement, je le vis une seconde fois au cinéma puis en vidéo. J’allais ensuite découvrir les précédents films de ce metteur-en-scène et bien sûr les suivants également.

Film de la séparation, pas uniquement celle d’un couple, mais aussi rupture entre modernité et poids des traditions, classes aisées, instruites et classes populaires vivant dans la peur de Dieu. Et aussi cassure, incommunicabilité entre le monde de l’enfance qui croit en la vérité et la justice comme quelque chose d’évident, de pur et le monde adulte, plein de concessions, de petits arrangements avec ses valeurs de départ. Termeh, la fille de ce couple qui se sépare, va découvrir du haut de ses onze ans des dilemmes et des affres qu’elle ne soupçonnait sûrement pas.

Faut-il céder aux compromis pour obtenir la paix pour soi et sa famille ou au contraire se faire respecter quitte à être dur, à manquer d’empathie ? Et Termeh va peut-être aussi connaître la douloureuse perte de l’innocence qui marque le passage de l’enfance à l’âge adulte, où les repères se troublent, où la vérité n’existe plus. Asghar Farhadi, par des choix de mise en scène, mais aussi par des ellipses, fait confiance au spectateur, à son intelligence et lui laisse toute liberté pour se faire une opinion ou pour rester avec des questions sans réponse. 

Une séparation

Presque toutes les scènes se passent dans des lieux clos (appartement, voiture, bureau du juge…). Cette idée d’enfermement renvoie à celui des personnages, que ce soit dans leur obstination (Nader et ses principes, Hojat et les préceptes religieux) mais aussi à une société oppressante, dont les traditions religieuses provoquent également une séparation terrible entre hommes et femmes, ces dernières étant dépendantes dans leur couple. Surtout dans les classes peu aisées. Ainsi, Razieh, la femme de ménage qui vit dans la crainte de son mari ; Simin semble plus libre, mais devant le juge qui devrait prononcer leur divorce, on lui rappelle que le consentement de son mari est nécessaire. Asghar Farhadi, à travers ce film, nous offre également de beaux personnages de femmes qui cherchent à arranger les choses, à trouver un terrain d’entente plutôt que l’affrontement.  

Film sur la complexité, l’ambiguïté et véritable suspense psychologique, Une Séparation est l’exemple même du film qu’on peut voir et revoir, tant chaque nouvelle vision met en lumière des détails, des nuances qui auraient pu échapper au spectateur. Par sa grande richesse, il reste pour moi, à ce jour le chef d’œuvre de la filmographie d’Asghar Farhadi.


#LBDM10Ans




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