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SCREAM

Casey Becker, une belle adolescente, est seule dans la maison familiale. Elle s’apprête à regarder un film d’horreur, mais le téléphone sonne. Au bout du fil, un serial killer la malmène, et la force à jouer à un jeu terrible : si elle répond mal à ses questions portant sur les films d’horreur, celui-ci tuera son copain… Sidney Prescott sait qu’elle est l’une des victimes potentielles du tueur de Woodsboro. Celle-ci ne sait plus à qui faire confiance. Entre Billy, son petit ami, sa meilleure amie Tatum et son frère Dewey, ses copains de classe Stuart et Randy, la journaliste arriviste Gale Weathers et son caméraman Kenny qui traînent tout le temps dans les parages et son père toujours absent, qui se cache derrière le masque du tueur ?

Do you live scary movies ?

Comment définit-on une œuvre culte ? Terme galvaudé, qui semble désigner tout et son contraire, l’œuvre culte désigne théoriquement toute œuvre, et donc film, qui trouve une résonance populaire particulière. Sa définition est pourtant bien plus complexe, car certaines œuvres qu’on qualifie de culte aujourd’hui tombent malheureusement dans l’oubli le plus total des années plus tard. Que faut-il alors pour qu’une œuvre bénéficie de ce statut quasi-religieux ? Pour Umberto Eco, la réponse se trouve dans sa réception. En effet, une œuvre culte, c’est avant tout une œuvre qui offre des ressources identitaires fortes. En somme, une connexion à d’autres œuvres et cultures (intertextualité) qui trouve un écho particulier auprès d’un groupe de personnes. Une œuvre qui parvient à traverser le temps tout en marquant profondément la pop culture.

Sorti il y a vingt ans, Wes Craven remettait au goût du jour le slasher avec Scream, films de tueurs masqués au goût prononcé pour les armes blanches. Wes Craven interroge les codes du genre à travers un savant mélange d’humour et d’horreur. Que se passerait-il si les personnages étaient conscients des codes du genre ?

Le téléphone sonne. Une adolescente blonde décroche. L’appel semble anodin, mais la voix au bout du fil est inquiétante. Il fait nuit, elle est seule dans une immense maison. Le plan séquence rend la menace inquiétante et resserre peu à peu le piège sur la jeune fille, prisonnière de son propre foyer. « Aimes-tu les films d’horreur ? » La question, posée comme un ultimatum, viendra décider de la capacité de sa protagoniste à survivre : dès son ouverture, le film impose sa qualité méta qui le rendra si particulier. La jeune fille est alors ramenée à son rôle de spectatrice, au même rang que le ou la spectateur.ice qui regarde le film. Parce qu’elle transporte avec elle les connaissances du genre, le massacre devient plus ludique. Appeler la police, fermer toutes les portes, la victime prend soin de ne pas commettre les erreurs fatales du genre. La tension n’en est que plus accrue, car il n’est plus question de savoir quand le tueur va apparaître, mais où.

Les trois lois

Toute la force de Scream réside dans le lien établi avec les spectateur.ice.s. Dans un monde où la culture du cinéma d’horreur semble acquise pour tous, le tueur doit redoubler d’effort pour frapper là où on ne l’attend pas. Il en ressort trois lois absolues, auto-critique d’un genre déjà usé jusqu’à la corde. Pas de sexe, pas d’alcool et de drogues et surtout personne ne quitte la pièce sans dire « je reviens ». Des lois puritaines tournées au ridicule, mais qui rappellent pourtant la fonction moralisatrice du cinéma d’horreur : mettre le ou la spectateur.ice dans le droit chemin.

Les adolescent.e.s de Scream ne se privent pas de boire ou de coucher. Lorsque Sidney finit par coucher avec Billy, elle se sait condamnée et va devoir tout faire pour survivre. C’est ce qui fera pourtant d’elle la final girl, la survivante du récit, normalement privilégiée par une supériorité morale, n’ayant pas succombé au sexe et à l’alcool. Sid prouve alors que le trope de la sexualité est désuet : on peut être une héroïne, ne plus être vierge et ne plus en être punie.

Au-delà de l’aspect parodique, Scream synthétise à lui seul, à travers sa multiplicité de références, tout un pan du cinéma d’horreur. Scream s’apparente à une sorte jeu de piste avec lequel les spectateur.ice.s aguerri.e.s peuvent interagir directement. Le film cristallise une culture commune et fait de lui le « film d’une génération » dont l’identité découle inconsciemment de ses répliques et de son tueur au masque. Un film post-moderne, parvenu à s’affranchir de ses prédécesseurs et à s’imposer comme véritable référence du genre. Son succès n’est plus à prouver, trois suites et une série auront suivi, à la qualité plus que variable. Il n’en reste pas moins que Scream est une œuvre qui parvient à rassembler à travers le temps, et c’est peut-être en cela que le film est véritablement culte.


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