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TROIS NUITS PAR SEMAINE

Baptiste, 29 ans, est en couple avec Samia, quand il fait la rencontre de Cookie Kunty, une jeune drag queen de la nuit parisienne. Poussé par l’idée d’un projet photo avec elle, il s’immerge dans un univers dont il découvre tout, jusqu’à entamer une relation avec Quentin, le jeune homme derrière la drag queen.

Critique du film

Un premier long-métrage est souvent l’aboutissement d’années de travail autour d’un sujet, presque une obsession, matérialisé par des films courts, puis par ce moment si particulier où, enfin, la forme longue se concrétise. Pour une réalisatrice comme Lola Quivoronn, c’était le monde de la moto et la présentation de Rodéo en mai dernier à Un certain regard, section de la Sélection officielle du festival de Cannes. Florent Gouelou a quant à lui tourné de nombreuses années autour de la scène Drag, lui consacrant deux court-métrages, Un homme mon fils (2017), puis le remarqué Beauty boys en 2020, qui est comme une anti-chambre de ce que va devenir Trois nuits par semaine. Présenté à la Semaine internationale de la critique à la Mostra de Venise cette année, c’est l’occasion de présenter au monde un personnage fascinant et passionnant à bien des égards, Cookie Kunty.

L’auteur choisit comme porte d’entrée à cette histoire Baptiste, joué par Pablo Pauly, jeune homme travaillant comme manager à la Fnac, englué dans son histoire d’amour avec Samia. C’est par ses yeux qu’on découvre trois drag queens, aidant des infirmiers et infirmières travaillant dans les rues pour les plus démunis. L’arrivée de Cookie Kunty, exubérante apparition à la voix rauque et charmeuse, est un coup de tonnerre, tant pour le spectateur que pour Baptiste, qui ressent une attirance et un magnétisme immédiat pour Cookie. La façon dont Gouelou construit son histoire est d’une grande finesse et contourne de nombreux clichés et écueils qui auraient pu se présenter pour ce type d’histoire. Si Baptiste est fasciné dans un premier temps par une expression de genre féminine particulièrement troublante, c’est pour ensuite se rendre compte que cet amour est plus entier et moins entravé qu’il ne le croyait.

Trois nuits par semaine
Par étapes, il succombe à ses sentiments pour Cookie/Quentin, en suivant un parcours qui épouse son propre projet artistique, réaliser des photos sur ce groupe de drag queens et entrer dans leur intimité. La découverte des coulisses de ces spectacles et de ces performances est un effeuillage nécessaire pour qu’il puisse abandonner des défenses construites depuis l’enfance. Une très belle scène au début du film le montre interdit et perdu face à Cookie, il ne sait pas comment la toucher et ainsi consommer son amour, troublé dans ce qu’il doit faire pour enfin pouvoir s’abandonner à son désir. Cette sensibilité qui parcourt le film permet de surmonter les petites fautes dans l’écriture, les quelques facilités dans la narration, repoussées par la beauté de cette éducation sentimentale.

Trois nuits par semaine est étonnant en ce qu’il raconte l’histoire d’un homme en construction, Baptiste commence à peine à se construire pour lui-même, face à une troupe de personnes plus affirmées, avec une Cookie Kunty déjà star, hallucinante de charisme et dont la carrière commence à prendre son envol. La dissymétrie entre leurs deux situations rappelle le besoin d’équilibre dans une relation amoureuse et la difficulté à s’épanouir loin des diktats de la société de consommation et ses normes corsetées. Cette très belle histoire en forme de parcours initiatique met en valeur cette forme de liberté qui consiste à rêver sa vie sans relâche et avec détermination. C’est par l’expression artistique que passe cette émancipation si belle et si nécessaire et c’est de là que jaillit la beauté si présente dans ce touchant et magnifique premier film.

Bande-annonce

9 novembre 2022 – De Florent Gouelou, avec Pablo Pauly, Romain Eck et Hafsia Herzi.


Semaine Internationale de la Critique à la 79ème Mostra de Venise.




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