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MANO DE OBRA

Francisco travaille avec un groupe d’ouvriers à la construction d’une luxueuse maison à Mexico. Son frère meurt accidentellement sur le site. N’obtenant pas compensation pour ce décès, il décide de se mettre hors la loi.

Critique du film

Réalisateur autodidacte, David Zonana a appris en regardant des films. Inspiré par Michel Franco, mais également par le néoréalisme italien et par Luis Bunuel, il a aussi beaucoup observé le milieu ouvrier pour son film, consacrant de nombreuses heures de préparation à des échanges sur les conditions de travail au Mexique. Le choix du metteur en scène de faire tourner en majorité des non professionnels ajoute au naturel de l’interprétation et à l’aspect quasi documentaire de ce long métrage.

Mano de obra va à l’essentiel. On entre directement dans le vif du sujet avec l’accident du frère de Francisco. Pas d’effets faciles et pas de complaisance dans les scènes dramatiques ou violentes qui sont filmées sans pathos. Ce qui n’empêche pas une véritable empathie pour les personnages, qu’il s’agisse de Francisco ou de sa belle sœur, devenue veuve. Les conditions de vie de ces ouvriers que nous dépeint le film nous font vite prendre conscience du fossé qui existe entre les riches propriétaires et ceux qui construisent leurs maisons.

A ce réalisme social vient s’ajouter un sentiment d’étrangeté qui se dégage de certaines situations, lorsque Francisco décide de se venger. Comme le décès accidentel de son frère ne fait l’objet d’aucune indemnisation, Francisco décide effectivement de se faire justice lui même d’une façon assez inattendue. Et on peut bien sûr être perplexe devant son entreprise de vengeance. Est-ce réellement légitime et, surtout, pense-t-il pouvoir s’en tirer aussi facilement ? N’a-t-il pas ouvert la boîte de Pandore, en se croyant tout puissant ?

Aucun jugement n’est fait du comportement de Francisco. Ni de celui des autres personnages. On sent la situation complexe, tragique. La caméra de David Zonana adopte souvent une certaine distance, empreinte de respect et de sagesse.

Film sur la soif de justice, mais également sur l’utopie, la communauté et la façon dont les idéaux finissent pas être bafoués, Mano de obra tient à la fois du thriller et du film social. Métaphore politique sur les pays d’Amérique Latine, la corruption et le dévoiement des idéologies, il tire sa force d’une grande lucidité et d’une sobriété de traitement remarquable.

Bande-annonce

19 août 2020 – Réalisé par David Zonana, avec Luis AlbertiHugo Mendoza




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