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LES PROIES

Troublant

En pleine guerre de Sécession, dans le Sud profond, les pensionnaires d’un internat de jeunes filles recueillent un soldat blessé du camp adverse. Alors qu’elles lui offrent refuge et pansent ses plaies, l’atmosphère se charge de tensions sexuelles et de dangereuses rivalités éclatent. Jusqu’à ce que des événements inattendus ne fassent voler en éclats interdits et tabous.

Sept femmes.

Dix-huit ans (!) après la présentation de Virgin Suicides à la Quinzaine des réalisateurs, le parcours de Sofia Coppola soulève toujours les mêmes débats. Tantôt accusée de ne devoir sa place qu’à une quelconque influence paternelle, tantôt traitée comme une « cinéaste du vide », la réalisatrice continue à diviser et à intriguer. Les années ont beau passer, elle reste, aux yeux de bon nombre, la fille d’une icône et la créatrice de deux chefs-d’œuvre (Virgin Suicides et Lost In Translation), probablement décochés trop tôt dans sa carrière. Las, depuis ces débuts fracassants et un Marie-Antoinette malmené, les déceptions se sont enchaînées entre ressassement de thèmes fétiches (Somewhere, pourtant couronné par le Lion d’or à la Mostra de Venise en 2010) et longs-métrages jugés inconséquents (The Bling Ring). De toute évidence, Les Proies, sélectionné en compétition officielle cannoise, ne sera pas un grand film réconciliateur mais il témoigne d’un désir de cinéma suffisant pour signifier le véritable retour aux affaires d’un talent perdu de vue.

Vrai ou faux remake du film de Don Siegel, cette adaptation du roman de Thomas Cullinan brille par l’élégance de sa mise en scène et la gestion d’un huis-clos troublant. Magnifiant une nature quasi-merveilleuse, proche du conte et se révélant porteuse de cruels desseins, Sofia Coppola rappelle qu’elle sait filmer l’enfermement avec subtilité et esquisser des personnages en quelques plans. Sans être totalement féministe, Les Proies forme un étrange diptyque avec Virgin Suicides en montrant le côté pile de la révolte. Alors que la guerre de Sécession fait rage (ce que le spectateur ne fera qu’entendre), sept femmes sont piégées par les événements dans un pensionnat où elles expérimentent l’art de l’ennui. Face à l’arrivée d’un élément perturbateur (un soldat blessé), chacune décide de prendre le pouvoir pour mettre fin (ou non) à cette aliénation.

Déjà tiré d’un ouvrage, Virgin Suicides captait de façon aussi vaporeuse que déchirante la perte des illusions et la destruction d’adolescentes coupées du monde. À nouveau, Sofia Coppola narre ici cet éveil inopiné de la sexualité, transformant ces héroïnes en mantes religieuses prêtes à tout pour dévorer le mâle entré dans leur toile. L’excellence du casting renforce le raffinement et la langueur d’un film envoûtant, perfectible mais profondément juste dans sa manière de renverser les rôles, de s’imaginer la rébellion en lieu et place de la capitulation.

La fiche

LES PROIES
Réalisé par Sofia Coppola
Avec Nicole Kidman, Elle Fanning, Kirsten Dunst, Colin Farrell…
Etats-Unis – Drame, thriller 
Sortie : 23 août 2017
Durée : 91
 min




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