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MY OWN PRIVATE IDAHO

Scott et Mike sont prostitués et amants. Mais si Scott, dont le père est très riche et qu’il déteste, a un avenir tout tracé, Mike, quant à lui, traqué par ses souvenirs, sombre fréquemment dans des crises de narcolepsie. Au cours d’un voyage en Italie, une rencontre va les bouleverser et changer à tout jamais leur relation…

Poésie adolescente.

Troisième film de Gus Van Sant, My Own Private Idaho se place dans la lignée des premiers longs métrages du réalisateur, mettant en avant des marginaux dans sa région natale de Portland, le film prenant en effet pour cadre le milieu de la prostitution masculine. À cette période, Gus Van Sant repousse encore les avances des studios et reste attaché au cinéma indépendant. La présence de deux étoiles montantes du cinéma américain, River Phoenix et Keanu Reeves, n’empêche ainsi pas le réalisateur de livrer une œuvre très personnelle, qui flirte avec l’expérimentation, fer de lance de nombre des œuvres du cinéaste.

My Own Private Idaho peut se diviser en deux tendances majeures, qui répondent aux deux personnages principaux, et qui vont s’entrecroiser comme les destins des deux protagonistes. Il y a ainsi tout d’abord Scott (Keanu Reeves), fils du maire de Portland, hétérosexuel qui a fui le confort de la maison familial, pour errer dans les rues et vendre son corps. En s’inspirant du Prince Hal du Henri IV de Shakespeare, Gus Vant Sant impose un ton particulier à certaines séquences du film et au personnage même de Scott. Le réalisateur s’amuse à créer un décalage en jouant avec certains costumes très théâtraux et reprenant des éléments historiques, tout en les adaptant à la mode du début des années 90. De fait le personnage de Scott apparaît comme ambigu, à la fois désinvolte et plein de prestance. L’insolente beauté du jeune Keanu Reeves sied d’ailleurs parfaitement à ce rôle de dandy rebelle. Scott trompe-t-il simplement l’ennui, veut-il juste attiser la colère de son père ou sa démarche est-elle vraiment sincère ?

Antithèse de Scott, Mike est un homosexuel perdu, abandonné par ses parents, souffrant de crises de narcolepsies déclenchées par son ultra-sensibilité. Il n’a qu’un seul désir, retrouver sa mère. En manque cruel d’affection, il s’abime dans les bras de Scott dont il sait qu’il n’aura jamais d’amour en retour. Gus Van Sant aborde la quête de Mike avec une infinie délicatesse et beaucoup de poésie. Le réalisateur semble avoir calqué sa mise en scène sur ce que dégage River Phoenix, dont il a su capter toute la sensualité (l’acteur n’a jamais été aussi beau que devant la caméra de Gus Van Sant) autant que la fragilité quasi enfantine. Tout comme Mike sombre souvent dans le sommeil, le spectateur est comme hypnotisé par River Phoenix, qui l’embarque dans un monde à la lisière entre le rêve et la réalité.

Au final, Mike et Scott se rejoignent peut-être dans leur difficulté à quitter l’enfance pour basculer dans un monde d’adultes. My Own Private Idaho s’impose dès lors comme une pièce maîtresse de l’œuvre de Gus Van Sant, qui n’aura de cesse de revenir à la thématique de l’adolescence.


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