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ROUBAIX, UNE LUMIÈRE

La fiche

Réalisé par Arnaud Desplechin Avec Roschdy Zem, Léa Seydoux, Sara Forestier...
France Thriller, drame – Sortie : 21 août 2019 – Durée : 119 mn

Synopsis : À Roubaix, un soir de Noël, Daoud le chef de la police locale et Louis, fraîchement diplômé, font face au meurtre d’une vieille femme. Les voisines de la victime, deux jeunes femmes, Claude et Marie, sont arrêtées. Elles sont toxicomanes, alcooliques, amantes…

La critique du film

Une ville du Nord de la France, un climat social pesant et une enquête policière… À l’annonce des éléments initiaux de Roubaix, une lumière, on se croirait plus chez Bruno Dumont ou les frères Dardenne que chez Arnaud Despleschin. C’est pourtant bien lui qui signe ce nouveau film, loin de son univers très parisien qu’il a pu développer dans Rois et Reine ou Les fantômes d’Ismaël. Roubaix est avant tout un film policier, dessinant en creux le portrait d’une des villes les plus pauvres de France, comme le précise la voix off qui introduit le film. Cette banlieue lilloise fut un lieu attractif avant de perdre ses emplois, son dynamisme, au désespoir de sa population.

Le récit principal de l’histoire est un meurtre qui a lieu le soir de Noël, quand la police retrouve la dépouille d’une vieille dame à son domicile, sans vie. Louis, jeune lieutenant arrivant dans la ville, fait partie des policiers chargés de l’enquête. Cette quête des coupables, les gardes à vue qui s’ensuivent, et les interrogatoires des suspects, est sans doute la grande faiblesse du film. Beaucoup trop programmatique, la progression narrative accouche de scènes assez poussives qui ont bien du mal à provoquer l’adhésion. Quand Claude et Marie, jouées respectivement par Léa Seydoux et Sara Forestier, sont arrêtées, les dialogues au commissariat ne sont pas une franche réussite. On s’enlise avec elles, pour ne pas dire plus.

Un des symptômes de ce problème d’incarnation et d’écriture est, qu’à coté de cela, certains personnages et certaines séquences sont bien meilleures. À tel point qu’on attend avec impatience que la caméra migre vers ces marges délaissées et abandonne enfin les deux pauvres femmes et leurs histoires sordides. On peut citer par exemple l’histoire de la jeune Sophie, ou Soufia, qui a fugué de chez ses parents. Le portrait que dresse Desplechin de cette adolescente, presque majeure, permet d’entrevoir ce qu’aurait pu être le film.

La lumière vient de Roschdy

En effet, l’aspect réussi et prenant tient autour de ces habitants et de leur histoire commune. L’oncle de Soufia était un ami du grand frère du commissaire Daoud, joué par Roschdy Zem. Leur rencontre dit mieux que tous les mots ce qu’a pu être cette ville pour une génération d’immigrés nord-africains qui étaient venus travailler si loin de chez eux. C’est avec cette scène que brille le plus ce sublime acteur qu’est Roschdy Zem. Comme il le dit lui-même, c’est un homme calme, qui n’aime pas s’énerver, et il le démontre dans de nombreux moments. Sa petite anecdote sur l’époque où il sortait en Belgique avec l’oncle de Soufia touche à l’intime de ces hommes, leur fragilité, et sans prononcer un mot plus haut que l’autre, il rappelle à la cadette qu’eux aussi ont beaucoup vécu, et donc beaucoup souffert, eux qui n’avaient presque rien. La qualité de son jeu, son charisme, la puissance de son regard, tout ceci permet à Roubaix, une lumière de ne jamais sombrer malgré la faiblesse de l’intrigue principale, principalement dans son deuxième acte. Dès qu’il apparaît dans le champ, il arrive à créer quelque chose, à l’instar de son rôle dans Une nuit de Philippe Lefebvre, déjà avec Sara Forestier, où il nous introduisait dans le Paris nocturne en policier de la brigade des mœurs.

Il est regrettable que toutes les promesses de certains plans ne soient que des lettres mortes. Il est regrettable que les aspérités qui jalonnent le personnage de Daoud ne débordent jamais sur ce qui l’entoure. On aurait aimé voir davantage le neveu du commissaire, savoir pourquoi il le déteste tant, même si les deux scènes qui le concernent sont un autre des points forts du film. S’il est déséquilibré et brouillon à bien des égards, on ne saurait rejeter complètement ce nouveau long-métrage d’Arnaud Desplechin qui arrive à émouvoir dans ces temps forts. Roubaix, une lumière est un film « malade », qui rate son descriptif de cette ville populaire tout en restant magnifique par instant, voire brillant quand on ne l’attendait plus.



Bande-annonce

Au cinéma le 21 août // Festival de Cannes 2019




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