My son

MY SON

Edmond Murray, divorcé, s’est éloigné de son ex-femme et de son fils de 7 ans pour poursuivre une carrière internationale. Lorsque le garçon disparaît, Murray revient précipitamment dans les Highlands. Rapidement, il devient clair que l’enfant a été kidnappé. Les parents cèdent d’abord au désespoir, mais Murray va très vite se montrer prêt à tout pour retrouver son fils. Il se lance dans une traque qui l’obligera à aller au bout de lui-même et à remettre en cause toutes ses convictions…

Critique du film

D’après ceux qui font le cinéma, l’aboutissement d’un film tient à peu près toujours du miracle. Pour beaucoup de réalisateurs, les défis à relever sont légion et accoucher d’une œuvre pour le grand écran ressemble par bien des aspects à un véritable chemin de croix. Dans un tel contexte, il est un exercice aussi curieux que passionnant à analyser : l’auto-remake. Qu’est-ce qui peut bien pousser un cinéaste à réinterpréter une œuvre pour laquelle il a déjà offert au public sa vision ? Les raisons sont sans doute aussi nombreuses qu’il y a de cas à étudier : il peut tout aussi bien s’agir d’une démarche de réaffirmation d’un propos pour un nouveau public (Funny Games US) que de l’opportunité de réactualiser une production avec les moyens techniques que l’époque offre (Les Dix Commandements).

Nouvel exemple de cette pratique ces jours-ci avec My Son, réalisé par Christian Carion (Joyeux Noël, Une hirondelle a fait le printemps…) qui adapte en langue anglaise son film Mon Garçon, sorti en 2017 et dans lequel Guillaume Canet incarnait un père à la recherche de son jeune fils disparu.

Comme un air de déjà-vu…

La démarche du réalisateur français demeure intrigante car au-delà de l’histoire assez classique, c’est tout un dispositif de mise en scène inhabituel auquel se frotte de nouveau le cinéaste dans cette réinterprétation. En effet, la particularité de Mon Garçon résidait dans le fait que son acteur principal n’avait pas connaissance du scénario (seulement les prémisses) pendant l’intégralité du tournage (étalé sur une période ultra resserrée de six jours !), contrairement au reste des comédiens et de l’équipe technique. Une approche aussi audacieuse que risquée, qui s’effondrait malheureusement sur la durée du long-métrage.

Dans un premier temps, ludique, ce procédé permettait une véritable immersion dans l’histoire, la caméra suivant, chevillée au corps, son interprète principal en liberté totale et dont la désorientation (à la fois de l’acteur et du personnage) servait à merveille les scènes d’affrontement entre les différents protagonistes. C’est dans sa seconde moitié que la mécanique adoptée montrait ses limites, le film étant obligé de contrôler de plus en plus les improvisations de son comédien pour faire avancer son intrigue dans les pas d’un thriller assez banal et peu crédible.

My son
Il était donc intéressant de voir quel traitement Christian Carion aller réserver à son remake, et s’il allait parvenir à mieux marier les règles strictes du thriller avec l’exercice de style imposé par le choix drastique de mise en scène. Douche froide, My Son ne propose malheureusement qu’un pauvre décalque (quasi plan par plan) de son parent français. Les ressorts utilisés par les scénaristes (dont Carion lui-même) restent strictement les mêmes que dans l’œuvre originelle, rendant le visionnage particulièrement pénible pour qui aurait déjà bien en tête la première version. Pire, le choix de ne s’en tenir qu’aux mêmes péripéties et rebondissements rendent la technique d’improvisation complètement factice, le jeu et les dialogues imaginés par les comédiens étant finalement très proches dans les deux films.

Pas grand-chose à se mettre sous la dent non plus pour le néophyte qui n’aurait vu ni la version française, ni entendu parlé du processus de réalisation imaginé par le réalisateur. Cette histoire de disparition d’enfant est tellement prisonnière de son ‘’gimmick’’ de mise en scène qu’elle ne permet au script de fonctionner qu’en étapes très programmatiques et déjà vues mille fois auparavant : la comparaison avec Prisoners de Denis Villeneuve, avec lequel My Son partage quelques thématiques, n’est clairement pas à l’avantage du second. Restent deux comédiens, James McAvoy et Claire Foy, tous les deux excellents et dont l’alchimie douloureuse fonctionne à plein régime.

L’écossais ne force jamais le trait et tire le meilleur de ce que lui impose sa contrainte de jeu. Face à lui, Claire Foy ne démérite pas et la connexion entre les deux acteurs est d’une telle évidence qu’il n’est jamais question de remettre en cause la crédibilité de ces ex, plein de ressentiments l’un envers l’autre mais dont les cendres d’un ancien amour laissent entrevoir encore quelques étincelles.

Itération anecdotique et superflue, My Son laisse au final la désagréable impression d’un film vain, pas (re)fait pour les bonnes raisons, le réalisateur étant incapable de renouveler ses ambitions et corriger les inconsistances d’un scénario initialement problématique. Ou peut-être s’agit-il d’un aveu d’échec sur le procédé utilisé, pourtant stimulant sur le papier, mais qui se révèle finalement définitivement pas compatible avec un genre aussi précis et fragile que le thriller…

Bande-annonce

3 novembre 2021 – De Christian Carion, avec James McAvoy, Claire Foy et Jamie Michie.




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