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THE CIRCLE

Oubliable

Les Etats-Unis, dans un futur proche. Mae est engagée chez The Circle, le groupe de nouvelles technologies et de médias sociaux le plus puissant au monde. Pour elle, c’est une opportunité en or ! Tandis qu’elle prend de plus en plus de responsabilités, le fondateur de l’entreprise, Eamon Bailey, l’encourage à participer à une expérience révolutionnaire qui bouscule les limites de la vie privée, de l’éthique et des libertés individuelles. Désormais, les choix que fait Mae dans le cadre de cette expérience impactent l’avenir de ses amis, de ses proches et de l’humanité tout entière…

Obsolescence programmée.

Google avait jusque là le droit de tirer la tronche. Steve Jobs, figure par excellence du gourou du XXIe siècle et mise en liège aidant, a eu droit à deux biopics de cinéma quasiment simultanément. Mark Zuckerberg a eu le privilège de se faire graver le portrait par David Fincher, rien que ça, dans un film à la fois ambigu et générationnel. L’entreprise de Serguei Brin et Larry Page, autant que Bill Gates et son Microsoft, n’a pas eu cette chance – on ne compte pas Les Stagiaires, comédie anxiogène avec Vince Vaughn et Owen Wilson. Leur conte est peut être un peu trop « nerdy », un peu trop lié à des personnalités discrètes, sans grande faille dramatique digne du grand écran, pour sauter de la case documentaire à celle de la fiction de cinéma. Voilà pourtant désormais chose faite pour Google, avec un The Circle qui promet sur le papier de ne pas se laisser tomber dans l’hagiographie et de révéler les plus sombres secrets de la firme. On repassera.

The Circle est ici le miroir de Google. Entreprise adulée de la Silicon Valley et véritable écosystème à elle seule, ses employés prospèrent, enchainent concert privé sur keynote révolutionnaire, travaillent « casual » et profitent d’un CE qui leur offre sorties kayak, escalade et jeux de team building plutôt que des remises de 50% sur le prochain spectacle d’Holiday On Ice. En bref, un esprit start-up fondu dans une multinationale qui brasse des milliards. Pour James Ponsoldt, The Circle est l’occasion rêvée pour élargir un peu l’échelle de son propos. Alors que Smashed et The Spectacular Now tournoyaient en siphon, et avec des qualités certaines, autour de leurs personnages, le contexte s’élargit ici dans le domaine entrepreneurial, mais surtout sociétal.

Le procédé est toutefois à tempérer. Ponsoldt préfère retourner la pyramide et partir de sa base. Voilà donc l’ingénue Mae Holland (Emma Watson), ayant grandi hors du cœur de la Silicon Valley, qui va vivre le rêve de sa vie en entrant enfin dans The Circle. Avec quelques idées naïves et un sens de l’art de la (sa ?) mise en scène, elle franchit rapidement les échelons jusqu’à rencontrer Eamon Bailey, grand gourou parce qu’il en faut un au cinéma, antagoniste 2.0 aussi sympathique que double qui colle parfaitement à Tom Hanks. Autour, pas grand chose, si ce n’est l’utilisation malheureusement trop discrète du tiède dissident John Boyega et des névroses factices de Karen Gillian et Ellar Coltrane.

Le spectateur suit donc Watson dans son voyage initiatique, censé gratter le vernis brillant et parfait de l’image idéalisée de Google. Pourtant, tout est fade dans cette plongée sans remous, à commencer par la prestation sans relief de l’actrice anglaise. Il y a bien ça et là quelques pistes sur le voyeurisme du tout connecté, sur le corporatisme qui s’immisce dans les réflexes quotidiens, voire quelques incursions réussies du côté du bullshit de la start-up nation. Pour autant, Ponsoldt n’ose jamais se perdre dans le labyrinthe qu’il trace et rétropédale dès qu’il se sent perdu vers sa porte d’entrée traditionnelle, le drame relationnel à toute petite échelle (familial, amoureux, fraternel). Nous voilà bien à l’étroit dans un tout petit rond déjà bien trop familier. Face à lui, le grand cercle idéologique et revendicateur est vide. La solution de son tracé, évidente.

On ne peut décemment pas accuser The Circle d’être à la solde des tyrans qu’il prétend faire tomber, ni Ponsoldt de produire délibérément une contre-vérité sur un sujet, reconnaissons-le, complexe. Alors que rien ne nous met foncièrement en colère en sortie de séance, le temps et le recul font de terribles dégâts à l’opinion sur le film. On se dit que le projet, porté par une idée initiale alléchante, a manqué d’une actrice principale à sa mesure, aurait profité d’un metteur en scène moins tendre. Les conditionnels s’amoncellent, alors qu’on leur ajoute une fin d’une naïveté malaisante et un score insupportable de Danny Elfman. Et voilà que le peu de compassion envers The Circle, comme l’optimisme désincarné de ses employés, se révèle bien friable face à l’épreuve du temps.

La fiche

THE CIRCLE
Réalisé par James Ponsoldt
Avec Emma Watson, Tom Hanks, John Boyega…
Etats-Unis – Thriller, science-fiction, drame
Sortie : 12 juillet 2017
Durée : 110 
min




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